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Canicule et transports en commun

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En ces jours de canicule, difficile sur le petit écran ou plus largement dans les médias de ne pas voir tel ou tel membre du Gouvernement, qui dans une crèche, dans une école primaire, dans un collège, dans un lycée, dans un EHPAD ou enfin dans tel ou tel hôpital, aux urgences ou ailleurs, pour bien montrer l’importance de la mobilisation des pouvoirs publics face à la menace caniculaire. Manifestement l’échec du gouvernement Raffarin en 2003 a porté : la leçon a bien été apprise et retenue.

Curieusement quand même et pour ne prendre que l’exemple de l’Ile-de-France, le secteur des transports en commun qui concerne directement :

– plus de 4,3 millions de Franciliens détenteurs d’un » pass Navigo »
– et sans nul doute beaucoup plus, si l’on y ajoute tous ceux qui utilisent occasionnellement les transports en commun de la région avec de simples tickets ou de carnets, a visiblement échappé aussi bien à la sollicitude du Gouvernement qu’à celle des médias. Mais il est vrai que ces deux dernières CSP+ disposent souvent de commodités personnelles qui leur évitent de devoir se mêler au flux matinal et au reflux vespéral de la plèbe laborieuse. En effet, sauf erreur due peut-être à une brève et coupable rupture d’assiduité, nous n’avons pas réussi à saisir un reportage montrant un ministre épuisé par la chaleur, prodiguant à tous ses voisins ses conseils, partageant la pénibilité commune de la station debout dans un métro bondé, dans un bus surchargé aux limites de sa capacité ou encore dans un RER D dont le taux de « remplissage » insensé retarde à chaque arrêt la fermeture des portes. On sait déjà que le réseau métropolitain a le privilège de diffuser constamment l’air le plus pollué de Paris, loin au dessus des normes les plus tolérantes et on comprend que même les plus courageux de nos ministres n’aillent pas sottement exposer leur santé au risque de priver – fût ce temporairement – la Nation de leur précieux concours. Mais la vérité nous oblige à dire que même en remontant à l’air libre, on n’a pas réussi à voir le plus modeste reportage sur un Ministre suant stoïquement en partageant quelques instants le sort des autres voyageurs dans un RER C ou D où la promiscuité le dispute à l’écrasement. Même échec pour les trajets en bus, visiblement réservés à l’entassement populaire, sans le moindre filet d’air. D’ailleurs, le décompte du député Ruffin a montré que, pour beaucoup de Ministres, la vertu des transports en commun., c’était pour les autres. Manifestement, tous nos Ministres, tous nos Secrétaires d’État étaient donc ailleurs que dans les transports en commun et on croit savoir pourquoi !

En effet et malgré toute la sollicitude que ces gens-là disent porter à notre sort et tout spécialement durant les périodes de canicule, guère plus d’un tiers des métros et un peu plus de la moitié du trafic RER (lignes A en totalité et B et C en partie) bénéficient d’un dispositif non pas de véritable climatisation (pour l’instant réservée aux seuls tramways), mais de ventilation réfrigérée nettement moins efficace. Ceci veut dire que, l’été venu, un très grand nombre de wagons (notamment sur les RER C, D et E et sur beaucoup de lignes de métro) charrient leur chargement humain dans des conditions de température et d’inconfort pratiquement insupportables. Pour le réseau des bus, c’est pire encore, puisque depuis des décennies -le retour périodique des périodes caniculaires étant évidemment rigoureusement imprévisible pour la plupart des décideurs publics – la RATP a réussi le tour de force de soustraire à la climatisation 99% de son parc (5% des bus bénéficient quand même d’une ventilation réfrigérée) sans doute pour ne pas accentuer le réchauffement climatique de la capitale ! Bien sûr ces chiffres accablants n’interpellent pas le moins du monde la camarilla écologiste qui fait la pluie et le beau temps à Paris. Comme si de rien n’était, elle continue à lancer ses ukases en faveur des transports en commun, quitte à ce que lors des périodes sensibles, (canicule, grèves etc..), leur quotidien se rapproche dangereusement au fil des ans, sur certaines lignes et aux heures de pointe, des transports de bestiaux (dont les conditions s’améliorent), plutôt que de vrais voyages respectueux de la dignité et du confort de l’usager.

Ceci explique sans nul doute que, malgré tous les obstacles dressés par les ayatollahs écologistes contre la voiture, cette dernière continue à assurer plus de 43% des déplacements individuels des Franciliens, contre 20% seulement pour les transports en commun. Et qu’on ne se méprenne pas, l’exemple est ici pris de l’Ile-de-France, mais bon nombre d’habitants des plus grandes agglomérations provinciales ont autant de griefs à faire valoir. Eh, oui, pour inciter efficacement les voyageurs à emprunter les transports en commun, il ne suffit pas démagogiquement :

– de chasser des villes et comme un malpropre l’automobiliste, sans lui proposer aucune alternative crédible, dont notamment des stationnements périphériques à prix modéré et bien desservis ou d’astucieuses dessertes transversales qui n’existent pas,

– ou de baisser le tarif du billet ou du « pass » jusqu’au tiers ou au quart de son coût réel pour la collectivité.

Ceci introduit d’ailleurs une inégalité de plus entre urbains et ruraux, puisque – qu’ils le veuillent ou non- les ruraux financent largement par leurs impôts généraux et le matraquage fiscal de tout ce qui touche de près ou de loin à l’automobile des services de transports qu’on ne leur propose pas.

À ce propos il faudra bien un jour dénoncer et supprimer l’injustice flagrante qui consiste à subventionner à outrance les transports en commun dans les grandes villes, tandis qu’on matraque fiscalement ailleurs l’usage professionnel de tout véhicule dans les zones nettement moins bien
ou même pas du tout desservies.

L’habitant des grandes villes ou des banlieues immédiates ne paye le plus souvent qu’à peine le tiers du coût économique de son transport tandis que le banlieusard éloigné ou le rural, injustement assommés de taxes de toutes sortes, acquittent bien plus que le coût économique réel de leur déplacement.

Non, il faut encore réussir à attirer l’usager par un réseau bien dessiné, pertinent et efficace et lui offrir des conditions de ponctualité, d’espace et de confort qui sont actuellement très loin d’être réunies. Et au lieu de

– concentrer comme aujourd’hui l’essentiel de leur réflexion sur les moyens de sanctionner, de rançonner et de chasser l’automobiliste,
– reporter sans cesse les travaux et les investissements indispensables à des transports collectifs modernes et avenants et à leur juste maintenance,
– déplorer les uns après les autres, les dysfonctionnements, les pannes et les accidents qui s’accumulent,

nos dirigeants seraient sans doute infiniment mieux inspirés de rechercher dés maintenant les moyens d’offrir rapidement à plusieurs millions de nos compatriotes le transport en commun de demain attractif, sûr, propre, confortable et ponctuel qu’ils attendent depuis des lustres.

Car dans le domaine des transports collectifs, particulièrement en Ile-de-France avec le trop long règne de l’ineffable Président Huchon, la canicule vient aujourd’hui souligner ce que les Français reprochent le plus à leurs politiques : le divorce croissant entre leurs paroles et leurs actes. Des gens qui parlent et gesticulent beaucoup, qui communiquent à satiété, mais qui, depuis plusieurs décennies et à l’exception de quelques régions plus clairvoyantes, ont laissé dangereusement se dégrader les conditions déjà précaires des transports collectifs de tous ces millions de Français qui n’ont pas l’insigne privilège de pouvoir se rendre sur leur lieu de travail à pied ou en vélo ou en empruntant les lignes les plus modernes. Imaginons un instant, Madame Hidalgo, qu’on donne aux usagers le droit de décerner à leurs transports en commun des macarons « REP’AIR » répartis en 5 classes (vert : confortable, jaune : convenable, orange: acceptable, rouge: médiocre et noir: détestable) dont seules les trois premières seraient admises au service : combien de RER, combien de métros, combien de bus continueraient à circuler dans les trois premières catégories? Il est vrai qu’il est infiniment plus facile d’aboyer, comme le font les Verts à Paris, contre l’automobile, de fustiger sans cesse davantage l’automobiliste haï et de compliquer chaque jour un peu plus la circulation urbaine que de concevoir, de financer, de mettre en place et de faire correctement fonctionner les réseaux de transports en commun couvrants et performants, qui font toujours cruellement défaut. Et si le secteur public persiste encore dans l’interminable démonstration de son incapacité et de son impéritie, il faudra bien songer un jour à demander au secteur privé, qui assure déjà ici ou là de nombreuses dessertes locales, de démontrer son savoir-faire.

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