L’indigence de la culture économique en France résumée en un sondage : d’après l’enquête Odoxa-Aviva pour Challenges et BFM Business, 34 % des personnes interrogées estiment qu’il ne faudrait pas rembourser la dette contractée par l’État pendant la pandémie de Covid-19 ; 39 % des Français estiment qu’il faudrait la rembourser pour « une bonne partie avec une contribution exceptionnelle des grandes fortunes » ; 73 % suggérant de faire et l’un et l’autre…
Victor Fouquet
« L’État français se finance désormais autant par l’endettement que par l’impôt »
Cette phrase est tirée du tome 1 du rapport général de la commission des finances du Sénat sur l’analyse des principaux équilibres (ou plutôt déséquilibres…) du projet de loi de finances pour 2021. Elle résume à elle seule l’étendue de la menace que fait peser sur nos têtes d’épargnants et de contribuables la dégradation fulgurante de nos finances publiques. Sur la seule année 2020, la dette de l’État devrait ainsi croître de 11,4 % après avoir dépassé au mois d’août, pour la première fois de son histoire, le seuil des 2 000 milliards d’euros. À titre de comparaison, l’encours de la dette de l’État était à peine supérieur à 1 000 milliards d’euros à la fin de l’année 2008, à la veille de la crise des subprimes.
Finances publiques : les dépenses nettes du budget général sont 2,2 fois supérieures aux recettes nettes
En cours d’examen au Parlement, le troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR) prévoit un déficit budgétaire tristement historique de 222,1 milliards d’euros (et même de 224,4 milliards d’euros dans la version du texte adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale et déposée au Sénat), soit une aggravation de 131,3 milliards d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2020. Fait éloquent : les dépenses nettes du budget général y sont 2,2 fois supérieures aux recettes nettes.
C’est peu dire que le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2019, examiné le 10 juin par l’Assemblée nationale avant de l’être par le Sénat le 8 juillet prochain, apparaît en complet décalage avec l’ampleur alarmante des chiffres du troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR 3), qui a vocation à être définitivement adopté à la fin du mois de juillet. Ainsi, le déficit public, qui s’élevait à 3 % du PIB à la fin de l’année 2019, devrait s’établir à 11,4 % fin 2020 selon le PLFR 3. L’endettement public, qui s’élevait à 98,1 % du PIB en 2019, devrait dépasser les 120 % à l’issue de l’année 2020. Quant aux recettes fiscales, si elles étaient en 2019 supérieures aux prévisions initiales, elles devraient cette année leur être inférieures d’environ 65 milliards d’euros.
Fiscalité locale : faire confiance aux élus locaux et les rendre responsables !
• La suppression partielle (pour 80 % des contribuables en 2020) puis totale (pour la totalité d’ici à 2023) de la taxe d’habitation sur la résidence principale et le schéma de financement « descendant » mis en place pour la compenser renforcent le contrôle de l’État sur la fiscalité et les finances locales, au détriment du principe de subsidiarité, de la responsabilisation des élus et de la bonne gestion des deniers publics locaux.
• L’IREF propose de redéfinir la notion d’autonomie financière locale inscrite à l’article 72-2 de la Constitution et précisée par voie organique dans le code général des collectivités territoriales (CGCT), en soustrayant du périmètre des « ressources propres » utilisé pour établir le ratio d’autonomie, les ressources dépourvues de tout contrôle local (telles que les fractions de produit national transférées et les compensations accordées au titre des dégrèvements)
TVA réduite sur les « produits de première nécessité » : une prétention illusoire
Anticipant la présentation en Conseil des ministres du troisième projet de loi de finances rectificatives pour 2020, le parti Les Républicains a dévoilé début juin, dans un document d’une petite quinzaine de pages, le « plan de relance » que ses parlementaires devraient traduire par voie d’amendements au cours de la navette budgétaire à venir à l’Assemblée nationale puis au Sénat. S’il n’est pas question d’analyser ici l’ensemble des mesures qu’il contient, arrêtons-nous au moins sur l’une d’entre elles, qui plus que toutes les autres trahit une vision cruellement paternaliste et pour ainsi dire indigente de l’économie.
« Je pense que le vrai combat, il n’est pas sur l’ISF, ça c’est le combat du XXe siècle. Le vrai combat, qui est autrement plus difficile à livrer, c’est de…
Le pis-aller de la défiscalisation des heures supplémentaires et la perversité de l’impôt progressif
La seconde loi de finances rectificative pour 2020 du 25 avril 2020 a porté de 5 000 euros à 7 500 euros le plafond d’exonération d’impôt sur le revenu des rémunérations dues au titre des heures supplémentaires et complémentaires effectuées entre le début du confinement et la fin de la période d’urgence sanitaire. On comprend aisément la raison de cette mesure, qui vient s’ajouter à l’exonération des primes exceptionnelles versées aux salariés du secteur privé et aux agents des administrations publiques : soutenir financièrement l’ensemble des contribuables mobilisés dans les secteurs de la santé, de la grande distribution ou encore des transports, afin d’assurer malgré la pandémie de Covid-19 la fourniture de biens et de services vitaux pour chacun d’entre nous.
Derrière le Covid-19, le spectre d’un front fiscal uni contre les « riches » ?
Les hostilités n’auront pas tardé à être déclenchées. Le concours Lépine de la fiscalité fut (re)lancé dès l’examen, à l’Assemblée nationale puis au Sénat, du projet de loi de finances rectificative pour 2020, présenté par le Gouvernement pour traduire dans le budget de l’État les 45 milliards d’euros du plan de sauvetage et les 300 milliards d’euros de prêts garantis (et qui, vu l’ampleur de la crise financière qu’annonce la crise sanitaire en cours, devrait être suivi de plusieurs autres « collectifs budgétaires » d’ici la fin de l’année). Avec, dans chacune des assemblées parlementaires, les deux mêmes propositions d’amendements issus d’élus communistes et « Insoumis ».
Le débat fiscal interroge périodiquement la légitimité de l’héritage, partant celle des droits de succession. La complainte est connue : l’héritage est nuisible puisqu’il favorise les inégalités de fortune. Après quoi on réclame une augmentation de l’impôt sur les successions, quand ce n’est pas la confiscation pure et dure de l’héritage. Début 2019, le think tank Terra Nova plaidait ainsi pour une augmentation de 25 % du rendement de la fiscalité des successions. Rappelons pourtant que le poids des droits de mutation à titre gratuit (successions et donations) dans la richesse nationale a déjà triplé depuis 1965, pour atteindre en France désormais 0,6 % du PIB, contre 0,14 % en moyenne dans les pays de l’OCDE. Rappelons surtout que, d’un strict point de vue éthique, rien ne justifie le coup porté aux droits de propriété du défunt, puni post mortem pour avoir accumulé patiemment un capital en vue de le transmettre aux générations futures.