Contrairement aux arguments fréquemment avancés par une partie de la classe politique, la fiscalité des entreprises s’applique à peu près aussi intensément pour les TPE/PME et les ETI (entreprises de taille intermédiaire) que pour les grandes entreprises.
À la fin de l’année dernière, dans ses traditionnels vœux de fin d’année, le président de la République a employé l’expression de « réarmement économique » de la France (qui n’est pas sans rappeler le réarmement moral après la guerre de 1870 dont parlait Ernest Renan). Bien qu’il ait sincèrement pris conscience de la nécessité de retrouver le chemin de la compétitivité pour les forces productives nationales via la baisse de l’impôt[1], il n’a pas concomitamment baissé la dépense publique, ni profondément rénové un système d’aides publiques inefficace.
Pour autant, comme l’a montré un rapport de la commission des Finances de l’Assemblée nationale publié au mois de juillet 2023, la convergence fiscale des entreprises en fonction de leur taille a progressé. Plutôt donc que d’espérer sauver les finances publiques en faisant payer ceux qui prétendument ne paient pas, les prochaines réformes devront privilégier une baisse de la pression fiscale pour tous afin de libérer enfin les initiatives et la création de richesses.
La nécessité d’une moindre pression fiscale sur les entreprises a été reconnue depuis 2017…
En 2021, la fiscalité des entreprises (ne comprenant ni la TVA, payée par les consommateurs, ni les charges sociales qui représentent à elles seules 399 Mds€) concentrait 6,1 % du PIB national, soit 151,5 Mds€, composés pour 48 % de l’IS (impôt sur les sociétés) et de l’impôt sur le revenu des entrepreneurs individuels, suivis par les taxes en tous genres qui frappent les salaires (27 %), le capital (18 %), le chiffre d’affaires et la valeur ajoutée (7 %).
À l’heure actuelle, le taux nominal d’IS est de 25 %, contre 33% en 2017 à l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, auquel il faut ajouter une contribution sociale de 3,3 % du total de l’IS acquitté pour les entreprises dégageant plus de 7,63 M€ de chiffre d’affaires, portant donc son « taux facial » à 25,825 %[2].
… et désormais la pression fiscale est plus ou moins la même pour tous
La Direction générale des Finances publiques, interrogée par les rapporteurs, remarque que la répartition du versement de l’IS brut (sans déduction des crédits d’impôts) colle assez bien à la part de valeur ajoutée créée en fonction des différentes tailles d’entreprises[3], ainsi que l’illustre le tableau suivant :
RÉPARTITION DU NOMBRE DE SOCIÉTÉS PRISES ISOLÉMENT SOUMISES À L’IS
(en pourcentage)
Nombre d’entreprises | Valeur ajoutée | Excédent net d’exploitation (ENE) | IS brut après reports* | |
TPE | 89,15 % | 16,14 % | 15,85 % | 18,22 % |
PME | 10,44 % | 35,46 % | 31,88 % | 33,08 % |
ETI | 0,40 % | 30,51 % | 30,17 % | 32,79 % |
GE | 0,01 % | 17,89 % | 22,10 % | 15,90 % |
Total | 100,00 % | 100,00 % | 100,00 % | 100,00 % |
Source : DGFiP, déclarations de résultats souscrites au titre des exercices clos en 2019, 2020 et 2021 et liquidations d’IS pour les redevables autres que les sociétés financières (secteur KZ).
En retenant le critère du taux implicite moyen de taxation des bénéfices des entreprises, c’est-à-dire, le montant effectivement versé à l’État comparé à leur base taxable (en déduisant donc les crédits d’impôt), la Direction générale du Trésor avait pu constater de fortes différences entre les tailles de sociétés en 2007 : 37,4 % pour les micro-entreprises, 39,5 % pour les PME, 28 % pour les ETI et 18,6 % pour les grandes entreprises. Refaite en 2019, l’étude montre des taux sensiblement différents et convergents : 10,8 % pour les micro-entreprises (seules favorisées), 19,9 % pour les PME, 21,3 % pour les ETI et 17,1 % pour les grandes entreprises.
Place à présent à une libération fiscale des énergies, en particulier dans les secteurs les plus exposés de l’économie
Si, contrairement aux arguments politiciens qui font régulièrement florès dans le paysage audiovisuel français, l’IS est bien réparti en fonction de la taille des sociétés, la manière dont sont organisé les impôts de production n’est pas optimale, ceux-ci continuant de toucher plus durement, même après leur baisse, certains secteurs exposés de l’économie, tel celui de l’industrie manufacturière (ce qui est d’ailleurs aussi le cas des coûts du travail) et ce au moment même où le mot de souveraineté industrielle est sur toutes les lèvres.
Il s’agit donc de poursuivre l’effort entrepris ces dernières années en prolongeant la baisse de la pression fiscale qui pèse sur nos entreprises, grandes et petites. L’expérience récente a confirmé que nous avons tous à gagner d’une telle baisse car, effectivement, elle libère les énergies de nos entreprises, leur permettant d’investir, d’attirer du capital et d’embaucher. Et, ainsi que l’illustre parfaitement le graphique ci-dessous, elle permet d’accroître—en fait, de doubler !—le montant des recettes fiscales.
[1] Au-delà des réserves à prendre en compte, liées notamment à la stabilité du taux général des prélèvements obligatoires.
[2] En plus de l’IS proprement dit, existent ou ont existé des contributions additionnelles à cet impôt, dues par certaines entreprises. Dans la mesure où elles sont assises sur l’IS, elles ont pour effet d’augmenter le taux effectif de ce dernier: il s’agit du taux facial de l’IS,
[3] Le fait que les entreprises soient considérées isolément signifie que les logiques de groupe ne sont pas prises en compte : toutes les sociétés d’un même groupe sont étudiées séparément.
3 commentaires
« ..sincèrement pris conscience..via la baisse.. »: vous plaisantez, il a baissé, mais en réalité Plus que doublé
l’impôt prélevé : bravo.
Davantage pour les TPE et PME qui payent le plus lourd tribu, les autre et surtout celles de grande taille ont les moyens de récupérer une grande partie des sommes versées sous forme d’aides dont la République de France en est la Championne du monde aussi bien part les structures nationales que par les nombreuses couches locales.
Le pire de tout cela c’est que ce sont justement ceux qui payent le plus que les crétins fainéants des administrations ne veulent plus.
Et par rapport à une entreprise qui a un siége social dans un autre pays, genre Irlande, c’est une autre histoire.