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2024 : annus horribilis pour les comptes publics

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comptes publics©Freepik

Après l’Assemblée nationale le 10 juin, le Sénat a, à son tour, rejeté le 23 juin les deux projets de loi d’approbation des comptes de l’État et de la Sécurité sociale pour l’année 2024. C’est la quatrième année consécutive que le Parlement n’approuve pas la gestion des comptes publics.

La croissance de l’activité économique, qui a reflué en 2024 (1,2 % du PIB contre 1,4 % en 2023), a été portée pour moitié par la demande publique, c’est-à-dire par le déficit. Après avoir enregistré en 2023 le niveau de déficit public le plus élevé de la Ve République hors période de crise, nous avons réussi l’« exploit » de battre ce record dès 2024. Le déficit exécuté s’est élevé à 5,8 % du PIB l’an dernier, soit un écart de 1,4 point par rapport à la prévision de la loi de finances initiale (4,4 % du PIB), c’est-à-dire environ 41 milliards d’euros…

Plusieurs facteurs expliquent la dégradation des comptes publics

L’effet du dérapage de 2023 s’est répercuté sur 2024, avec une moins-value de 18 milliards d’euros sur les recettes fiscales. Les erreurs de prévision de Bercy sur la composition de la croissance se sont traduites par une élasticité des prélèvements obligatoires moindre qu’attendu, avec là encore un trou dans les recettes estimé à 9 milliards d’euros. Côté dépenses, si l’exécution relative au périmètre de l’Etat a été minorée de plus de 7 milliards d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale, les dépenses ont été plus élevées que prévu pour les collectivités locales, à hauteur de 8 milliards d’euros (330 milliards d’euros contre 322 milliards prévus initialement). Ce sont cependant les dépenses sociales – qui rappelons-le représentent 46,5 % de la dépense publique totale – qui ont le plus augmenté par rapport à la prévision : 777 milliards d’euros au lieu de 761 milliards, en raison notamment du dépassement de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) et de la revalorisation au 1er janvier des pensions retraites liée à l’inflation de 5,3 %. La hausse des prestations et transferts versés par les administrations de sécurité sociale représente ainsi plus de la moitié de la hausse de la dépense publique en 2024.

Contrairement à ce que l’on observait en 2023, la croissance nominale du PIB, en raison de la baisse de l’inflation, a été trop faible pour faire diminuer le ratio d’endettement public, qui est donc reparti à la hausse : 113,2 % du PIB. Dans le meilleur scénario, la charge de la dette tutoiera les 100 milliards d’euros en 2028.

Chaque année, l’Etat emprunte deux fois plus que le montant du déficit

Venons-en spécifiquement aux comptes de l’Etat, qui ont fait l’objet du premier des deux textes rejetés par le Parlement. Le déficit budgétaire constaté pour 2024 s’est élevé à 155,9 milliards d’euros, soit 9 milliards de plus que prévu en loi de finances initiale (146,9 milliards d’euros). Pour 1 euro de recettes, l’Etat dépense aujourd’hui plus de 1,50 euro. Même si l’on supprimait comme par magie l’ensemble des dépenses afférentes à l’enseignement scolaire et aux armées, la France demeurerait en déficit. Le financement de la dette publique ne signifie pas que l’on emprunte chaque année des sommes égales au déficit, mais des sommes deux fois plus élevées. Il faut en effet renouveler le stock de dettes existant : cela a représenté 155 milliards d’euros en 2024, soit exactement autant que le déficit.

Le projet de loi d’approbation des comptes de la sécurité sociale a lui aussi été rejeté. Comme pour l’Etat, les prévisions de recettes ont été fortement surestimées, à hauteur de 4,8 milliards d’euros. Les dépenses sociales ont, quant à elles, crû de 33 milliards d’euros en 2024. Le déficit de la Sécurité sociale s’est élevé à 15,3 milliards d’euros en 2024, soit 4,5 milliards de plus qu’en 2023. Ce déficit provient en très large part de la mise en œuvre des décisions prises dans le cadre du Ségur de la santé, pour un coût de 13 milliards d’euros chaque année. L’augmentation des salaires des soignants n’a été financée par aucune économie budgétaire. La branche maladie connaît ainsi un déficit de 13,2 milliards d’euros. Celui de la branche retraite atteint quant à lui 5,6 milliards d’euros. L’explosion des déficits de la Sécurité sociale entraîne inéluctablement une dégradation très forte de la dette sociale : 157,1 milliards d’euros en 2024.

Bref, la lente dérive des comptes publics se poursuit et, sauf à se retrouver sous le poids d’une contrainte extérieure, rien de très substantiel ne sera sans doute fait d’ici les deux prochaines années et l’élection présidentielle.

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5 commentaires

locatelli 27 juin 2025 - 9:16 am

et les voyages et les repas grandioses on en parle ?

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Picot 27 juin 2025 - 10:49 am

Nos “élites” pourraient montrer l’exemple : Diviser par deux le nombre de parlementaires (nous en avons plus qu’aux USA). Diviser par quatre, au moins, le nombre de ministres et secrétaires d’État (8 ministres en Allemagne). Supprimer l’augmentation scandaleuse des émoluments que se sont accordés, généreusement, nos parlementaires avec notre argent alors que les Français se serrent la ceinture. Concernant la Santé il serait urgent de se pencher sur le nombre de salariés de la Sécurité Sociale et sur le niveau de leurs salaires. Et on peut très bien supprimer, entre autres administrations, l’HAS et les ARS qui coûtent très cher et dont l’utilité reste à démontrer. Avant elles tout marchait mieux.

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Nejik 27 juin 2025 - 11:46 am

Et la fraude aux retraites, à la sécurité sociale on en parle ?

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Revet u 28 juin 2025 - 6:41 pm

Et que fait le PNF dans ce cas ?
La faute est si grande, les chiffres si énormes que l’on ne peut plus identifier les responsables ?
Dans les cas de MLP, F. Fillon ou N.Sarkosy dont les écarts ne coutent aux contribuables que les émoluments des magistrats qui les poursuivent, pas de pitié !
Il faut dire qu’ils ne sont pas du même bord, et puis les contribuables, ça ne compte pas.

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Filouthai 30 juin 2025 - 9:57 am

Au sujet de Macron, on peut parler « d’Annus » avec deux n. Le mot « anus » (avec un seul n) suffit à résumer les préoccupations de cet individu.
L’adjectif que vous accolerez à ce mot ne regarde que vous, mais il devrait être en rapport étroit (si vous me passez l’expression) avec le mot utilisé….

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