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Et si l’on réformait vraiment le SMIC ?

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En affirmant vouloir libérer le SMIC de toutes charges, Gérald Darmanin ne montre-t-il pas que son coût représente une entrave à l’embauche ? Ce faisant, il poursuit la politique qui consiste à réduire le coût du travail en dérogeant à la règle générale, d’où par exemple les réductions dites « Fillon ». Pourquoi ne pas simplifier le processus en décrétant une simple baisse du SMIC ?

Une telle mesure ne toucherait pas les personnes déjà en poste et permettrait la création d’emplois nouveaux. Ceux-ci, certes peu qualifiés, n’apparaissent-ils pas plus enviables que la dépendance au chômage ou au RSA ? Il est économiquement inefficace de maintenir un seuil d’entrée sur le marché du travail trop élevé, et moralement douteux de prétendre défendre les conditions de travail -à travers le salaire- en maintenant hors du marché un nombre important de personnes. La meilleure arme contre les bas salaires reste le plein emploi, et non pas la norme, sauf à penser que décréter la fin de la pauvreté permettrait de la réduire.

Le jeu dangereux de la baisse des charges

La volonté de baisser le coût des salaires, des bas salaires particulièrement, nous force à nous interroger sur le SMIC en lui-même. Comme à son habitude, l’Etat, après avoir créé la règle, n’a de cesse d’y apporter des exceptions, tentant de rattraper par une fuite en avant législative ou règlementaire les déséquilibres engendrés. Compliquant absurdement le droit, il provoque aussi un dangereux décalage entre les niveaux de salaire. Pourquoi ? Parce que les charges pesant sur les salaires correspondent essentiellement à des assurances (chômage, maladie, retraite) et qu’ainsi rien ne justifie que certains payent leurs charges en fonction de leur salaire et d’autres non. Le salaire doit-il se transformer aussi en outil de redistribution ?

Or, dès aujourd’hui, la part des charges patronales varie de 12% à 31%. Une différence du triple, amenée à passer à 12 après la réforme du CICE, selon nos calculs ! Les déséquilibres des comptes publics qui vont inévitablement en résulter apporteront de nouveau leur lot de mesures fiscales.

Ce système nuit autant à ceux qui sont en dehors du marché du travail qu’à ceux qui sont en poste. Il pèse aussi sur les inactifs, à travers le coût du chômage versé à ceux qu’il empêche de travailler.

Balance commerciale négative, le SMIC coupable ?

La conjoncture semble porteuse mais pourtant la balance commerciale reste largement négative. Il apparait que la consommation qui porte la croissance (faible mais meilleure) du PIB repose sur l’augmentation des importations plutôt que sur l’augmentation de la production interne. Certes, il faut du temps aux industries pour s’adapter, mais eu égard au coût du travail en France, il est plus rentable d’importer que de produire sur place.

Le SMIC proportionnellement le plus élevé d’Europe

Il est difficile d’établir un lien de corrélation entre SMIC fort et chômage. Cependant, la France possède le SMIC le plus important d’Europe relativement au salaire médian.

Rapport entre le salaire minimal et le salaire médian

Rapport entre le salaire minimal et le salaire médian

Avec un rapport au salaire médian de 0,62, la France a le ratio le plus fort d’Europe, ce qui laisse penser que le salaire minimum légal y est survalorisé.

Certes ce facteur n’explique pas tout, puisque le rapport est très faible en Espagne, pays qui connaît un fort taux de chômage (même s’il est en nette réduction).Quoiqu’il en soit, dans de nombreux pays n’ayant pas de salaire minimum (Suisse, Allemagne jusqu’à peu), la situation est bien plus enviable qu’en France, achevant de nous convaincre que la réforme du SMIC, non seulement ne causerait pas de désastre social, mais pourrait améliorer les choses sur le front de l’emploi.

Baisser le SMIC n’est pas condamner à la pauvreté

Cependant, si abaisser le salaire minimum légal (à défaut de le supprimer) permettait de favoriser l’accès au marché du travail, ne condamnerait- il pas celui qui en profite à ne jamais gagner plus que cette rémunération initiale ? Non, si on en croit les chiffres du ministère du Travail[[http://dares.travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2016-014.pdf]] qui mettent en évidence une dynamique des rémunérations : si 28% des moins de 25 ans sont rémunérés au SMIC, ils ne sont plus que 11% avant 29 ans puis entre 6 et 7% ensuite. Cela dénote aussi une forte pression sur ce seuil concernant les jeunes salariés, pression qui n’existe plus ensuite.

Plus généralement, une étude de l’INSEE portant sur douze ans montrait que les salariés payés au SMIC voyaient leur salaire s’éloigner de ce seuil progressivement : dès l’année suivante, 62% d’entre-eux touchaient plus, 79% au bout de 3 ans, 90% après 7 ans.

Il y a donc bien une évolution dans l’échelle des revenus, qui doit précisément contribuer à sortir de la pauvreté ceux qui en sont capables. On les y aidera mieux en leur donnant accès au travail avec un SMIC plus bas plutôt qu’en les rendant prisonnier du chômage du fait d’un seuil d’embauche trop couteux.

Rapport entre le salaire minimal et le salaire médian

Rapport entre le salaire minimal et le salaire médian

 

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4 commentaires

Dominogris 30 août 2017 - 2:00

SMIC
Bien difficile dans notre contexte marxisant de baisser le SMIC…
Une solution serait de verser le salaire complet, ce qui suppose de revoir tout notre système social.

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Jean-Baptiste Boone 31 août 2017 - 10:33

Le simple fait de ne plus utiliser la distinction factice entre charges patronales et salariales créerait peut être déjà une bénéfique prise de conscience. Il est facile de le faire et prépare idéalement le terrain à de plus vastes réformes.

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Patrick 3 octobre 2017 - 1:27

Quelle bonne idée
Il est appréciable qu'en 2017 la France ait eu un vulgaire journaliste vaguement diplômé en finance pour faire quelques analyses qui ont dû prendre 10mn.

Baisser le SMIC est une bonne idée, mais il faut aller bien plus loin et baisser tous les salaires. J'ai une entreprise et les charges et les salaires sont le premiers poste de frais.

Si on pouvais baisser les salaires des médecins, surtout des spécialistes, mais aussi des ministres et de tout un tas de branleurs fonctionnaires, si on pouvais supprimer toutes les niches fiscales (comme celles sur les organes de presse) mais aussi faire travailler plus les profs (y en aurait donc moins) alors les mammouths que sont l'hopital, l'éducation nationale, l'administration, la politique et tous ces trous du culs qui tournent autour des médias ne nous couteraient plus une fortune !

Je passe mon temps à travailler et financer des profiteurs de toute part.

Baisser les salaires oui ! Mais d'au moins 30% et pas seulement des smicards (car ils sont minoritaires), il faut baisser les salaires de tout le monde jusqu'au ingénieurs et réduire les charges.

C'est la clé nécessaire à l'amélioration de mes comptes.

Patrick
Entrepreneur Lyonnais

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jean louis Prime 14 novembre 2018 - 10:37

marche du travail
Je pense que le marché du travail en France à besoin d'un véritable choc de compétitivité basé sur trois principes : Liberté de négociation du salaire, ce qui signifie absence de seuil minimum. Liberté de négociation de la durée du travail en gardant comme seuil les 48 heures de l'OIT, ce qui signifie suppression des 35 heures. Liberté de licenciement sans avoir à justifier d'un motif et sans indemnité de licenciement. Le licenciement ne serait plus considéré comme un préjudice mais comme un évenement naturel de la vie du contrat de travail. Il est évident que la grande fluidité créée par ces mesures conduirait au pleine emploi, à une meilleure rentabilité de nos entreprises dont le développement favoriserait l'embauche. Ces mesures qui paraissent difficile dans un contexte de chomage ne le serait plus une fois le plein emploi retrouvé.

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