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La fiscalité de la décroissance

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La récession menace les budgets puisque les recettes fiscales diminuent. Ces déficits, en dessous de 3 % du PIB, n’ont pas inquiété ceux qui ont signé les accords de Bruxelles. Mais ils ont avalisé aussi la possibilité de « déficits structurels » qui n’ont rien à voir avec les aléas de la conjoncture. Ce laxisme n’a pas échappé à la vigilance de Maître Jean-Philippe Delsol, administrateur de l’IREF.

Alors que les dirigeants européens se félicitaient d’avance et pour la énième fois d’avoir rétabli la situation de l’euro de manière définitive, leur Sommet du 9 décembre s’est transformé en Soufflé : nous en sommes aux lendemains qui déchantent. D’après l’INSEE, la France entre en récession et de nouvelles mesures seront sans doute annoncées pour faire face aux déficits publics qui s’aggraveront puisque les recettes fiscales dépendent du taux de croissance. Mais ces mesures restent toujours insuffisantes au mieux et néfastes au pire. C’est pourquoi notre économie reste empêtrée dans ses difficultés.

Des décisions européennes insuffisantes

D’après les accords de Bruxelles chaque État de la zone euro doit s’engager à adopter une nouvelle règle budgétaire, baptisée en France «règle d’or». Cette disposition doit être introduite dans la Constitution des pays, ou à un niveau juridique équivalent. Jusque là, parmi les pays de l’Euroland, seules l’Allemagne et l’Espagne avaient adopté une telle règle.

Parmi les dispositions prévues pour la règle d’or, l’une concerne le « déficit structurel annuel ». Les États pourraient avoir, sous le contrôle des juridictions veillant à la constitutionnalité des lois de finances, un « déficit structurel annuel…ne dépassant pas 0,5% du produit intérieur brut (PIB)». À titre de comparaison, la «règle d’or» allemande autorise un déficit structurel maximal de 0,35% du PIB à compter de 2016.

Mais qu’est-ce qu’un « déficit annuel structurel » ? Les Anglo-saxons le définissent comme l’excès des dépenses publiques sur les revenus qui persiste lorsque l’économie croît régulièrement à son plus haut taux d’emploi durable, c’est à dire au même rythme que la production potentielle. Il serait la part du déficit budgétaire qui restera, même après la reprise économique à son niveau normal de production.

Limiter un tel déficit est une bonne chose. Mais ne valait-il pas mieux l’exclure ? Les dispositions envisagées ne scellent pas un véritable engagement de retrouver l’équilibre des finances publiques, il s’agit plutôt d’une décision trompeuse, permettant encore aux Etats de poursuivre leur course folle vers l’endettement. Mais il y a plus grave : le plafond annuel de déficit autorisé (qu’il soit structurel ou pas) reste fixé à 3% du PIB, comme prévu par le traité de Maastricht. Certes la règle prévoirait désormais en cas de dépassement de ces 3% des sanctions «automatiques à moins qu’une majorité qualifiée d’États membres de la zone euro s’y oppose». Mais 3% de déficit par an représente un endettement sans fin et vite incommensurable et insupportable.

Enfin, et non le moindre, dans les accords de Bruxelles l’Europe a renoncé à sanctionner les Etats dépassant le seuil de 60% de dettes publiques par rapport au PIB, en considérant que trop de pays devraient alors être sanctionnés !

Il apparaît ainsi qu’une fois de plus l’Europe n’a adopté que des mesures en demi-teinte. Les marchés ne s’y sont pas trompés : les taux d’emprunt des Etats sont remontés, les bourses s’inquiètent, les agences de notation menacent de dégrader de nombreux pays européens …

Toujours plus et toujours moins

La difficulté vient de ce que les gouvernements européens n’ont pas compris que la seule solution est de réduire la dépense publique. A l’inverse, ils multiplient les nouveaux impôts. Sur trois années, de la loi de finances pour 2010 à celle pour 2012, le législateur français aura édicté 130 lois nouvelles génératrices de nouveaux impôts ou d’augmentation d’impôt. Et dans le même temps, la réduction des dépenses est un chemin de croix plein de reniements. En témoigne cet essai avorté d’instauration d’un seul jour de carence non pris en charge par la Sécurité Sociale pour les arrêts maladie des fonctionnaires – on a même envisagé de faire passer la pilule aux fonctionnaires en ajoutant une quatrième journée de carence pour les salariés du privé qui supportent déjà 3 jours !

Au demeurant, toutes les mesures dites « d’économie » ne sont jamais que des mesures tendant à mettre plus d’impôt à la charge des contribuables ou à diminuer les avantages dont ils bénéficient. Il n’y a guère de vraies mesures de baisse des charges de l’Etat, alors que la France, comme l’Europe, est d’abord malade de ses dépenses publiques et meurt de l’Etat prévoyance qu’on ne veut pas remettre en cause. Il y a toujours plus d’impôts mais guère moins de dépenses de l’Etat lui-même.

La rétroactivité est sanctionnée

Dans ce paysage qui n’augure rien de bon pour les contribuables, il y a quelques lueurs avec la décision du Conseil d’Etat du 21 octobre dernier (n° 314767, min. c/SNC Peugeot) qui vient pour la première fois de sanctionner la rétroactivité d’une loi fiscale. Le Conseil a fait application d’une jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (23 juillet 2009, affaire 30345/05 Joubert c/France). Les faits de l’espèce n’ont guère d’importance : il s’agissait de déterminer le redevable de la taxe professionnelle sur les biens mis par une entreprise à disposition d’une autre dans le cadre d’une relation de sous-traitance. Une nouvelle définition de biens imposables avait été introduite de manière rétroactive par l’article 59 de la loi de finances rectificative pour 2003. Le Conseil d’Etat a confirmé les décisions des juges du fond qui avaient refusé cette rétroactivité comme contraire à l’article 1er du premier protocole de la Convention européenne des droits de l’homme qui institue que « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens » et ne saurait, selon la Cour de Strasbourg, en être privée que pour des raisons impérieuses d’intérêt général et, selon sa jurisprudence, un motif budgétaire ne saurait suffire à cet effet.

C’est le seul cadeau de Noël offert aux contribuables, qui portent la charge de la crise, dont on ne verra le bout que lorsque les Etats européens, et en particulier la France, sauront réduire leurs dépenses.

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4 commentaires

Anonyme 25 décembre 2011 - 5:34

perseverare diabolicum
des prélèvements obligatoires à moins de 40/100 devrait être la vraie règle d,or.Ce sujet n,est jamais débattu par les politiques qui multiplient les propositions d;imposition sur tout soupçon de richesse cachée .Un particulier riche est préférable à un État ruiné et endetté!Il faut impérativement exiger une réponse de tout candidat sur ses projets de prélèvements et donc de société !

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Anonyme 25 décembre 2011 - 10:38

la regle d’Or.
Je ne vois pas ce que cette regle apporte par rapport aux accord de Mastrich. Dans les deux cas le déficit depends, entre autre de la volonté de nos ediles.

De toutes façon le deficit ne peux qu’augementer : Celui de notre balance des paiement se creuse chaque année. Comment un pays peut-il durablement supporter qu’il achete plus qu’in ne vends….

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Anonyme 26 décembre 2011 - 9:51

re regle d’OR
Il ne peut y avoir de déficit si l’État ne prend que 38/100 de la richesse du pays.Les 62/100 restants sont mieux gérés par les entrepreneurs et autres créateurs de richesses.Maastricht tolérait 3/100 de déficits qui pouvaient se cumuler:Quel particulier pourrait vivre 35 ans avec ce système ?

Les intérêts composés s’appliquent dans les 2 sens!L’état ne doit s’occuper que de ses fonctions régaliennes avec moins de 40/100 de prélèvements Les politiques sont « tous »loin de cette règle de bon sens!C’est à l’électeur le rôle de lui demander!

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Anonyme 26 décembre 2011 - 1:36

Communauté de communes
En vacances actuellement je lis dans le journal de la ville des Sables d’Olonne qu’on vient d’inaugurer les nouveaux locaux sur 6 étages de la Communauté de Communes regroupant les Sables, Olonne/mer et Chateau d’Olonne.

Or dans l’article on apprend que cette Communauté a été crée en 1994 avec au départ une vingtaine d’agents et que maintenant ils sont 130 !

On se demande vraiment ce qu’ils peuvent bien faire (sans doute absolument débordes eux aussi…) et on s’interroge si les effectifs des services municipaux des 3 communes ont été réduits d’autant. C’est d’autant plus regrettable qu’un projet de fusion des 3 communes existait mais qu’il a été rejeté par les élus.

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