Après avoir servi l’administration américaine à la tête du Conseil d’analyse économique du président Clinton (Council of economic advisors, 1995 à 1997), l’économiste Joseph Stiglitz poursuivit sa carrière d’économiste-conseil auprès d’institutions comme la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI). Ces fonctions lui ont permis de parcourir le monde pendant de nombreuses années ; et de cultiver sa notoriété un peu partout, comme conférencier ou comme professeur-invité ; ainsi que de conseiller des gouvernements. Distingué par le Nobel d’économie en 2001, le président Sarkozy lui déroula le tapis rouge en 2008 à Paris, pour animer une commission dédiée au climat. à plus de 80 ans, il enseigne encore à l’université new-yorkaise de Columbia.
Joseph Stiglitz fut manifestement irrité par la notoriété durable du livre Road to Serfdom[1] dont il critique souvent et vivement l’auteur, Friedrich Hayek. Faussement malin, le titre du présent livre, son quinzième essai à ma connaissance, n’est pas donc pas un hommage à Hayek ; il est simplement ironique!
Organisation du livre[2]
Dès ses premières pages, Stiglitz souligne que, selon des lanceurs d’alerte, en seize ans (2006 à 2022), l’indice des libertés aurait baissé dans le monde : 80% de la population mondiale souffrirait d’un régime autoritaire ; et en Amérique, vrai sujet du livre, le penchant autoritaire de Trump est patent ; alors qu’au sein de l’Union européenne, par principe attachée à la liberté, la république hongroise s’affirme illibérale, un qualificatif vague, brandi comme un chiffon rouge ! Friedrich Hayek et Milton Friedman ont, selon l’auteur, gravement péché ; et si d’autres libéraux, comme le Président Ronald Reagan, ont favorisé des marchés libres, ce n’était ni pour la liberté ni pour leurs peuples ; mais pour préparer – peut-être sans le savoir ni le vouloir – un avatar du fascisme qui pourrait marquer le XXI° siècle (sic, p. 290) !
Rédigée par l’auteur lui-même, l’assez longue préface (14 pages numérotées en chiffres romains) s’ouvre sur une citation du philosophe britannique Isaiah Berlin à qui Stiglitz emprunte une formule, sortie de son contexte, qui n’est qu’une caricature du libéralisme[3] : « la liberté des loups entraîne souvent la mort des moutons » ! Ces mots empruntés donnent le ton du livre qui décline de nombreux lieux communs d’inspiration keynésienne, sur près de 300 pages.
Les deux chapitres introductifs (Chap. 1 & 2) enfoncent déjà le clou : dans ses campagnes présidentielles, F-D. Roosevelt avait fixé deux objectifs politiques aux États-Unis : freedom from want (sortez du besoin) et freedom from fear (n’ayez plus peur)[4] ; ces deux règles impliquaient des actes politiques ; elles imposèrent à l’État-providence de répondre aux besoins qu’expriment les bénéficiaires des « droits à  » que leur avait promis la puissance publique, sous la forme de prestations ou de services, gratuits ou presque, profitant à tous ceux qui sont censés être dans le besoin (logement, école, soins médicaux, etc.). Définis et garantis par l’État fédéral, ces droits sociaux consomment d’importants budgets sociaux.
L’essai comprend ensuite trois parties.
2 commentaires
Conseiller de Clinton, cela veut tout dire, celui qui a provoqué la crise de 2008 dont forcément Stiglitz est responsable puisque consultant.
“La Route de la servitude” d’Hayek m’a ouvert au libéralisme. Et je me suis rendu compte du monceau de mensonges que j’avais lu dans la presse social-démocrate dans ma prime jeunesse. Plus tard j’ai lu de nombreux économistes, dont Frédéric Bastiat qui reste pour moi le meilleur pédagogue du libéralisme. Je pense qu’il serait de salubrité publique de republier les pamphlets de Bastiat in extenso dans les journaux actuels… Tout y est si bien expliqué, dans une langue si simple et limpide accessible au grand public, que ce serait un véritable roulement de tonnerre.