Dans une interview accordée au journal Sud-Ouest, Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, a affirmé que ceux qui ne veulent rien faire contre le changement climatique sont des « ennemis du peuple français ». Visiblement, la ministre a des connaissances historiques (très) incomplètes. Nous nous permettons de lui rappeler que l’expression était utilisée dans les régimes totalitaires communistes et qu’elle désignait ceux que le Parti voulait condamner. Les « accusés » étaient jugés non pas pour ce qu’ils avaient fait mais pour ce qu’ils étaient : des « ennemis du peuple », selon leurs « juges ». Les paysans « riches » ou koulaks, les « bourgeois », les popes et même leurs enfants, ceux qui faisaient partie des élites intellectuelles ou politiques, étaient considérés comme des « ennemis du peuple », ils étaient arrêtés et jugés pour « délit de classe ou d’origine ». Ces actes d’accusation ont donné lieu à des épurations et des purges de masse, comme celles des années 1930 en URSS, des années 1950 et suivantes dans les pays de l’Est, au Cambodge sous les khmers rouges, celles de Mao en Chine. Personne ne peut – ou ne devrait – les ignorer, pas même les plus ignares de nos politiques. Des dizaines de millions d’êtres humains innocents accusés d’être des « ennemis du peuple » ont été déportés dans des camps, envoyés aux travaux forcés, « rééduqués » par le Parti ou tout simplement exécutés, Mme Pannier-Runacher l’a-t-elle « oublié » ? Nous nous permettons aussi de lui signaler qu’on parle toujours d’ « ennemis du peuple » à Cuba, en Corée du Nord, et même encore en Chine.
Nous considérons que « ne rien faire contre le changement climatique » ne mérite pas un séjour au goulag ou une balle dans la tête. C’est le choix d’un individu, la liberté de chacun. On peut ou non être d’accord mais, de grâce, Mme la ministre, laissez cette expression d’ « ennemi du peuple » dans les poubelles de l’Histoire.