Certes ce roman historique est un rappel de la résistance des partisans des Stuart face à ceux de Guillaume d’Orange, du clan MacDonald face à celui des Campbell. Mais il évoque aussi la beauté sauvage des vallées et des locks écossais et surtout les méfaits de l’ignorance et de la superstition qui font passer une femme surhumaine pour une sorcière. Corrag, condamnée au bûcher, porte bien son nom et c’ est de sa bouche que se déroule le récit de sa vie. Charles Leslie, homme d’Eglise irlandais, fidèle au roi Jacques, est venu jusqu’ au fin fond de l’Ecosse pour l’interroger sur le célèbre massacre de Glencoe dont elle fut témoin. La description de son physique rébarbatif et de sa geôle putride contraste avec la beauté du style, promesse d’une lumière certaine. Tout est obscur et froidure dans la prison où le seul écho est celui de sa mère qui ne croyait pas au diable et dont le seul conseil était « n’aime jamais » car « c’est l’homme qui fait tout le mal ».
Mais Corrag, dans sa fuite toujours plus au Nord, dans sa solitude sauvage, devient « mère de cent mille choses ». Charles Leslie saura-t-il percevoir que ses talents de guérisseuse et de prémonition n’ont rien de la sorcellerie mais sont dûs à une profonde communion avec la nature et ses habitants? Saura-t-il discerner la grandeur de cet être christique au physique apparemment déchu mais à l’âme pleine d’apesanteur? Très beau livre qui, en rendant justice et hommage à cette visionnaire pleine de bonté, invite le lecteur à savoir discerner les tout petits moments de bonheur qui peuvent changer le monde …