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Finances publiques : les dépenses nettes du budget général sont 2,2 fois supérieures aux recettes nettes

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En cours d’examen au Parlement, le troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR) prévoit un déficit budgétaire tristement historique de 222,1 milliards d’euros (et même de 224,4 milliards d’euros dans la version du texte adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale et déposée au Sénat), soit une aggravation de 131,3 milliards d’euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2020. Fait éloquent : les dépenses nettes du budget général y sont 2,2 fois supérieures aux recettes nettes.

On peine à comprendre la logique qui préside à la multiplication des plans sectoriels

À titre de comparaison, le déficit budgétaire de l’État dépasse de plus de 75 milliards d’euros le niveau de déficit atteint lors de la crise financière de 2009-2010, lequel constituait déjà un record. L’ampleur du déficit est d’autant plus inquiétante que ce déficit vient s’ajouter à un stock de dette existante, c’est-à-dire à une longue suite de déficits incontrôlés, eux-mêmes très importants. Le besoin de financement de l’État atteint en 2020 désormais 363,5 milliards d’euros (224,2 milliards d’euros au titre du déficit et 136,2 milliards d’euros au titre de l’amortissement de la dette à moyen et long termes), un montant supérieur de près de 120 milliards d’euros à celui, déjà exceptionnel, atteint lors de la crise de 2009-2010.

En attendant le « plan de relance », lequel pourrait faire l’objet d’un quatrième PLFR (succession là aussi inédite dans notre histoire budgétaire) ou être intégré au projet de loi de finances pour 2021, l’hétérogénéité du troisième budget rectificatif interroge. S’y mêlent saupoudrage budgétaire et planification catégorielle. Le PLFR 3 ouvre ainsi des crédits supplémentaires dans pas moins de dix-sept missions du budget général de l’État, là où les deux premiers PFLR ne couvraient qu’un faible éventail de politiques publiques. Parmi celles-ci, la mission « Plan d’urgence pour la crise sanitaire » (52,8 milliards d’euros), créée spécialement au titre de la lutte contre la pandémie, devient à cette occasion la deuxième mission du budget de l’État, derrière la mission « Enseignement scolaire » (74,1 milliards d’euros) et avant la mission « Défense » (46,1 milliards d’euros).

Surtout, on peine à comprendre la logique qui préside à la multiplication des plans sectoriels. Ils apparaissent nécessairement arbitraires, eu égard à la situation en réalité très disparate entre les entreprises d’un même secteur. Ils encouragent de surcroît chaque secteur à se manifester à son tour pour réclamer tous azimuts sa part du butin. Ce faisant, ils ne peuvent que susciter la désillusion de ceux dont les revendications ne seront pas satisfaites. Il aurait mieux fallu s’en tenir au critère le plus neutre et le plus objectif possible, à savoir la perte de chiffre d’affaires ou de marge nette sur une période donnée.

Le Gouvernement a ainsi annoncé des plans de soutien au secteur automobile (8 milliards d’euros), au secteur de l’aéronautique (15 milliards d’euros), au secteur du tourisme (18 milliards d’euros), au secteur des médias et de la culture (434,4 millions d’euros), ainsi encore qu’au secteur des nouvelles technologies (30 millions d’euros de crédits budgétaires nouveaux et 150 millions d’euros de crédits redéployés). Pour l’heure, toutefois, plus de 90 % des quelque 40 milliards des plans sectoriels sont reportés sur les années 2021 et suivantes. Ce qui laisse craindre un impact pléthorique de ces différents plans sur le budget de l’État dans les années à venir, indépendamment donc des mesures nouvelles qui pourraient à l’automne prochain être engagées au titre de ladite relance.

Malgré un rebond de la croissance, le PIB français resterait de près de 4 points au niveau de 2019

Tout se passe comme si la nécessité de la dépense publique devait être établie indépendamment des capacités du pays à la financer – ou, pire, comme si elle n’avait pas à être établie du tout. Prenons l’exemple dans ce PLFR 3 de l’aide à la restructuration de Presstalis, à hauteur de 100 millions d’euros, engagée au titre du soutien aux secteurs des médias et de la culture. La crise sanitaire n’a fait qu’accroître les difficultés financières préalablement substantielles d’une société commerciale en réalité minée tout à la fois par l’attitude en son sein de certains syndicats, la mauvaise gestion de son activité, le nombre trop élevé de salariés et de dépôts, les notes de frais exorbitantes de ses anciens dirigeants et l’organisation archaïque de son service. Pourquoi l’État, et à travers lui tôt ou tard le contribuable, devrait-il supporter le coût de cette incurie pour la énième fois puisque les plans de redressement de cette société se succèdent à marche forcée ? La pratique durable de déficits budgétaires colossaux présente un autre danger : dès lors qu’elle peut être financée par le déficit et la dette, la dépense publique n’entretient plus avec l’impôt de lien mécanique, ce qui a pour effet pervers d’affranchir les décideurs publics de la contrainte fiscale et finalement de toute responsabilité à l’égard des générations présentes et futures…

La France cumule les handicaps, lesquels s’imbriquent les uns dans les autres. À la situation extrêmement dégradée des comptes publics s’ajoute ainsi, avec un recul du PIB évalué par l’OCDE à – 11,4 % au terme de l’année 2020, la pire récession économique depuis 1944 (- 15,5 %). De façon peu surprenante, un rapide coup d’œil sur les différences de performances économiques montre que celles-ci sont directement corrélées à l’intensité du confinement mis en place dans les différents pays. Dans son rapport sur le PLFR 3, Albéric de Montgolfier, sénateur LR d’Eure-et-Loir et rapporteur général de la commission des finances du Sénat, observe à cet égard que « l’intensité et la durée des mesures de confinement mises en place en France laissent à penser que notre pays devrait figurer parmi les plus affectés économiquement par la crise sanitaire ». L’indice de restriction de l’Université d’Oxford (ou Oxford Stringency Index), dont l’objet est de mesurer sur une échelle comprise entre 0 et 100 et de comparer le degré de sévérité des mesures de confinement national, met d’ailleurs en exergue la rigueur du confinement français par comparaison à d’autres pays ayant fait le choix de mesures plus souples, tels l’Allemagne, ou ayant refusé de confiner, tels la Suède. Il s’en suit que l’écart de (dé)croissance avec les pays les moins touchés, tels que justement l’Allemagne (- 6,6 % du PIB) et la Suède (- 6,7 % du PIB), atteindrait presque 5 points de PIB.

Qu’espérer à court terme ? Malgré un rebond rapide de la croissance, désormais attendue par le Gouvernement à + 8 % en 2021, le PIB français resterait à l’issue de l’année prochaine inférieur de près de 4 points au niveau de 2019 et de plus de 6 points au niveau anticipé avant la crise de la Covid-19. Assurément, le réveil sera long, et longtemps douloureux.

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1 commenter

zelectron 21 juillet 2020 - 12:34

ils sont toujours cinglés !
Ce parlement agissant en toute connaissance de cause commet la plus ignoble forfaiture sur le dos des citoyens français qui l'ont élu.

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