Dans la Rome du Ier siècle, l’empereur Domitien, toujours plus avide de puissance et de richesses, est vite rattrapé par la perversité et la tyrannie. Dès les premières pages on découvre Publius, alias Tacite, la peur au ventre. Il se culpabilise d’avoir donné son feu vert à la plaidoirie de Senecio et Pline, avocats responsables de la condamnation de Messa, gouverneur qui spolia la Batique, mais favori de l’empereur. La panique l’assaille.
Comment accomplir sa tâche sans assombrir l’image du « maître et dieu » de l’Empire ? Est-ce un crime de lèse-majesté de confier au Sénat le contrôle des finances publiques ? Que penser de Régulus, délateur arriviste ou accusateur soucieux de protéger les lois ? Comment oser rire des satires parodiques de Pétrone? Comment ne pas se méfier de Norbanus, préfet plébéien, intime de Domitien, toujours en quête de proies, surtout quand elles sont d’origine aristocratique ?
La lâcheté est partout, jusqu’au cœur de la Curie quand les légionnaires s’emparent d’Orfitus pour son arrogance et de Senecio pour sa vanité d’auteur. Mais la liste ne fait que commencer…Y aurait-il deux Publius, l’homme d’influence et le verbeux, comme il y a deux Domitien, le faible et le fou? Heureusement l’audacieuse Lucretia, jeune épouse de Publius et fille du général Agricola, transcende ce monde de crimes et faux-semblants. Elle fait partie des héros qui ne craignent ni le tyran ni la mort, franchit les bas-quartiers de Rome comme les portes de la résidence impériale. Elle ne pense qu’à la réputation à venir de l’Empire, à l’affranchissement de ses esclaves, et comme Hédi Kaddour, elle s’en remet à l’écriture de Tacite pour pérenniser la dignité d’une poignée de Romains. Par ses métaphores poétiques l’auteur tente en vain d’adoucir la nature pernicieuse des hommes. Le style est vivant, riche en leçons politiques. Hédi Kaddour fait renaître à merveille l’éternel dilemme qui tourmenta Tacite : la liberté ou la mort !
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