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Un nouvel Impôt de Solidarité sur le Revenu

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Impôt de Solidarité sur le Revenu

Résumé

L’impôt sur le revenu est devenu illisible. Les revenus les plus élevés sont surimposés sous réserve de très nombreuses niches dont profitent d’autant plus les foyers qu’ils sont plus riches. Les taux d’imposition supérieurs, jusqu’à 49% avec la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (et jusqu’à 66,2% avec la CSG et les taxes annexes sur les profits immobiliers), découragent l’activité et favorisent sans cesse la création de niches supplémentaires sous les pressions catégorielles. Au niveau des revenus les plus bas les mesures de dégrèvement et décote se sont multipliées de telle façon que le calcul de l’impôt est devenu opaque. A l’inverse, la CSG, malgré quelques différences de taux est encore un outil relativement simple portant sur tous les revenus, quasiment sans exceptions importantes. Il est possible d’envisager un système permettant de fusionner l’impôt sur le revenu et la CSG de façon à profiter de la simplicité et du rendement de celle-ci tout en conservant le principe de progressivité ancré dans la tradition française.

Il est proposé de revenir à un unique impôt sur le revenu à partir de la CSG, avec ses taux actuels qui seraient augmentés d’un taux uniforme de 15% applicable sur le revenu brut au-dessus d’une franchise de base par part de 17 000€ augmentée de 18 % du salaire brut dans la limite de 3 000€ au plus et seulement pour les deux parts conjugales, sans abattement ni exonération, des revenus du foyer. L’assiette de cet impôt regroupant CSG et impôt sur le revenu serait celle de la CSG. Toutes les niches fiscales seraient éradiquées sauf à conserver l’imposition du revenu après prise en compte, dans les montants susvisés, des parts conjugales et familiales, selon les conditions actuelles.

Le rendement de l’impôt serait équivalent à celui de la CSG augmenté du produit de la nouvelle imposition à 15% au-delà de 17 000 à 20 000€ par part, soit un rendement estimé sur les revenus de 2020 de 87Md€ soit 13 md€ de plus que le produit effectif de l’impôt sur le revenu en 2020. C’est possible grâce à l’extension de l’assiette de l’impôt sur le revenu à celle de la CSG.

Ce nouvel impôt serait modéré et modérément progressif, simple, juste et efficace. Il remobiliserait les énergies de ceux qui veulent entreprendre et travailler. Il dégagerait des marges budgétaires. Aucun des contribuables exonérés ne devrait devenir imposable sauf s’il abusait des niches fiscales.

Une telle réforme pourrait être faite sans pénaliser quiconque (hors des niches indues) et atténuerait la charge des mesures d’augmentation de CSG pratiquées en 2018 pour financer diverses exonérations de cotisations.

L’impôt sur le revenu

Le produit net1 de l’IR s’est élevé à 74 Md€ en 2020, 78,7 Md€ en 2021 et il est prévu pour 85,3Md€ en 2022 par la Loi de finances rectificative (LFR) du mois d’août 2022. Ces montants sont donnés après déduction des dépenses fiscales (les niches) qui étaient, au titre exclusif de l’impôt sur le revenu, de 37, 306 Md€ en 2020, de 35,465 Md€ en 2021 et serait de 35,138 Md€ en 2022. Toutefois ne sont pas compris dans les « dépenses fiscales » l’abattement de 10 % pour frais professionnels, l’application du quotient conjugal et du quotient familial, les mécanismes de décote, intrinsèques au caractère progressif et redistributif de l’impôt, de même que les dispositions accordant un régime particulier en dessous d’un montant minimal de revenu ou d’impôt calculé, des dispositions différant l’imposition dans le temps et permettant un report ou un sursis, des modalités de taxation des revenus à caractère exceptionnel, dont la nature diffère des autres revenus.

L’impôt sur le revenu est perçu principalement sur les traitements, salaires, pensions et retraites, mais après divers aménagement, déduction et autres avantages qui réduisent sensiblement l’assiette de taxation.

Les revenus sont imposés par part, c’est-à-dire après division du revenu du foyer par le nombre de parts qu’il représente, soit pour l’essentiel une pour chacun des parents, une demie pour chacun des deux premiers enfants au foyer et une part pour les suivants, sous réserve de diverses dérogations. Chaque part est imposée selon le barème progressif ci-après avant que le résultat ainsi obtenu par part soit multiplié par le nombre de parts pour obtenir le montant de l’impôt du foyer.

Pour l’imposition des revenus de 2021, le barème applicable à chaque part de revenu imposable est fixé comme suit (Loi 2021-1900 du 30-12-2021 art. 2, I- 2°-a) :

Tableau 1. Taux d’imposition du revenu 2021 par part

Mais en deçà d’un certain montant, l’impôt brut résultant du barème progressif fait l’objet d’une décote, différenciée selon la situation de famille. Au titre de l’imposition des revenus de 2021, la décote est applicable aux contribuables dont l’impôt brut est inférieur à 1 746 € (célibataires, divorcés, séparés ou veufs) ou à 2 889 € (couples mariés ou pacsés, soumis à une imposition commune), et son montant est égal à la différence entre respectivement 790 € ou 1 307 € et 45,25 % du montant de la cotisation d’impôt brut (Loi 2021-1900 du 30-12-2021 art. 2, I-2°-c).

Le site FIPECO a calculé que le vrai barème de l’impôt était donc assez différent de celui qui ressort de la simple lecture du Tableau 1.

Tableau 2. Le barème apparent et le vrai barème de l’impôt sur les revenus de 2021

Source : loi de finances pour 2022 ; FIPECO. Cas du célibataire sans enfant.

En outre le calcul de l’impôt fait l’objet de divers retraitements :

L’avantage fiscal résultant de l’application du quotient familial est limité pour chaque demi-part ou quart de part « additionnel », cette expression s’entendant des demi-parts ou quarts de part qui s’ajoutent au nombre de parts suivant :

  • deux parts pour les contribuables mariés ou pacsés faisant l’objet d’une imposition commune ainsi que les veufs dont le conjoint ou le partenaire (Pacs) est décédé au cours de l’année d’imposition ;
  • une part pour les autres contribuables : époux ou partenaires d’un Pacs faisant l’objet  d’une imposition  séparée,  célibataires (ou  assimilés), divorcés et veufs dont le conjoint ou le partenaire (Pacs) est décédé avant le 1er janvier de l’année d’imposition.

Pour l’imposition des revenus de 2021, le plafond de l’avantage en impôt est fixé à :

  • 1 592 € pour chaque demi-part additionnelle ;
  • 796 € pour chaque quart de part additionnel.

Puis, le calcul de l’impôt se fait après prise en comptes de très nombreuses niches fiscales, ce qu’on appelle en langage administratif les dépenses fiscales. Ainsi l’impôt sur le revenu est troué de dizaines d’exceptions sous forme de taux spécifiques  appliqués  à  certains  revenus  (plus-values  immobilières…) ; exonération de certains revenus (produits des livrets A…) ; estimation forfaitaire de certains revenus (bénéfices industriels et commerciaux inférieurs à un certain seuil…) ; abattements sur certains revenus (retraites…) ; déduction de certaines dépenses (pensions alimentaires…) ; « réductions d’impôts » (pour investissement locatif…) ; « crédits d’impôts » (pour transition énergétique…). En outre, les revenus de capitaux mobiliers ne sont plus soumis au barème mais à un prélèvement forfaitaire unique de 12,8 % (soit 30,0 % avec les contributions sociales).

Le système de l’impôt sur le revenu est complexe et il conduit à concentrer l’impôt sur un petit nombre de contribuables à des taux fortement progressifs. Seuls 44% des foyers fiscaux payent l’impôt sur le revenu et les 10% des foyers les plus riches acquittent 70% de l’impôt sur le revenu ou encore 50% du produit consolidé IR/CSG. Ce système crée des désincitations au travail et à la créativité.

Les familles modestes ne sont pas pour autant épargnées par les charges fiscales et sociales puisque selon l’étude OCDE 2022 sur « les impôts sur les salaires », en 2021, le coin fiscal (qui correspond au montant total des impôts et charges sur les revenus du travail supportés par les salariés et les employeurs, diminué des prestations familiales reçues, en pourcentage des coûts de main-d’œuvre pour l’employeur) le plus élevé au sein de l’OCDE pour les familles comptant deux enfants et un seul apporteur de revenu rémunéré au salaire moyen était celui de la France (39 %). La Finlande, la Turquie, l’Italie, la Suède et la Belgique, enregistraient des coins fiscaux compris entre 37 % et 39 %. C’est en Nouvelle-Zélande que le coin fiscal était le plus faible pour ces familles (6,5 %), suivie des États-Unis (8,5 %) et de la Suisse (10,6 %). La moyenne pour les pays de l’OCDE était de 24.6 %. Pour les familles ayant deux enfants et les deux parents recevant un salaire, l’un représentant le salaire moyen et l’autre 67% du salaire moyen, le France, à égalité avec l’Allemagne et l’Italie, est la plus imposée après la Belgique.

La CSG

L’assiette commune de la CSG et de la CRDS est beaucoup plus large que celle des revenus imposables à l’impôt sur le revenu. Elle est en principe alignée sur celle des cotisations sociales (donc le salaire brut), après application, s’agissant des salaires et des allocations de chômage, d’un abattement forfaitaire de 1,75 % calculé sur une base limitée à quatre plafonds de sécurité sociale.

Le système de la CSG n’est pas si simple2, mais il l’est beaucoup plus que celui de l’IR et surtout, il contient beaucoup moins de dérogations. Il y a peu de niches. L’essentiel de la base imposable est formée par les revenus d’activité et de remplacement ainsi que le fait ressortir le tableau ci-après :

Tableau 3. Catégorie de revenus Répartition des revenus déclarés à l’impôt sur le revenu, perçus en 2020 (en %)

Source : Fichiers des déclarations sur les revenus 2019 et 2020, DGFiP,  dgfip_statistiques_07_mai 2022

Les taux de base applicables sont peu nombreux.

Tableau 4. Les taux de CSG-CRDS en 2022

Mais  il  y  a  néanmoins  de  plus  en  plus  d’exceptions.  Les  revenus de remplacement sont passibles du taux de 9,2 % pour les allocations de préretraite versées aux bénéficiaires dont la préretraite a pris effet depuis le 11 octobre 2007, du taux réduit de 8,3 % pour les autres allocations de préretraite et les pensions de retraite et d’invalidité, et de 6,2 % pour les autres revenus de remplacement (ces deux derniers taux pouvant être ramenés, dans certains cas, à 6,6 % ou 3,8 % pour le premier, et à 3,8 % pour le second).

Les revenus du capital financier et immobilier sont en outre assujettis au prélèvement de solidarité au taux de 7,5 %, soit, avec la CSG et la CRDS, au taux de 0,5%, un taux global de 17,2 %.

Au regard de l’impôt sur le revenu, la CSG sur les revenus d’activité et de  remplacement est déductible à hauteur de 6,8 % (5,9 % pour les pensions de retraite et d’invalidité soumises au taux de 8,3 % et pour les allocations de préretraite perçues par les salariés dont la préretraite a pris effet avant le 11 octobre 2007 ; 4,2 % pour les pensions de retraite et d’invalidité soumises au taux de 6,6 % ; 3,8 % pour les autres revenus de remplacement) des revenus ou bénéfices au titre desquels elle est acquittée. Il reste en principe toujours une fraction non déductible de 2,4 %, excepté pour les revenus soumis au taux de 3,8%. En revanche, n’est pas déductible la CSG sur les revenus mobiliers soumis à prélèvement libératoire (obligatoire ou sur option) ou à l’impôt sur le revenu à un taux forfaitaire ou encore exonérés de cet impôt. Il en est de même de la CSG sur les plus-values immobilières et sur certains biens meubles.

Pour sa part, la CRDS prélevée sur la même assiette au taux de est de 0,5 % n’est pas déductible au titre de l’impôt sur le revenu

La fusion de l’IR et la CSG et la simplification de l’impôt

Le rendement de l’impôt sur le revenu est à la mesure de son assiette, plus modeste. Le produit de l’impôt sur le revenu pour 2021 a été de 79Md€ alors que celui de la CSG a été de l’ordre de 130 Md€, celui de la CRDS, qui s’ajoute à la CSG pour rembourser les dettes sociales, ayant été de 8 Md€ et celui des autres prélèvements sociaux de 12 Md€.

L’assiette de l’impôt sur le revenu est inférieure de 30% environ à celle de la CSG.

Il est proposé d’intégrer l’impôt sur le revenu dans la CSG en augmentant les taux de celle-ci d’un montant égal pour tous applicable au-delà d’une certaine franchise pratiquée en tenant compte des quotients familiaux et parentaux actuels, de telle manière qu’aucun contribuable ne soit perdant.

C’est possible avec un taux uniforme de 15% pratiqué sur chaque part de revenu au-delà de 20 000€.

Nombre de foyers et nombre de parts

En 2017, selon la direction de la législation fiscale, il y avait en France 37M de foyers fiscaux qui avaient en moyenne 1,655 part par foyer. En 2020, il y avait selon l’administration fiscale 39,9M de foyers fiscaux, soit une augmentation de 7,84% du nombre de foyers fiscaux en trois ans. Mais selon l’Insee, la population française était en 2017 de 66,774M et de 67,063M en 2020, soit une augmentation de 0,43%. Le nombre de parts fiscales moyen par foyer n’est pas renseigné par l’administration pour 2020, mais il peut être reconstitué en considérant que cette moyenne a baissé à proportion de l’augmentation du nombre de foyers fiscaux sous déduction de l’augmentation de la population. En effet, à défaut d’augmentation de la population, l’augmentation du nombre de foyers fiscaux ne peut se faire que par l’arrivée des enfants à l’autonomie fiscale ou par la séparation des couples, correspondant à autant de foyers nouveaux en plus et autant de nombre de parts par foyer en moins. Il y aurait donc en 2020 un nombre moyen de parts par foyer de 1,655 × 1,0043 x (37/39,9) = 1,541. C’est l’hypothèse que nous retiendrons en arrondissant le nombre moyen de parts par foyer à 1,55 pour 2020, étant précisé que, par prudence, nous considérons que le nombre de parts à prendre en compte correspond à des parts entières même si nombre de foyers les plus aisés ne déduisent pas de leur revenu imposable le montant maximum possible par part eu égard au plafonnement de l’avantage fiscal attribué à chaque part familiale.

Evaluation du produit du nouvel Impôt de solidarité sur le revenu

Pour déterminer le produit du nouvel Impôt de solidarité sur le revenu à taux proportionnel, on peut partir de la répartition des revenus imposables à l’impôt sur le revenu en 2020.

Tableau 5. Impôt moyen sur le revenu 2020 par décile de revenu fiscal de référence (RFR) par part* :

Source : Ministère de l’Économie, des Finances et de la Relance – DGFiP. *Sans prise en compte de l’imputation du prélèvement à la source payé en 2020

Puis on peut ensuite prendre en compte la valeur des revenus imposables à la CSG. Selon le rapport sur les comptes de la Sécurité sociale (DSS/SDEPF/6A Tableau 6, Valeur de point de la CSG par assiette en millions d’euros), la valeur du point de la CSG était de 14 430 M€ en 2019, 13 990 M€ en 2020 du fait de la crise et 14 580M€ en 2021. Il paraît raisonnable de prendre en compte les chiffres de 2021, ceux de 2020 ayant été anormalement bas, soit une assiette de 1 458 Md€, beaucoup plus large que celle des revenus aujourd’hui imposables à l’impôt sur le revenu.

Selon le tableau (Cf. tableau 3 ci-dessus) de la DGFIP, les traitements et salaires représentent 61,9 % des revenus déclarés par les foyers fiscaux en 2021 au titre des revenus perçus en 2020. Or, alors que les salaires imposables à l’impôt sur le revenu sont aujourd’hui les salaires nets après déduction des frais réels ou de 10% pour frais (dans la limite d’un minimum de 442€ et d’un maximum de 12 652€ en 2021), la CSG est perçue sur les salaires bruts sous la seule déduction d’une réduction représentative de frais professionnels fixée à 1,75 % pour leur montant inférieur à quatre fois la valeur du plafond mentionné à l’article L. 241-3.

Les cotisations obligatoires de base calculées sur le salaire brut représentent environ 18% du montant du salaire brut pour un employé. Par rapport au salaire brut pris en compte pour la CSG, le salaire net après frais pris en compte pour l’IR représente donc une réduction du salaire brut de 18 + 8,2 (soit 10% du net) – 1,75 (pratiqués pour la CSG) = 24,45% du brut. Pour que les salariés aujourd’hui exonérés ne deviennent pas imposables, il faudrait donc leur permettre de disposer d’un abattement sur les salaires bruts de 24,5% au-delà de la franchise actuelle de 15 171€ puisqu’on devient effectivement imposable aujourd’hui au-delà d’un revenu imposable de 15 171€. L’abattement à pratiquer pourrait être arrondi à 20 000€ [(20 000 – (20 000 × 24,5%)= 15 100€]. Mais cet abattement ne devrait en principe frapper que les salaires. Il est donc proposé de prévoir d’imposer tous les foyers ayant un revenu imposable (déterminé sur les bases de la CSG) de plus de 20 000€ au taux de 15% après un abattement de 17 000€ par part (soit un revenu de référence de 15 300€ après abattement forfaitaire pour frais de 10%) majoré de 18% des salaires bruts imposables dans la limite de 3 000€ au plus pour chacune des deux parts conjugales seulement.

Pour déterminer le produit possible d’un impôt proportionnel au taux de 15% sur la base étendue à celle de la CSG, nous proposons de retenir l’assiette de la CSG pour 2021, soit 1 458Md€, l’assiette de 2020 ayant été réduite exceptionnellement par la crise sanitaire. Il faut ensuite, à partir des impôts payés par chaque décile (cf. tableau 5 ci-dessus) déduire de la base d’imposition de 1 458Md€ les éléments suivants.

  1. Les revenus des foyers qui ne payent pas l’impôt et qui ne le paieront pas plus, soit une déduction.
  • Des parts des foyers du premier décile à raison de 2/3 de la borne supérieure du revenu de référence (RFR) de ce décile dans le tableau 5 susvisé pour 2020, le taux appliqué de 2/3 à cette borne supérieure de 1 600€ imposables étant retenu en considérant que le montant de 1 600 € de la limite supérieure des revenus imposables de ce décile étant très modeste, il faut raisonnablement prendre en compte une moyenne rehaussée. La déduction à opérer à ce titre serait donc de 3 990 000 foyers (soit 10% des foyers recensés) x 1,55 (nombre moyen de parts par foyer) x (1 600€ x2/3) = 6,597Md€.
  • Des parts du deuxième décile à raison de 1400 + 1/2 (pour prendre la moyenne des revenus de ce décile) de (6 400€ – 1 400€), soit 3 900. La déduction à opérer à ce titre serait donc de 3 990 000 foyers (soit 10% des foyers recensés) × 1,55 (nombre moyen de parts par foyer) × 3 900 = 24,120Md€.
  • Des parts du troisième décile à raison de 6 400 + 1/2 de (9 400€- 6 400€), soit 7 900€. La déduction à opérer à ce titre serait donc de 3 990 000 foyers (soit 10% des foyers recensés) × 1,55 (nombre moyen de parts par foyer) × 6 900€ = 42,673Md€.
  • Des parts du quatrième décile à raison de 9 400 + 1/2 de (11 800 € – 9 400 €) soit 10 600€. La déduction à opérer à ce titre serait donc de 3 990 000 foyers (soit 10% des foyers recensés) × 1,55 (nombre moyen de parts par foyer) × 10 600€ = 65,556Md€.
  • Des parts du cinquième décile à raison de 11 800€ + 1/2 de (14 100 € – 11 800 €) soit 12 950 €. La déduction à opérer à ce titre serait donc de 3 990 000 foyers (soit 10% des foyers recensés) × 1,55 (nombre moyen de parts par foyer) x 12 950 € = 80,089Md€.
  • Des parts du sixième décile à raison de 14 100€ + 1/2 de (16 300€ – 14 100€) soit 15 200€. La déduction à opérer à ce titre serait donc de 3 990 000 foyers (soit 10% des foyers recensés) × 1,55 (nombre moyen de parts par foyer) × 15 200€ = 94,004 Md€.

Au titre des six premiers déciles, il faudrait donc déduire de la base « CSG » imposable le montant net calculé ci-dessus des rémunérations imposables aujourd’hui à l’impôt sur le revenu, soit 313,035 Md€ (6,593 + 24,120 + 42,673 + 65,556 + 80,089 + 94,004), majoré des charges non déduites du revenu de base de la CSG par rapport à celui de l’impôt actuel sur les revenus. En considérant que ces charges non déduites représentent 24,45% du revenu brut (cf. ci-dessus), il faudrait majorer les revenus nets non imposés (déterminés ci- dessus) de ces charges représentant 32,36% du net (24,45/ 75,55). Toutefois, ce rehaussement ne devrait être pratiqué qu’à raison des salaires nets et non des autres revenus. Or, l’administration indique (cf. Tableau 3 ci-dessus) que les traitements et salaires ne représentaient en 2020 que 61,9% des revenus déclarés à l’impôt. Seuls ces revenus doivent donc être rehaussés des charges sociales « employé », soit 18% (cf. ci-dessus) sous déduction des 1,45% déjà déduits au titre de la CSG, soit 16,55%. Par ailleurs, si les pensions bénéficient de l’abattement de 10% pour frais comme les salaires et s’il n’est pas anormal d’en faire bénéficier les autres revenus professionnels (BIC, BNC, BA), les revenus fonciers, mobiliers et divers, soit 6,3% des revenus n’en bénéficient pas. Il faut donc limiter la majoration de 32,36% des revenus nets imposables à 61,9% du montant susvisé de 313,035Md€, soit une majoration de 62,70Md€, augmentée d’une majoration de 11,1% (correspondant à 10% de déduction pour frais sur le revenu net) sur les autres revenus d’activité et pensions, soit 31,8% des revenus imposables à l’impôt sur le revenu de ces six premiers déciles, correspondant à 11,050Md€ (313,035Md€ × 31,8% x 11,1%). La majoration totale à pratiquer est donc de 73,75Md€ (62,7 + 11,05), soit un montant total à déduire de la base CSG au titre de ces six premiers déciles de 386,785 Md€ (313,035 + 73,75).

  • Pour les quatre derniers déciles, les plus importants, nous déduisons le montant de la décote maximum à pratiquer par part, soit 20 000€. La déduction à opérer à ce titre serait donc de 3 990 000 foyers (soit 10% des foyers recensés) × 4 (le nombre de déciles concernés) × 1,55 (nombre moyen de parts par foyer) × 20 000€ = 494, 760Md€.

Il faudrait ainsi déduire au total 881,545Md€ (386,785 + 494,760) de la base imposable à la CSG de 1 458Md€, soit une base imposable au tires des quatre déciles imposables de 576,455Md€ au taux de 15%, soit un impôt de 86,468Md€, supérieur au produit actuel de l’impôt sur le revenu, sachant que le coût de la collecte d’un impôt aussi simplifié serait moindre que le coût actuel.

Tous gagnants

Ce nouvel impôt, l’ISR, serait donc calculé au taux actuel de la CSG de chacun augmenté de 15% pour tous, sous réserve d’une franchise de 17 000€ à 20 000€ par part pour la seule application de ce taux de 15%, sans décote ni autre déduction.

Sur cette base, le tableau ci-après montre au travers de quelques exemples que tous les Français seraient gagnants. Il met en comparaison le montant de l’impôt sur le revenu que payent aujourd’hui les contribuables concernés (en sus de la CSG) par rapport à celui qu’ils payeraient en cas d’application du nouvel ISR (en sus de la CSG également).

Les marges dégagées par ce nouvel impôt par rapport à l’impôt sur le revenu actuel sont dues bien évidemment à l’élargissement de l’assiette à celle de la CSG et à la suppression des niches que le taux modéré de l’impôt rend définitivement injustifiées. Certains seraient perdants sans doute, mais il ne s’agirait que de ceux qui profitaient abusivement des niches fiscales ou qui opéraient des « montages » réservés aux initiés. Les autres retrouveraient du pouvoir d’achat et la liberté de dépenser selon leurs choix plutôt que d’y être incités, souvent de manière inappropriée à leurs besoins, par des niches fiscales.

Cet impôt qui se substituerait à la CSG et à l’IR aurait donc deux taux, un taux de base correspondant à la CSG actuelle et un taux complémentaire uniforme pour tous ceux qui dépasseraient 17 000€ par part majorés de 18% de leurs salaires bruts dans la limite de 3 000€ de déduction au plus pour chacune des deux parts conjugales seulement. Il serait donc progressif, mais plus modérément qu’aujourd’hui. Il est proposé que les taux soient tous liés entre eux constitutionnellement de telle façon que la modification d’un taux entraine automatiquement à due proportion la modification des autres taux, ce qui éviterait les dérives populistes et démagogiques et stabiliserait l’impôt dont il pourrait être prévu que les taux doivent rester les mêmes sur 5 ans.

Un impôt adopté dans le monde entier

L’efficacité et l’équité de la flat tax, l’impôt proportionnel sur le revenu, sont reconnues par les très nombreux pays qui l’ont adoptée de par le monde. Une trentaine de pays la pratiquent à des taux uniques fixés généralement entre 10 et 20%. Beaucoup de ces pays sont ceux qui se sont libérés de l’empire soviétique et ont dû reconstruire une fiscalité à partir d’une page blanche après la chute du Mur. Mais d’autres pays en ont décidé comme l’Islande, les iles anglo- normandes, Hong-Kong…

Aux États-Unis, de plus en plus d’états abandonnent l’impôt progressif sur le revenu et instaurent la flat tax ! En un siècle, quatre États américains seulement sont passés d’un impôt sur le revenu progressif à un impôt proportionnel. Mais depuis le début de l’année 2022, cinq nouveaux états américains ont instauré un impôt sur le revenu à taux unique à court ou moyen terme. L’Iowa a choisi d’adopter un impôt sur le revenu à un taux fixe de 3,9% d’ici 2026 à la place d’un impôt à taux progressif qui, il n’y a pas si longtemps, pouvait atteindre 8,98%. Le Mississippi aura, lui aussi, un impôt à taux unique ramené à 4% d’ici 2026. La Géorgie a choisi de plafonner son taux d’imposition à 5,49% dès maintenant, en prévoyant une baisse de ce taux à 4,99% en 2024 .L’Arizona a voté, pour sa part, la transition vers un impôt « flat » avec un taux de 2,5% d’ici 2024. Lors d’une session extraordinaire de son Assemblée générale, l’Idaho a voté un impôt forfaitaire de 5,8%, qui remplace un système progressif à quatre tranches. En Oklahoma, une flat tax est prévue pour l’année prochaine. Au total, 14 États américains ont adopté ou sont en train d’adopter un impôt à taux unique. Pourquoi pas la France ?

Un impôt simple, juste et efficace

Outre les gains financiers, cet impôt aurait tous les avantages suivants.

  1. Le taux de fraude serait réduit par la simplicité et la modicité même de l’impôt : pourquoi frauder pour gagner 15% ? Comment frauder quand l’impôt est si simple ?
  2. La simplicité de calcul et de perception, qui en réduirait le coût, faciliterait le prélèvement à la source qui pour autant ne déresponsabiliserait pas les contribuables sachant et retenant aisément que le taux de prélèvement est de 15% en amont.
  3. Au demeurant, il n’y aurait plus besoin d’instituer un régime spécifique pour les revenus du patrimoine qui bénéficieraient de ce nouveau régime comme les autres revenus.
  4. Il n’y aurait plus de déduction d’une partie de la CSG puisqu’il s’agirait du même impôt. Néanmoins la franchise de 17 000€ à 20 000€ par part est calculée pour que personne n’y perde à cet égard.
  5. Le nouvel impôt devrait être prévu pour contribuer aux dépenses générales de l’État, en ce compris dans ses missions de solidarité, pour ne pas être assimilé à une cotisation sociale.
  6. Payés par tous, cet impôt serait démocratique au sens plein du terme, d’un geste citoyen. Il responsabiliserait chacun en lui faisant mesurer la charge des dépenses publiques par la contribution requise à cet effet. Il serait conforme aux dispositions votées en octobre 1789 par L’Assemblée nationale en application de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen : « Toutes les contributions et charges publiques, de quelque nature qu’elles soient, seront supportées proportionnellement par tous les citoyens et par tous les propriétaires, à raison de leurs biens et facultés ».
  7. Cette justice est notamment le fruit de l’égalité proportionnelle qui est ainsi appliquée à tous les contribuables, sans possibilité pour eux de jouer avec les niches et autres petits arrangements. Ce que demandait déjà Pierre Joseph Proudhon : « L’impôt, devant être payé par chacun, 1/ en raison de sa personne, 2/ en raison de ses facultés, doit être proportionnel à sa fortune : idée conforme au principe de l’échange; aux règles d’une comptabilité sévère, en un mot aux lois de la justice3 ».
  8. Le taux affiché de 15% serait attractif pour les étrangers et notamment pour les chercheurs et cadres aujourd’hui réservés à l’égard de la France à cause de sa fiscalité réputée, à juste titre, excessive.
  9. Plus généralement cette simplification et rationalisation de l’impôt autant que sa modération contribueraient à libérer les énergies de tous ceux qui ont envie d’entreprendre et de travailler mais qui sont aujourd’hui découragés par le poids des prélèvements et leur complexité. C’est une vielle règle énoncée déjà par le ministre d’Henry IV, Barthélémy de Laffemas, que les « Hauts taux tuent les totaux ». A l’inverse, des taux modérés favorisent la croissance et la dynamique d’un pays.

Certes, ce serait aussi un changement de philosophie politique au travers d’une certaine neutralité de l’impôt qui laisse les citoyens libres de leurs dépenses et du choix de leurs ressources sans que l’Etat ait à les inciter à acheter de l’immobilier locatif ou à faire des travaux de rénovation thermique. Ils le feront naturellement si c’est leur intérêt. L’impôt proportionnel empêche l’instrumentalisation du régime d’imposition. Il limite les interférences du pouvoir dans tous les secteurs de la vie économique et sociale.


1 Le revenu net s’obtient en retranchant du revenu brut divers remboursements et dégrèvements d’impôt (dont la prime pour l’emploi), soit un montant estimé de 20 498 000 en 2022.

2 Ainsi, sont par exemple exclus de l’assiette de la CSG les rémunérations des apprentis et stagiaires, certains avantages liés à l’intéressement en actions, certaines indemnités de rupture de contrat de travail ou de mandats sociaux, les indemnités spécifiques de rupture conventionnelle versées aux fonctionnaires, diverses petites retraites et petites allocations de chômage, certaines indemnités en capital servies aux victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle, les prestations familiales, la prime d’activité, les APL, le revenu de solidarité active, l’allocation pour demandeur d’asile…. Cette réforme serait peut-être l’occasion aussi de réduire drastiquement les exceptions qui frappent l’assiette de la CSG.

3 Proudhon, Théorie de l’impôt, 1860

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