Plus qu’un été avec Rimbaud, c’est un été avec Sylvain Tesson qu’on a le plaisir de passer. Car il est indéniable que si celui-ci est soucieux d’éclairer la poésie du « voleur de feu » et justifier l’allure de ses « semelles de vent », c’est que Rimbaud est un autre lui-même.
Ces deux aventuriers du globe embrassent la beauté, saison passagère que transcrit le poète. Et si la poésie est dans le mouvement et nous dépasse il faut savoir avancer, être des « voyants » en symbiose avec le monde plutôt qu’en recherche de sens. Pourquoi vouloir tout comprendre, tout décrypter, à tel point que la beauté échappe au profit de récupérateurs sans scrupules ? Rien n’arrête les deux aventuriers, ni le danger, ni les vers incompréhensibles.
Et si tout semble inerte, à nous de réveiller le monde, de soulever ses voiles un à un. Peu importe le moyen, qu’il soit la drogue ou la paupière fermée, le commerce ou l’ennui. L’important est de chasser les horreurs du monde par la beauté des mots, et si le verbe n’arrive pas à exterminer le voyou et l’insatiable, « la réalité rugueuse » y pourvoit: c’est quand le cul-de-jatte rêve de montagne et de désert, c’est quand le romancier se met au service du néophyte comme de son ami :
« L’enfer, Arthur, c’est de laisser passer sa saison. Les illuminations, c’est quand on l’a compris… »
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«Un été avec Rimbaud » par Sylvain TESSON
Cet « Été avec Rimbaud » commence en fait en hiver, ce qui établit tout de suite un lien avec l’ouvrage le plus connu de Sylvain Tesson, « Bérézina ». Mais c’est à une véritable promenade en compagnie du jeune prodige que le lecteur est invité. Tout en exprimant ce qu’il pense, l’auteur se montre très prudent vis-à -vis de toutes les récupérations possibles de Rimbaud, exposant son originalité et sa place dans la mouvement littéraire et culturel de la seconde moitié du XIXe siècle jusqu’à sa fin un peu misérable dans un hôpital marseillais. Jusqu’au bout, il sera resté transgressif, sans pour autant s’avérer nihiliste. Sa modernité d’écriture, sa fulgurance des images sont remarquablement mises en valeur.
Ajoutons que l’auteur et l’éditeur ont eu l’idée, tout à fait inhabituelle, d’écrire en bleu — et en plus petits caractères — toutes les citations de Rimbaud. Il faut les féliciter de cette innovation technique, qui ne se révèle!le pas fatigante visuellement et ponctue agréablement les réflexions de Sylvain Tesson.
Merci à Brigitte Clavel de nous faire découvrir ce qu’un écrivain-voyageur peut dire sur un autre écrivain-voyageur.