Fonctionnaire n’est pas une situation enviable. La preuve en est que les agents publics peuplent les défilés protestataires et constituent le gros des troupes syndicales. Ils ont l’habitude de se plaindre de leurs conditions de travail, de leur rémunération, du peu de considération qu’on leur accorde, etc. Pourtant ils encouragent leurs enfants à suivre la même voie qu’eux. N’est-ce pas reconnaître que, finalement, leur situation n’est pas si mauvaise ?
Selon les derniers chiffres disponibles (2019), le taux de syndicalisation serait d’environ 10 % en France. Cette moyenne nationale cache une proportion de syndiqués dans la fonction publique (18,4 %) plus de deux fois supérieure à ce qu’elle est dans le privé (7,8 %). L’étude de la Dares montre aussi que les sympathisants des syndicats sont deux fois plus nombreux, en proportion, dans le public (6,1 %) que dans le secteur privé (2,8 %). Dans la fonction publique elle-même, le taux de syndicalisation diffère entre la territoriale (14,1 %), l’hospitalière (15,6 %) et l’étatique (23,1 %).
Comment s’étonner alors que presque tous les dirigeants syndicaux soient issus du secteur public ? Sophie Binet, la toute nouvelle secrétaire générale de la CGT, a été vaguement conseillère principale d’éducation (CPE) pendant 5 ans avant de devenir permanente syndicale ; Laurent Berger de la CFDT a, lui aussi, été très tôt permanent syndical, après avoir effectué quelques remplacements de professeur d’histoire-géographie et avoir été salarié d’une association d’insertion ; François Hommeril, le leader de la CFE-CGC, a commencé sa carrière à Pechiney, alors entreprise publique (privatisée ensuite) ; Cyril Chabanier, le président confédéral de la CFTC, a travaillé à la Caisse nationale d’allocations familiales. Seul Frédéric Souillot, secrétaire général de FO, a travaillé dans un groupe privé, Schlumberger, comme spécialiste dans la maintenance et l’installation de stations-service.
Fonction publique : des syndiqués, des grévistes et des absents
La différence entre le privé et le public est également marquée en ce qui concerne la participation aux élections professionnelles : 38 % pour le premier contre 50 % pour le deuxième .
S’agissant des journées de grève, la Dares ne publie que des données relatives au secteur privé. Les chiffres sur la fonction publique ne sont plus divulgués depuis dix ou quinze ans. Sans doute parce qu’ils montreraient combien la « gréviculture » y est profondément ancrée. Chacun en a déjà fait l’expérience comme usager des transports publics, de l’hôpital ou de l’école. Les dernières grèves contre la réforme des retraites étaient ainsi essentiellement le fait de fonctionnaires et assimilés. Celle du 19 janvier 2023, la plus suivie, rassemblait 29,5 % de fonctionnaires d’État, mais 42,3 % des enseignants du 1er degré et 34,6 % de ceux du second degré. A la SNCF, les grévistes étaient 46,3 %. A EDF, ils représentaient 46,5 % du personnel, et 40 % à Engie. Dans le privé, à part celui des raffineries, aucun secteur n’a été fortement impacté. Même dans l’enseignement privé où les professeurs sont payés sur fonds publics, le nombre de grévistes était marginal. Les radios et télévisions privées fonctionnaient normalement, tandis que les programmes étaient largement perturbés à France Télévisions, Radio France et France Médias Monde (France 24 et RFI).
En matière d’absentéisme, le constat est identique à celui des jours de grèves : les chiffres officiels n’existent pas. Trop dérangeants sans doute ! On doit donc se contenter de données partielles. On sait, par exemple, qu’il est très fréquent dans l’enseignement. La Cour des comptes a plusieurs fois mis le doigt sur ce sujet brûlant. Le dernier rapport en date regrette que l’absentéisme soit mal mesuré, mais nous apprend tout de même que 45 % des enseignants du secteur public ont été absents pour raison de santé en 2018-2019. Dans le secteur privé, selon le « Baromètre absentéisme » de WTW, la proportion était de 28 % pendant la même période. On nous rétorquera que le métier d’enseignant est difficile. Admettons, mais alors comment expliquer que le chiffre soit similaire dans la fonction publique territoriale (FPT) où les tâches ne sont pas les plus éreintantes ?
Dans un rapport de 2016, la Cour des comptes dénonçait, par ailleurs, les jours de congés supplémentaires qui étaient octroyés aux agents des collectivités et diminuaient sérieusement leur durée de travail (1 562 heures en moyenne au lieu des 1 607 réglementaires). Depuis, le gouvernement tente de faire rentrer les collectivités dans le rang. Non sans mal ! Nombre de mairies, comme celle de Paris, essaient par tous les moyens de ne pas se conformer à la loi.
Près de la moitié des jeunes fonctionnaires ont un parent qui l’est aussi
Si les agents publics sont si syndiqués, si grévistes et si absents, comparativement aux salariés du privé, c’est probablement parce que leurs conditions de travail sont difficiles. D’ailleurs ne sont-ils pas constamment en train de revendiquer : pour la semaine de quatre jours, pour les 32 heures, pour une hausse des rémunérations, pour des recrutements massifs (car ils sont débordés), etc.
Comment comprendre alors que des fonctionnaires encouragent leurs enfants à suivre la même voie qu’eux ? Nous connaissons tous des dynasties de cheminots ou d’agents d’EDF. Il semblerait qu’il en soit de même dans la fonction publique. Selon une étude de la DGAFP, 43 % des jeunes travaillant dans la fonction publique en 2020 avaient un ou deux parents fonctionnaires. Et 47 % d’entre eux avaient manifesté leur préférence dès la sortie de leurs études.
Alors, si les conditions de travail sont à ce point difficiles dans la fonction publique, ne sommes-nous pas en présence d’une épidémie de maltraitance parentale ? Les parents cherchent en général le meilleur pour leurs enfants. Dans le cas qui nous occupe, ils auraient dû les convaincre de ne pas les imiter et nous ne devrions pas constater une telle proportion d’enfants de fonctionnaires. Or ils n’en font rien et, à vrai dire, semblent au contraire les encourager à les rejoindre dans leur sinécure.
En fait, de nombreux fonctionnaires tiennent un double discours. L’un tend à dissuader le commun des mortels de postuler dans la fonction publique, une situation à les en croire peu enviable. L’autre, destiné à  leurs enfants, les encourage à rejoindre leurs bataillons. N’est-ce pas là une forme de népotisme ?
Comme le dit un rapport du Conseil de l’Europe, « Le népotisme peut décourager des candidats qualifiés, motivés et compétents de postuler à certains postes et entraîner le recrutement de personnel non qualifié et, partant, fausser le bon fonctionnement de l’administration en permettant que des intérêts privés l’emportent sur les intérêts publics ».
Une des meilleurs façons de l’éviter est de supprimer le statut de la fonction publique, de remettre en cause les nombreux avantages et privilèges qui y sont attachés et de réduire la taille de la sphère publique pour laisser le privé s’emparer des services (crèches, enseignement, transports, assurances sociales, etc.) qu’il pourrait fournir avec davantage d’efficacité qu’actuellement.
12 commentaires
La Ripoublique des fonctionnaires, des taxes, des contraintes pour les autres ceux qui bossent pour les payer, de la fainéantise et de l’escroquerie pour piller toujours plus la population qui doit travailler pour toute cette racaille même si un peu d’administratif est nécessaire, le nombre dépasse toutes les limites et ce n’est pas fini, je n’ai retenu du discours de la première des fonctionnaires que l’augmentation des services public et l’augmentation des dépenses dans le pays le plus taxé au monde et le plus endetté par habitant. Mais cela ne dérange ni les Républicains et moins encore la grande majorité sinon la totalité des médias qui n’ont relevé que le vide en passant par dessus les nouvelles taxes et contraintes à venir.
Cela pose evidemment la question de l ‘attractivité de la Fonction publique aujour dhui . Les interrogations sont multiples . Les carrieres administratives sont mal rémunérées et rapidement plafonnées . Le nombre de candidats aux concours administratifs nationaux diminuent depuis 20 ans . Et poutant , il y a encore des candidats car les fonctionnaires beneficient de vancances genereuses et d ‘une tres bonne protection sociale , sans compter les avantages liées a leur fonction ( garantie d ’emploi , logement , reductions diverses) .
On entend quotidiennement dans les voix de gauche que les fonctionnaires souffrent et manquent de moyens, ce qui justifierait leur absentéisme systémique, leurs jours de grève incessants et leurs revendications permanentes de hausses de salaires.
Or l’article nous confirme bien que la moitié des fonctionnaires ont un parent fonctionnaire, ce qui prouve que la soupe n’est pas aussi mauvaise que ça.
L’article aurait pu ajouter qu’il en est de même pour leurs retraites dont ils prétendent qu’elles sont absolument comparables aux retraites du privé…tout en refusant (violemment) qu’on aligne les 2 systèmes sur celui du privé.
Va comprendre pourquoi…
D’accord avec l’analyse mais pas avec les conclusions. Le statut des fonctionnaires est l’arbre qui cache la foret.
Il y a des privilèges certes même s’ils portent d’autre noms mais aussi des sujétions et des inconvénients qui ne sont malheureusement pas assez appliqués.
La carotte et le baton au lieu d’être appliqués équitablement à tous, ne sont pas appliqués sur les mêmes agents. La carotte pour les uns le baton pour les autres.
Pour mettre de l’ordre, il ne faut pas changer les règles pour que tout continue come avant mais faire ce qu’on est en droit de faire avec les règles existantes qui ne sont hélas jamais appliquées ou si peu.
Ils critiquent pour que les enfants des autres ne prennent pas la place de leurs enfants.
Ne généralisons pas mais il y a, hélas, beaucoup de vrai dans ce constat. J’ai fait l’essentiel de ma carrière dans la fonction publique, plus exactement dans l’Education Nationale, j’ai même été représentant syndical (sgen-cfdt) pendant 3 ans. Je me flatte d’avoir empêché le syndicat académique de soutenir un Maître Auxiliaire toxique et de n’avoir jamais fait grève (le sgen ne suivait pas le SNES à l’époque). Le seul congé que j’ai pris, c’était les 3 jours accordés à l’époque lors d’une naissance. Zéro congé maladie. Mon épouse, professeur d’Histoire Géographie n’a pas eu autant de chance que moi (elle est décédée d’un cancer). En fait, j’ai fait l’essentiel de ma carrière dans l’EN comme personnel de direction. Les absences dans l’EN ne se limitent pas aux enseignants, les personnels de service, très nombreux dans les gros lycées, ont des scores encore supérieurs à ceux des enseignants. L’établissement où j’ai vu le moins d’absentéisme chez ces personnels, c’est, paradoxalement, dans le collège en zone prévention-violence où j’ai terminé ma carrière (à 64 ans à deux mois près, quelle ironie ! ). L’existence de ce corps des personnels de service est d’ailleurs, malgré la qualité d’une minorité, une aberration puisqu’ils ont des horaires alignés sur les heures d’ouverture de l’établissement (sauf mercredi et début de matinée où ils arrivent une heure plus tôt)donc quand les salles de classe sont majoritairement occupées. Quant au service de restauration, celui que j’ai vu fonctionner au mieux était sous contrat avec une société privée, donc pas de grévistes mais lors de ma dernière année le contrat n’a pas été renouvelé par le Conseil Général devenu, temporairement, majoritaire. Notre fille n’a jamais été tentée par l’enseignement ni par la fonction publique. Elle préfère le salaire au mérite.
Il suffit de regarder autour de nous et de comparer les conditions de travail et de salaire entre deux travailleurs, l’un étant fonctionnaire et l’autre travailleur dans le secteur privé pour voir la différence. La faute à qui ? Un système basé non pas sur les compétences mais sur l’ancienneté. Des salaires sans corrélation avec la qualité du travail fourni. La productivité se mesure non pas en termes de qualité de service mais en nombre d’actes. Ajouter à cela l’absence de contrôle sérieux du nombre d’heures travaillées.
Entrer dans la fonction publique c’est vivre « pépère » ne pas faire de vagues et avoir la garantie de l’emploi. Le nivellement par le bas. Comment s’étonner de la difficulté qu’il y a à recruter des pointures ? Aux fonctionnaires qui dirigent les syndicats il faudrait ajouter ceux qui contrôlent des instances telles que Caisses de retraites Y COMPRIS DU PRIVE. Ils sont nombreux au sein de nos conseils municipaux, généraux, etc.
oui, il faut absolument supprimer le statut de la fonction publique (sauf pour les activités régaliennes) Le Canadiens l’ont fait depuis au moins 20 ans et aussi je crois les Italiens….alors pourquoi pas nous ?
Bien d’accord !
En parfait accord DABURON, mais nos gouvernants n’ont qu’un but, DÉTRUIRE LA FRANCE ! Ils continueront à arroser les fonctionnaires jusqu’à la mort financière du Pays ! Les agences de notations commencent à dégrader la France. Il serait temps !
La cour des comptes a publié un rapport récent sur l’absentéisme des enseignants : En 2019, 2,6% des enseignants ont été absents «au moins un jour au cours d’une semaine», contre 3,2% parmi les autres corps de métier de la fonction publique d’État. C’est bien moins que dans la fonction publique territoriale (5,1%) ou hospitalière (4,6%), le secteur privé (3,9%) ou l’ensemble du monde du travail (4,9%). Ce qu’elle a pointé surtout, c’est le fait que les enseignants sont souvent absents du fait de la mauvaise organisation du Ministère. Parmi les motifs importants, celui de la garde des enfants : 2/3 des enseignants sont des enseignantes.
Au delà des facilités de critiquer de loin ce que l’on envie, il faudrait aller au terme de la réflexion : le métier n’attire plus, les salaires sont en baisse continuelle depuis plus de 20 ans car les augmentations ne rattrapent jamais l’inflation.
Pour ceux qui sont si envieux, allez voir en Allemagne, où cela semble se dérouler mieux, les enseignants y sont significativement mieux payés.
Pour ceux qui veulent la mort du statut fonctionnarial, imaginez qu’en France, 95 % des emplois enseignants sont proposés par une seule institution centralisée… Si vous êtes alors licencié par les innombrables petits chefs qui peuplent les direction d’établissements, vous devrez changer de métier.
Pour s’en sortir, il faut donc décentraliser, privatiser, et assumer des salaires justifiant plus de contraintes, sauf à recruter les analphabètes que l’on commence à rencontrer (même dans des lycées). Par contre, l’autonomie prônée par certains n’est qu’un miroir aux alouettes, les chefs d’établissements font carrière, c’est à dire qu’ils ne passent pas plus de 5 ans par établissement, le temps parfois de mettre tout en désordre et de partir avant de récolter…
La question n’est pas de vouloir la mort de la fonction publique, juste de recentrer le domaine d’action public qu les secteurs régaliens: Santé, éducation, armée, justice, police, impôts avec des fonctionnaires éventuellement plus nombreux dans ces secteurs, mieux payés, et mieux formés… Faut il que la fonction publique emploie des tas de bureaucrate, pour faire appliquée des tas de normes ne servant qu’à justifier la présence de bureaucrate??? Pourquoi l’etat devrait s’occuper de secteur que le privé peut gérer?? Entretien, administratif, distribution d’aide, sécu… n’importe quel secrétaire privé peut faire ces jobs, pas besoin de statut de fonctionnaires. Moins de personnels, moins de bâtiments à gérer….Est ce le rôle de le la fonction publique de subventionné la culture? le sport, les transports, .. qui ne profite qu’a quelques citoyens (combien au fin fond des campagnes n’ont jamais pris le train, ou été au théatre??)et d’avoir des fonctionnaires pour gérer ce que le privé peut faire