Alors qu’Elisabeth Borne a annoncé vendredi 20 mai la composition de son gouvernement, les avis divergent sur sa nomination. Accusée d’être trop à droite par la gauche, celle qui fut longtemps proche du Parti socialiste est loin de faire l’unanimité parmi les rangs de ses anciens camarades de parti.
« Une nouvelle saison de maltraitance sociale et écologique » : la réaction de Jean-Luc Mélenchon à l’annonce de la désignation d’Elisabeth Borne à Matignon laisse peu de place au doute. Celle qui affirme être « une femme de gauche » ne le serait-elle pas vraiment ? C’est du moins ce que suggèrent les réactions massives, et dissidentes, de nombreuses voix de l’Union de la gauche, qui dénoncent le bilan de ses années à la tête des ministères du Transport puis du Travail. Adrien Quatennens, député Insoumis, conteste ainsi la bannière socialiste brandie par la (première) Première ministre de la (deuxième) Macronie : « Ce n’est pas le CV et les engagements lointains de Mme Borne qui la caractérisent politiquement ». L’élu avait d’ailleurs affirmé dans un premier temps qu’« Elisabeth Borne est l’autre nom de la maltraitance sociale et de l’irresponsabilité écologique d’Emmanuel Macron. On lui doit la réforme de l’assurance-chômage, l’ouverture à la concurrence du rail et la suppression massive de postes au ministère de l’écologie ».
Fabien Roussel, chef de file du PCF, déplore quant à lui que le président ait trouvé avec Elisabeth Borne « sa Madame Thatcher », symbole de « la technocratie au service de l’argent roi » et souligne : « Ça fait cinq ans qu’elle est ministre d’un gouvernement au service de la finance et des plus riches de notre pays, qui a fait beaucoup de mal aux classes populaires et au monde ouvrier ». Mme Borne : trop libérale pour être de gauche, trop socialiste pour être de droite. Les voix s’élèvent contre la Première ministre, reniée par son propre parti : Elisabeth Borne a-t-elle eu sa carte du PS ? Rien de moins sûr, à en croire Olivier Faure, premier secrétaire du parti. Pourtant, l’ancienne patronne de la RATP a longtemps travaillé auprès d’élus socialistes dont Lionel Jospin, Jack Lang, Ségolène Royal ou Bertrand Delanoë à la mairie de Paris : de quoi montrer patte blanche.
« Une tentative de tromperie »
Jean-Luc Mélenchon s’insurge quant à lui contre cette « tentative de tromperie : Mme Borne serait une femme de gauche […], nous ne lui accordons pas ce label. Nous ne pouvons oublier qu’elle est personnellement responsable du fait qu’un million de chômeurs dorénavant ont vu leur allocation baisser de plus de 17% à un moment déjà si difficile et que cette réforme de l’allocation-chômage, après avoir buté deux fois sur les décisions du Conseil d’Etat, a été prise sans aucune concertation […] avec quelque syndicat que ce soit […]. Mme Borne représente tout ce qui n’a pas marché au cours de ces cinq dernières années : la privatisation des services publics et la restriction des acquis sociaux des travailleurs ».
L’Insoumis reproche également à Elisabeth Borne d’être « libérale jusqu’au bout des ongles et [d’aller] au bout de sa logique​ », en rappelant les grands combats de ses mandats : l’ouverture à la concurrence de la SNCF et de la RATP, la modification du statut de cheminot, la retraite à 65 ans et le refus d’augmenter le SMIC. Et celui qui demandait en avril aux Français de l’ « élire Premier ministre » d’ironiser, déclarant souhaiter rencontrer la locataire de Matignon « au moins une fois avant de la remplacer ».
Ni de gauche…. ni de droite
Chez les Verts, on déplore le désintérêt de la Première ministre pour le sujet de l’écologie, malgré le sacro-saint rapport du GIEC récemment paru : « Elle partage, avec d’autres, la responsabilité de ces cinq ans de perdus pour le climat, ayant failli à faire voter les mesures de la Convention citoyenne pour le climat, ou à sortir le secteur de la mobilité de sa dépendance aux énergies fossiles ». Pour Génération.s, le parti très progressiste de Benoît Hamon, la nomination d’Elisabeth Borne, fonctionnaire scrupuleuse Macron-compatible, témoigne d’un virage « très à droite » de l’Elysée. Marylise Lebranchu, ancienne ministre de la Justice et membre du PS, déclarait quant à elle le 16 mai : « Elisabeth Borne est nommée comme prévu. Je me demande comment on peut dire qu’elle est de gauche, avoir été conseillère et directrice de cabinet n’est pas être socialiste, elle n’a jamais été au PS et ses réformes sont de droite ». Personne ne semble vouloir de Mme Borne dans son camp : à droite, même son de cloche. Technocratiquement correcte, mais philosophiquement de gauche, l’ancienne présidente de la SNCF ne rallie pas les foules. La gauche aurait peut-être préféré un Premier ministre… de droite.
3 commentaires
E. Borne « ni de droite , ni de gauche  » , c’est un peu le profil de nombreux polytechniciens .
D’être « En même temps » c’est dur par les temps qui courent….
Au moins les polytechniciens ont la capacité d’analyser les chiffres et de ne pas faire une gestion idéologique . Quant à l’égalité ,il serait correct que les gauchos fassent travailler les fonctionnaires au même rythme que les salariés du Privé qui les nourrissent .