Zohran est arrivé ! L’espoir renaît dans les salles de rédaction du New York Times, de CNN et du Washington Post. Un vrai socialiste a remporté les primaires démocrates de la ville de New York.
Il a 33 ans (comme Jésus Christ) et s’appelle Zohran Mamdani. Il est musulman (qualité indispensable), né en Ouganda (preuve de multiculturalisme anticolonial), fils d’intellectuels de gauche issus de la diaspora indienne. Il prône le boycott d’Israël (dans le New York de la gauche moderne, c’est un impératif), promet un plafonnement encore plus strict des loyers, l’ouverture d’épiceries publiques gérées par la ville, la « gratuité » des garderies d’enfants et des transports en autobus.
Le barbu charismatique est un pur produit de l’organisation « Democratic Socialists of America » (DSA), la plus vieille formation ouvertement socialiste aux États-Unis. C’est un disciple de Bernie Sanders, le sénateur socialiste du Vermont, chouchou de la presse française qui se reconnaît tellement en lui.
Le programme inquiétant de celui que Trump tient pour un « malade mental »
« C’est un malade mental 100% communiste… On a vu des gauchistes radicaux dans le passé. Mais là , ça devient un peu ridicule », résume Donald Trump, New-yorkais exilé, installé à la Maison–Blanche en raison de sa charge mais qui, comme beaucoup de riches new-yorkais, passe de plus en plus de temps en Floride, ou à la rigueur dans son domaine du New Jersey.
Les réformes « progressistes » promises par le nouveau Messie seront naturellement financées par une nouvelle hausse de l’endettement municipal et des taxes encore plus fortes sur les riches. Dans une ville déjà asphyxiée par les impôts, les effectifs pléthoriques d’employés syndiqués très choyés, une délinquance omniprésente, une saleté que seuls les New-yorkais et les touristes parisiens ne semblent plus voir, la fuite des résidents à hauts revenus et l’afflux de jeunes diplômés condamnés à vivre entassés avec des colocataires dans des appartements vétustes, le programme socialiste de Zohran Mamdani relève du masochisme.
Une victoire par défaut
Il y a plusieurs lectures possibles de la victoire avec 43, 5% des suffrages de cet inconnu. Toutes sont alarmantes pour le Parti démocrate, à la recherche des thèmes susceptibles de ramener vers lui un électorat écoeuré par son élitisme et son mépris de la réalité quotidienne des milieux populaires.
La première évidence est que Zohran Mamdani n’a gagné que par défaut. C’est à cette explication que se raccroche l’establishment démocrate, en particulier le milliardaire, ancien maire de New York, Mike Bloomberg et ses amis de milieux d’affaires qui ont financé largement, Andrew Cuomo, le principal opposant démocrate, qui n’a recueilli que 36, 4% des voix.
La participation a été faible et l’ancien gouverneur de l’État de New York n’a suscité absolument aucun enthousiasme. Acculé à la démission en 2021, sous le coup de multiples accusations de harcèlement sexuel, Andrew Cuomo, fils de Mario Cuomo, gouverneur de New York de 1983 à 1994, n’a pas fait une bonne campagne. Il rêvait d’un « come back » et disposait pourtant de beaucoup d’argent, grâce au soutien des riches démocrates traditionnels de la ville. Décidément, après avoir poussé Hillary Clinton, puis Joe Biden et ensuite Kamala Harris, la machine démocrate se spécialise dans la sélection de candidats « has been », aux casseroles bruyantes, mal dissimulées par un verrouillage savant des réseaux de lobbies et millionnaires donateurs, indispensables aux campagnes traditionnelles. Comment l’élite du Parti démocrate peut-elle ne pas voir à quel point elle est dépassée ?
Le socialisme, une idée nouvelle pour un électorat jeune et éduqué
Deuxième évidence : Zohran Mamdani, deux fois plus jeune que son rival, est sympathique, habile, excellent dans les débats télévisés et très séduisant pour un électorat de moins de 40 ans. Ce qu’il dit, parle à ceux qui ont grandi dans l’ère du numérique et des réseaux sociaux. Cette nouvelle génération s’est mobilisée pour lui dans les primaires. Distribution de tracts, démarchage à domicile, entretien du buzz dans les quartiers identifiés comme fertiles en électeurs potentiels, Zohran Mamdani est un brillant trotskyste, organisateur et démagogue.
Son message est calibré pour une génération relativement éduquée, dans des collèges et universités marquées à gauche. Pour ses partisans, le socialisme est une idée vraiment nouvelle, jamais sérieusement mise en pratique. Leur vision de l’avenir est obstruée par l’écrasante réalité du coût de la vie exorbitant à New York, notamment celui du logement, effrayant. Ils en concluent que le capitalisme et Wall Street sont responsables de leur malheur. Ils croient vraiment qu’en bloquant les loyers et en rendant « gratuits » de multiples services, y compris certains commerces, leur niveau de vie grimpera. « New York a toujours été une ville inégalitaire. Les ultra-riches ont toujours bien vécu, mais les pauvres y ont toujours beaucoup souffert. Ce qui est nouveau est qu’il n’y a plus de mobilité sociale. Les classes moyennes inférieures sont marginalisées et ne peuvent pas s’en sortir » nous confie Dan C., natif de Brooklyn, issu d’immigrants siciliens.
Ce n’est pas un extrémiste de gauche qui résoudra les problèmes de New-York
Le plus désespérant est que les réels problèmes décrits par Zohran Mamdani ne pourront que s’aggraver s’il est élu maire en novembre et applique son programme. Le manque de logement, les prix délirants de la main d’Å“uvre, des services et de produits alimentaires… toutes ces calamités new-yorkaises sont le fruit de réglementations « sociales ». Le contrôle des loyers décourage les propriétaires d’investir dans la rénovation et limite l’offre de logement. Les taxes locales exorbitantes et les salaires minimum sans cesse relevés, grèvent les comptes des commerçants, artisans et restaurateurs. Les régimes de protection des syndiqués font exploser les frais de personnel, le coût de la construction, de la rénovation et des travaux publics. La taxation déjà record des revenus des plus riches, fait fuir ceux qui le peuvent. Il faudrait en réalité une bonne cure de libéralisme pour guérir New York. On n’en prend pas le chemin.
Les idéologues du New York Times rêvent de voir l’Amérique devenir un pays comme la France, où le consensus socialiste avale tous les partis. Chris Cuomo, frère d’Andrew Cuomo, journaliste éconduit par CNN pour avoir défendu le gouverneur lorsqu’il était poussé à démissionner, n’a rien d’un conservateur ou d’un trumpien. Il offre une explication alarmante à l’émergence de Zohran Mamdani : « Le Parti démocrate est maintenant officiellement en mode MAGA (c’est-à dire populiste, démagogique à la Trump). Nous sommes aujourd’hui, des deux côtés, en période d’extrémisme. » Il compare l’antisémitisme de Mamdani à la xénophobie d’une partie de l’électorat de Donald Trump. Il voit, dans la rage anticapitaliste des progressistes, la même haine que l’on perçoit chez les trumpiens à l’égard de ceux qui vivotent de subsides publics de père en fils, réfractaires au travail et à l’instruction.