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II Santé publique

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Les politiques de la santé visent à organiser la prise en charge sanitaire de la population et à promouvoir la prise en compte des objectifs de santé publique dans les différents secteurs de la société. Elles comprennent l’ensemble des choix stratégiques des pouvoirs publics et privés pour améliorer l’état de santé des populations, dont ils ont la responsabilité.

Les gouvernements ont la responsabilité de la santé de leurs peuples (Préambule de la charte de l’organisation mondiale de la santé).

La loi du 9 août 2004 a marqué un tournant dans l’histoire des politiques de santé en France. En effet, pour la première fois, une loi affirme que l’Etat français est responsable en matière de santé publique. C’est dans ce cadre que la Cour des comptes s’intéresse aux campagnes menées sur les plans de santé, les programmes de santé ainsi que les mécanismes mis en place.

Les domaines identifiés, suivants, ont fait l’objet d’un rapport de la Cour sur la période étudiée :

– système de carte assurance maladie ;
– prise en charge des personnes âgées dans le système de soin ;
– Politique de services à la personne ;
– politique de périnatalité : «Humanité, proximité, sécurité, qualité» ;
– plan «Psychiatrie et santé mentale» 2005-2010 ;
– établissement public de santé national de Fresnes.

A. Système de la carte « d’assurance maladie »

La Cour des comptes ne s’est pas intéressée au système en lui-même, mais à la relation de celui-ci avec les professionnels de la santé. Trois recommandations en sont ressorties.

Recommandations Suivies
Subordonner les aides financières, apportées aux professionnels de la santé pour la télétransmission, au respect de normes strictes de mise à jour des matériels et des logiciels. Oui
(depuis 2011)
Intégrer parmi les membres de plein exercice du GIP ASIP[[Groupement d’Intérêt Public « Agence nationale des systèmes d’information partagés de santé »]] les professions de santé et les organismes de protection sociale complémentaire. Non
Fixer, à un montant dissuasif, la contribution des professionnels de santé, qui ne transmettent pas par électronique- les feuilles de soin. Oui
Article L161-35 ( modification du 12 août 2011 ) : des sanctions sont prévues à l’encontre des professionnels de la santé qui ne transmettent pas par électronique- la feuille de soin.

B. Prise en charge des personnes âgées dans le système de soin

Le vieillissement de la population est un enjeu auquel la France est confronté et se doit de répondre par l’action. Selon les prévisions, d’ici à 2050, le pays connaîtra un accroissement de 15% de sa population de plus de 75 ans. Après avoir étudié cette politique de l’Etat, la Cour a formulé cinq recommandations.

Recommandations Suivies
Développer des analyses épidémiologiques sur l’état de santé des personnes âgées. Elles existent mais sont bien trop insuffisantes pour développer une analyse et aménager des mesures relatives aux besoins spécifiques et globaux. Non
Les politiques de santé publique doivent incorporer les besoins spécifiques des personnes âgées. Non
Le fait qu’il n’y ait pas de suivi des mesures prises antérieurement, rend difficilement identifiables les besoins spécifiques de ces populations.
Mettre en place une campagne de prévention sur les risques iatrogéniques[[Prise de médicaments trop importante ]]. Oui
La Convention du 26 juillet 2011 entre syndicats de médecins et l’assurance maladie intègre cette donnée.
Étendre la mise en place de la filière spécifique dans les services d’urgences (accueil et soins). Non
Malgré des améliorations, le problème demeure. Seuls 13 des 645 services d’urgences, tous statuts et toutes catégories confondus, déclarent disposer d’une filière spécifique aux personnes âgées.
Dans le cadre de la coordination gérontologique[[Champ d’étude portant sur le vieillissement humain, ses conséquences et son implication au sens le plus large]], il y a un besoin de clarifier les rôles respectifs des CLIC[[Centre locaux d’information et de coordination]] des équipes «allocation perte d’autonomie» et des réseaux de santé. Non
Aucune évolution importante

C. Politique des services à la personne

Il y a eu deux plans de politique de services à la personne, étendus à tous types de publics :

– plan 2005-2009, dit « Plan Borloo » ;
– plan 2009-2012, dit « Plan Wauquiez ».

Aucun plan spécifique n’a été mis en place sous le gouvernement actuel, si ce n’est une taxation qui a fait chuter l’emploi dans ce secteur, ou plutôt, qui a fait la promotion du travail au noir…

Recommandations Suivies
Améliorer la professionnalisation des emplois de services à la personne. Non
Cette tâche est difficile, car la majorité des emplois dans ce secteur sont des emplois directs n’impliquant pas d’organisme prestataire agréé.
Diligenter les contrôles nécessaires au respect des exigences de l’agrément qualité. Non
Compléter l’agrément simple d’exigences minimales de qualité des prestations. Oui
(2013-2014)
Evaluer avec rigueur l’impact sur l’emploi des plans successifs de développement des services à la personne, en tenant compte du coût net des mesures. Non

Non seulement il n’y a pas eu d’analyse des effets des plans successifs, mais il n’y a pas eu de plan du tout depuis 2012.

Recommandations Suivies
Charger le Conseil national de l’information statistique (CNIS) de faire des propositions afin de définir une méthode stable et partagée, pour améliorer la connaissance statistique des emplois dans les services à la personne. Un groupe de travail a été formé, piloté par la DARES (direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques), en collaboration avec la CNIS, l’Insee, l’ANSP[[Grossesse, accouchement, premiers jours]], l’Ircem, l’Acoss et la DGCIS.
Procéder aux études nécessaires en vue d’améliorer l’efficacité du dispositif d’aide public, – notamment à l’actualisation par la DGTPE de celles réalisées, en 2005, sur l’effet de l’application du taux réduit de la TVA au secteur de service à la personne ; et en 2008, sur les conséquences de la dépense fiscale pour l’emploi à domicile. Non
Engager sur la base des résultats obtenus à la suite de ces études, une réflexion d’ensemble visant à un meilleur ciblage des aides en direction des personnes vulnérables. Non
Développement du Cesu :
– Elargir sa part dans le paiement de prestations sociales, comme l’allocation personnalisée d’autonomie.
– Diminuer son coût de traitement par la dématérialisation.
– Ouvrir son émission à la concurrence d’autres opérateurs privés, dont l’habilitation pourrait être désormais limitée dans le temps.
Oui
Depuis octobre 2010
Oui
Mais le e-ticket Cesu n’est pas obligatoire (on peut encore le recevoir sous forme papier).
Oui
Subordonner l’octroi de tout ou d’une partie de l’abattement sur les cotisations patronales, accordé aux particuliers employeurs, à l’adhésion aux futurs centres de ressources, appelés à soutenir les particuliers et leurs employés ; mesure qui serait de nature à éviter la hausse du travail dissimulé. Non

D. Politique de périnatalité, dite «Humanité, proximité, sécurité, qualité»

Cette politique vise un recul de la mortalité liée à la périnatalité

Les problèmes suivants ont été pointés par la Cour des comptes :
– pas de normes relatives au risque des mères ;
– la France est le seul pays d’Europe qui ne dispose pas de données systématiques, ni sur l’âge gestationnel des nouveau-nés, ni sur leur poids ;
– les données du système d’information sont fragmentées et fragiles ;
– une carence de la recherche anormale au regard de l’importance des enjeux.

Recommandations Suivies
Elaborer un outil statistique plus complet. Non
Au contraire il y a eu dégradation de celui-ci.
Une des raisons : arrêts de la Cour de cassation.
On peut déclarer un enfant né sans vie, à partir de 15 semaines de grossesse. Ce qui fausse les indicateurs au vu de la définition internationale (que ce soit pour la mortalité périnatale et les enfants mort-nés)[[La France est le seul pays européen dans ce cas avec Chypre]].
Renforcer l’application des normes s’appliquant aux services départementaux de PMI. Non
Mettre en place des mesures spécifiques aux départements d’outre-mer, dont la situation est très préoccupante : taux en tous genres deux à trois fois plus élevés qu’en métropole. Non
Des objectifs chiffrés ont été annoncés par le Conseil interministériel de l’outre-mer, mais aucune étude sur les causes et leurs effets n’est envisagée.
L’article R. 2112-8 du code de la santé publique prévoit l’organisation par le président du Conseil général d’une réunion annuelle visant à présenter et à analyser les données recueillies par les services de PMI, grâce aux premiers certificats de santé.
Généraliser ces réunions utiles à la compréhension et à la mise en route de politiques publiques territorialisées.
Non
Remédier à l’insuffisance des préventions à destination des femmes en situation de vulnérabilité (sociale, professionnelle…). Non

«Une politique de santé publique aux enjeux aussi lourds exige des indicateurs fiables, réguliers, conformes aux standards internationaux, sans lesquels son pilotage restera incertain, tandis que l’efficacité des actions engagées sera non mesurable», écrit la Cour des comptes.

Les plans mis en place en la matière ne sont tout simplement pas respectés, tandis que 15% du plan n’est même pas applicable sur le terrain.

E. Plan de la «Psychiatrie et de la santé mentale» 2005-2010

Ce plan a pour conséquence des actions menées vers des personnes qui souffrent- de pathologies relevant de la psychiatrie, elle-même à la troisième place par leur nombre des maladies en France. Chaque année, plus d’un million de personnes sont prises en charge, représentant 7% des dépenses du régime général de l’assurance maladie.

Plusieurs remarques ont été formulées par la Cour des comptes sur ce Plan :

Recommandations Suivies
Réduire le nombre de lits pour les hospitalisations complètes systématiques.
Les services présentent les difficultés suivantes :
– saturation ;
– hospitalisation systématique inadaptée à certaines situations
Exemple d’alternatives à l’hospitalisation : structure extrahospitalière de proximité
Oui (réduction en cours)
Réforme du 5 juillet 2011 de la loi psychiatrie de 1990, les décrets d’applications ayant suivi le mois suivant.
Les personnes en soins psychiatriques, à la demande d’un tiers et sur décision du préfet, peuvent être prises en charge hors hospitalisation complète (HC).
Ce n’est donc plus l’hospitalisation qui est imposée, mais les soins. Par ailleurs, il y a un contrôle, dorénavant systématique, du juge des libertés et de la détention (JLD) des hospitalisations complètes.
Mieux répartir les effectifs sur le territoire, et mettre en place des mesures incitatives. Non
La mauvaise répartition des effectifs demeure, pour autant cette question est inscrite comme un axe prioritaire du Plan 2011-2015 Psychiatrie.

F. Etablissement public de santé national de Fresnes

L’hôpital pénitentiaire de Fresnes a succédé à l’infirmerie centrale des prisons de la Seine en 1898, en même temps que la maison d’arrêt de Fresnes. Transformé en établissement public en 1985, il est devenu, en 1995, l’Etablissement public de santé national de Fresnes (EPSNF). Certaines critiques formulées par la Cour des comptes lors de ses précédentes interventions, en 1991 et 1996, n’ont toujours pas trouvé de réponses, en particulier à propos de la place de l’établissement dans l’organisation des soins des détenus en France. L’incertitude qui en découle a de graves répercussions sur le fonctionnement de l’établissement. Vingt ans après la réforme de 1994 sur l’organisation de la prise en charge sanitaire des détenus, la question de la place, voire de l’utilité même de l’EPSNF dans ce dispositif, n’a toujours pas été réglée. En 2008, la Cour avait formulé des recommandations à la suite de son contrôle qui portait sur les exercices de 1995 à 2006.

Recommandations Suivies
Clarifier le rôle de l’EPSNF dans le dispositif sanitaire national de prise en charge des détenus, en définissant avec précision les conditions de son articulation avec l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière et les missions sanitaires qu’il doit continuer d’assumer. Non
D’ailleurs le rapport du «Contrôleur général des lieux de privation de liberté» de 2010 souligne ce problème.
Substituer la tutelle de l’ARH[[Agence Régional de l’Hospitalisation]] Ile de France à celle de la DHOS[[La direction générale de l’offre de soin]]. Non
Cette tutelle est toujours d’actualité.

Conclusion

De ces rapports de la Cour des comptes ayant -trait à la santé publique, nous pouvons tirer deux constats qui paraissent surprenants. Le cas du Plan psychiatrie est intéressant du fait du parallèle que l’on peut en faire avec les plans mis en place par les gouvernements successifs. En effet, il est de coutume en France de ne pas faire d’études suivies sur les actions menées antérieurement. Lorsqu’un rapport quelconque indique des dysfonctionnements, soit rien n’est changé, soit tout est transformé, comme si rien n’avait existé par le passé !

Pourtant tout n’est pas toujours à refaire, parfois seules des retouches ou des approfondissements sont nécessaires. Serait-ce la peur de se remettre en question !? Mais ce qui est inquiétant, c’est qu’aucune action n’a été menée en l’encontre de l’établissement public de santé national de Fresnes. Cela fait désormais plus de 20 ans que la Cour émet des recommandations, qui, d’après les témoignages, semblent être partagées par les effectifs qui travaillent sur le terrain. Deux décennies pendant lesquelles on a rappelé les mêmes carences et soulevé les mêmes problèmes… et rien n’a changé !!

L’absence des données et la carence des recherches dans ces domaines difficiles semblent incompréhensibles, si l’on prend en compte la part du PIB que la France consacre à la santé publique…

PIB consacré à la santé par pays
France Royaume-Uni Etats-Unis Allemagne
Période
2009-2013
11,7 9,4 17,9 11,3
Source : Banque mondiale

La France ne semble pas en retrait, en comparaison avec ces trois pays développés. Nous noterons à ce propos que, pour un pays considéré comme ultra-libéral, les Etats-Unis consacrent dans son économie nationale des crédits destinés à améliorer la santé de sa population.

Nous remarquerons également que la Cour souligne le besoin d’un meilleur équilibrage des dépenses publiques. Celles-ci sont pour l’essentiel tournées vers la sécurité des établissements, au détriment de la recherche, notamment épidémiologique.

Dépense consacrée à la recherche par an France Royaume-Uni Etats-Unis
en millions de Dollars US 27,7 172,6 5200
Part en % des dépenses totales 2 7 16
Source : URCECO ( Unité de recherche clinique en économie de la santé )

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