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Le soutien public au véhicule électrique : un gouffre pour l’État qui intervient sur un secteur automobile malade

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Les subventions à l’achat d’un véhicule électrique, sous des formes diverses et variées, sont coûteuses pour le contribuable et mettent en danger un secteur automobile tricolore en pleine déliquescence. Plutôt que de desserrer les contraintes sur les constructeurs et leur laisser le temps de mettre au point des technologies qui seraient à même de faire baisser le prix des voitures propres, l’État a préféré opter pour une solution digne d’une économie administrée.

Votée par le Parlement européen l’année dernière, l’interdiction de la vente de véhicules thermiques fait l’objet de l’opposition de la part d’une Allemagne.  Cette interdiction a d’ailleurs été vertement critiquée lors des dernières élections européennes par de nombreux partis à la droite de l’échiquier politique.

La Cour des comptes européenne avait également sévèrement étrillé la mesure, notamment au vu de notre dépendance aux terres rares importées et à la faible part de batteries produites sur le sol européen (10 % contre 76 % en Chine).

Même si, après de nombreux atermoiements, l’interdiction a été adoptée, rien ne dit qu’elle sera appliquée à la date prévue, l’option d’un report aux calendes grecques semblant être la plus probable.

La France a néanmoins, depuis de nombreuses années, mis en œuvre une série de mesures destinées à subventionner l’achat de véhicules électriques et engagé des investissements publics massifs dans la construction d’infrastructures adéquates, comme les bornes de rechargement électriques. Une volonté certes louable d’améliorer la qualité de l’air mais hélas déconnectée de la situation financière d’un pays dont le déficit a atteint près de 150 Mds€ cette année.

Un système de fonctionnement pensé en dépit de la rationalité du marché

Dans un rapport publié en novembre 2022, France Stratégie notait que malgré un soutien public massif, la part de véhicules électriques vendus ne dépassait pas 10 % au sein du marché automobile, un chiffre qui a augmenté à 17 % l’année dernière mais qui demeure très loin des 100 % attendus en 2035. En février 2024, le bonus à l’achat d’une voiture propre, électrique ou hydrogène, a été réduit de 6 000€ à 4 000€ mais a été augmenté à 7 000€ pour les ménages les plus modestes des cinq premiers déciles de revenus qui peuvent également encore bénéficier de la prime à la conversion d’un véhicule ancien vers une voiture propre alors qu’elle a été supprimée pour les autres.

Après application de la réforme, le surcoût de 16 000€ pour l’achat d’une voiture de type « citadine » n’est plus compensé qu’à 27 % pour les ménages supérieurs, 36 % pour les ménages intermédiaires, 54 % pour les ménages modestes et 76 % pour les ménages très modestes. En tenant compte du calcul effectué sur les économies liées à l’achat de carburant, et quoique cette donnée soit très volatile eu égard à l’augmentation rapide du prix de l’électricité, elle aussi très taxée, la durée d’amortissement d’un véhicule électrique est de neuf ans pour un ménage intermédiaire et de trois ans pour un ménage modeste ainsi que le détaille le graphique suivant tiré d’un autre rapport de France Stratégie, publié au mois de juin:

Seuls les ménages modestes, qui ne constituaient que 15 à 20% des acheteurs de voitures à moteur non thermique avant la réforme, ont donc rationnellement intérêt à acheter des véhicules subventionnés. Le système de bonus/malus en lui-même aurait contribué pour 0,9 point à la croissance du marché de l’électrique[1] en 2019 et 3,9 en 2021.

Pour les finances publiques, le coût des dispositifs d’aide devrait enfler de manière exponentielle et atteindre, dans le scénario où l’objectif de 100 % de véhicules électriques serait effectif dès 2035, 8 Mds€ par an.

La production automobile française a atteint son plus bas niveau depuis 1962

En 2023, la production d’automobiles en France s’est élevée à 1,5 million d’unités, loin derrière l’Allemagne (4 millions) et même l’Espagne (2,4 millions) alors qu’elle en produisait encore 3,5 millions en 2005. Pénalisés par d’importants coûts du travail et une fiscalité confiscatoire, les petits modèles des marques françaises, qui ont d’ailleurs connu un certain succès à l’export, ont été délocalisés dans des pays où la main d’œuvre est bon marché.

Notre système de bonus favorisait essentiellement les voitures chinoises, seules la Zoé et la Mégane de chez Renault étant fabriquées en France. Un “score environnemental” a donc été introduit en catastrophe, tenant compte du  bilan carbone lié au transport. Selon l’Institut des politiques publiques, le bonus/malus automobile n’aurait donc contribué, en 2022, qu’à 0,7 point d’augmentation des parts de marché de véhicules électriques assemblés en France.

En 2024, plusieurs pays ont mis fin aux subventions à l’achat des voitures disposant d’un moteur autre que thermique, comme l’Allemagne, la Croatie ou la Finlande et d’autres, comme la Roumanie ou l’Espagne, les ont réduites. Il est donc grand temps de les supprimer et de favoriser un choc d’innovation qui permettrait de construire une voiture électrique bon marché accessible à tous et compétitive à l’international.


[1] Dont le taux atteignait 1,9 et 9,8 % ces deux années.

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