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La tromperie démagogique de « l’impôt participatif » d’Attal

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Dans son « pacte d’action pour les Français », envoyé le 12 août aux chefs de partis parlementaires, Gabriel Attal formule des propositions pour définir un projet de gouvernement de coalition et de compromis.  Il espère ainsi rallier les parlementaires, des socialistes à la droite LR, autour de six axes d’une banalité atterrante : « défendre nos valeurs et institutions » ; « pouvoir d’achat, travail et logement » ; « préserver notre planète » ; « plus d’autorité et plus de sécurité » ; « des services publics plus forts » et « plus de souveraineté » « en investissant dans l’avenir ». Quelques mesures concrètes y sont associées : la proposition d’organiser un référendum chaque année, des quotas d’infirmière par malade dans les services hospitaliers, la mise en place d’une « stratégie PISA 2030 » destinée à « élever » le niveau des élèves…

L’illusion de l’impôt participatif

Et puis il évoque la mise en place d’un « impôt participatif » pour que chaque contribuable ait la « possibilité de flécher une partie de son impôt sur le revenu ou une contribution additionnelle sur une mission du budget de l’Etat librement choisie ». Il s’agirait de permettre à chaque contribuable d’affecter une partie de ses impôts sur le revenu à une ou plusieurs dépenses publiques. L’idée est de favoriser l’adhésion des Français à l’impôt en leur donnant l’impression qu’ils sont responsables du budget public.

Mais ça resterait une impression, car dans le projet envisagé, on comprend qu’à la fin, le budget resterait le budget. Les sommes affectées à l’environnement, l’éducation, la sécurité… n’augmenteraient pas les crédits des politiques publiques ciblées par les contribuables qui n’auraient que l’illusion d’avoir influencé les décisions gouvernementales.

Un mécanisme d’affectation existe en Italie : le « huit pour mille » (créé en 1984) et le « cinq pour mille » (créé en 2005), qui permettent aux contribuables d’assigner une partie de leurs impôts à des organisations religieuses et à des associations à but non lucratif. Des propositions ont été faites en ce sens en France tant à gauche qu’à droite. En 2023, André Urban, ancien membre du bureau national du Parti socialiste, et Christine Pirès Beaune, députée socialiste du Puy-de-Dôme, avaient déposé un amendement, rejeté, pour que les contribuables puissent affecter 5% de leurs impôts à des organismes de leur choix. Philippe Juvin l’avait suggéré lors de sa campagne de la primaire LR de 2021. Il avait souligné que ce mécanisme pourrait servir de baromètre des contribuables : « Imaginez que tout le monde veuille financer une action A, personne une action B. Quelle sera la légitimité de l’action B ? »  Mais la décision budgétaire reste au Parlement.

Des dangers de la démagogie

L’idée va plus loin avec les suggestions de l’allemand Peter Sloterdijk d’un impôt volontaire dans son livre Repenser l’impôt, Pour une éthique du don démocratique (Libella/Maren Sell, 2012). L’impôt ne serait plus un prélèvement forcé de l’État, mais un don que les citoyens choisiraient librement de faire à la communauté. Il voudrait modifier les bases de l’économie pour qu’y préside le don plutôt que l’échange de l’homo œconomicus de façon à libérer les rapports moraux et psychiques. Cette réforme qui pourrait être appliquée progressivement créerait selon lui un cercle vertueux éveillant les consciences aux besoins collectifs, reconnectant les citoyens et les institutions et favorisant la participation à la vie démocratique.

Le problème est que ça ne marche pas. En 1789, Necker souhaita que la « contribution patriotique » des révolutionnaires soit versée à titre volontaire, mais son rendement fut si médiocre qu’il fallut la rendre obligatoire dès l’année suivante. Aux Etats-Unis, le Bureau of the Fiscal Service accepte les dons consentis au gouvernement pour réduire la dette publique. Mais les rendements sont insignifiants : 180 310,32 US$ en 2022!

Eric Ciotti a sans doute eu raison d’observer sur X (ex-Twitter) que « Le but caché de l’impôt participatif de Gabriel Attal c’est une augmentation déguisée des impôts ! ». Plutôt qu’un impôt participatif, mieux vaut moins d’impôt, ce qui suppose moins de dépenses publiques. D’ailleurs, en France chacun peut déjà, d’une certaine manière, payer une partie de ses impôts en en déduisant les dons aux organismes à but non lucratif. N’allons pas réinventer la roue qui tourne déjà.

Il faut se méfier des initiatives démagogiques des politiques. Elles n’ont généralement pour but que de les servir eux-mêmes. Gabriel Attal voudrait-il que les dons aux organismes sans but lucratif soient ainsi d’abord versés à l’Etat qui les contrôleraient avant de les reverser éventuellement aux organisations désignées ? Il en serait capable. Ce serait dans la logique de l’Etat macronien qui ne conçoit le libéralisme que construit et dirigé par l’Etat. Méfions-nous de ces initiatives gadgets qui peuvent devenir des objets nuisibles entre les mains des politiques.

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