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Qu’est-ce qu’un ministre français présentable ?

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La polémique assez dérisoire autour des propos de la nouvelle ministre de l’Education nationale le 12 janvier dernier est révélatrice des idées véhiculées dans notre pays par la plupart de nos médias et de nos faiseurs d’opinion. La pauvre Amélie Oudéa-Castéra n’a sans doute pas compris tout d’abord qu’être ministre exigeait souvent de faire preuve de rouerie et de malhonnêteté intellectuelle. Ensuite et surtout, la doxa veut que pour être ministre de l’Education nationale, il faille être passé par le secteur public et y avoir (eu) ses enfants inscrits. Mais à vrai dire cela concerne tous les membres du gouvernement, quel que soit leur département. Il est en effet inadmissible d’avoir fait sa scolarité dans le secteur privé, réceptacle par définition des nantis. Toutefois, cela ne suffit pas pour être un ministre présentable.

Vive le secteur public !

Etre un ministre présentable, c’est être issu des catégories socioprofessionnelles les moins élevées et, si possible, de la « classe ouvrière ». Tout cela spécialement lorsqu’une grève est lancée ou perdure dans le secteur public au détriment de la majeure partie des Français. Il est alors de bon ton de déclarer que l’on comprend la légitime colère des « exploités » car on vient du même milieu.

Il est aussi recommandé de témoigner sa sollicitude envers les fonctionnaires lorsqu’une catastrophe s’abat sur le pays et qu’une administration ou une entreprise publique se trouve en première ligne. Ainsi en a-t-il été longtemps pour EDF, GDF, la RATP, la SNCF, etc. Compter dans sa famille proche un cheminot ou un gazier est vu comme une preuve de solidarité exemplaire avec ceux qui travaillent dans l’intérêt général.

Lors de la crise sanitaire, la bienveillance envers les soignants de « première ligne » était de mise et il était utile pour un ministre d’avoir exercé lui-même à l’hôpital public ou d’y avoir fait un stage, à une tâche modeste si possible, ou d’avoir de la famille plus ou moins proche versée dans cette activité.

Résumons : un ministre présentable dans la France contemporaine a des parents pauvres ou petits fonctionnaires, a passé sa scolarité à l’école publique et scolarise évidemment ses enfants dans le secteur public.

On plaint l’homme politique actuel dont les parents auraient réussi et qui auraient comme tels enrichi le pays. On plaint celui qui aurait suivi ses études primaires ou secondaires dans une école privée, fût-elle modeste, avant de réussir de brillantes études à l’étranger dans une université privée…

Ajoutons que réussir sa vie professionnelle dans le secteur privé avant de se lancer en politique apparaît aussi problématique. Ne parlons pas des millionnaires (encore moins des milliardaires) qui n’ont à peu près aucune chance d’être élus et dont la simple candidature serait anathématisée.

En revanche, être issu de la haute fonction publique, comme une grande partie de la crème de nos hommes politiques, percevoir ainsi des rémunérations plus ou moins confortables, parfois inconnues dans le secteur privé, tout cela est parfaitement acceptable. Car, comme l’écrivait Jean-François Revel dans un article de la revue Commentaire de 1989 consacré à « la gauche et l’argent », en France l’argent a une odeur, mais seulement dans le secteur privé : les Français cultivent trop souvent une haine de l’argent d’autrui gagné par l’activité économique, mais ils épargnent l’argent qui provient des sinécures octroyées par l’État !

Les réformes suggérées

Au-delà de ce constat, quelles solutions seraient concevables pour mettre fin à cet « entre-soi » du secteur public et à cette doxa de nos médias ? A vrai dire, elles sont assez simples, mas encore faudrait-il avoir le courage de les mener. Nous nous proposons de les classer en trois séries.

Pour ce qui concerne les médias, il conviendrait de briser la toute-puissance de l’audiovisuel public. Privatisations et libéralisation des médias permettraient à la concurrence de jouer enfin. C’est ce que les Américains appellent plus généralement le libre marché des idées.

Pour ce qui concerne les hommes politiques, il conviendrait non pas seulement d’interdire aux membres du secteur public élus de démissionner de la fonction publique, mais carrément d’interdire à tout fonctionnaire de se déclarer candidat, même au niveau municipal. Autrement dit, sur l’exemple britannique pour certains de ses membres, tout fonctionnaire qui voudrait se lancer dans une carrière politique serait dans l’obligation préalable de démissionner.

Enfin, et l’IREF recommande depuis longtemps ces mesures, il faudrait aussi libéraliser l’éducation, du niveau primaire au niveau supérieur.

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7 commentaires

Filouthai 17 janvier 2024 - 8:18

Désolé de vous contredire, mais débuter son poste en faisant comprendre aux journalistes (et aux autres) que le personnel de l’Education Nationale qu’elle aura à gérer est un ramassis de fainéants n’est pas la déclaration la plus intelligente à faire …. (Pour employer des mots peu susceptibles d’être censurés) !

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Oncpicsou 21 janvier 2024 - 9:09

Avez vous vu le reportage « Au bord du naufrage « ? Cela vous rendrait plus modeste dans vos affirmations…

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Roven 17 janvier 2024 - 8:52

Il faudrait aussi que M. Macron nomme des pointures et non des secrétaires, telle la ministre de l’éducation qui visiblement n’a pas la carrure, aussi bien quant à la personnalité que sur le sens politique, chacun son métier !

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henriB 17 janvier 2024 - 2:52

De là à institutionaliser carrément le « métier » d’homme ou femme politique, il y a un pas qui ne me semble pas opportun de franchir.

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Erik 17 janvier 2024 - 10:41

C’est déjà un métier, bien payé, pas trop fatigant. Les « zélus » sont nos salariés, et même s’ils font mal leur travail on ne peut pas les congédier, pas de période d’essai.

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AlainD 20 janvier 2024 - 1:57

J’ajouterai que nombre de nos hauts fonctionnaires ont toute latitude pour quitter provisoirement leur corps administratif pour aller pantoufler dans le privé puis reprendre tranquillement sa place dans l’administration comme si de rien n’était. Je trouve ce privilège parfaitement exorbitant et il ne devrait pas exister dans une république exemplaire. Quant à nos ministres, je ne citerai le copinage que pour la forme mais E. Macron est un fervent adepte.

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ELYE 21 janvier 2024 - 10:24

Le copinage a toujours existé, mais Macron a outrepassé les limites, c’est peut-être dans ce domaine qu’il se promettait d’être exemplaire !

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