Chaque assuré social dispose d’un espace santé numérique (« Mon espace santé ») depuis 2022. Il s’agit d’un dossier médical accessible à tous les professionnels de santé (libéraux, hôpitaux, établissements médico-sociaux). Ils sont incités à utiliser les données et les services contenus dans ces espaces numériques personnels pour mieux prendre en charge les patients.
Un tel système doit aussi permettre de faire économiser du temps et de la paperasse. Pour ce qui est des économies, c’est raté.
Le dernier rapport de la Cour des comptes sur l’application des lois de finances de la sécurité sociale de 2024, qui contient un chapitre sur « Mon espace santé », rappelle que le dispositif a coûté 227 millions d’euros (M€) rien que pour sa conception et 2 milliards d’euros (2 Md€) pour financer la mise à jour des logiciels des professionnels de santé. A cela, il convient d’ajouter de nouvelles dépenses pour prévenir les cyberattaques. Le ministère de la Santé a prévu 10 M€ ; selon la Cour, il faudrait plutôt prévoir 100 M€. Encore une prévision gouvernementale erronée, semble-t-il !
Le problème est que toutes ces dépenses ne servent pas à grand-chose. Si la Sécu a ouvert un compte aux 65 millions d’assurés, ceux-ci ne sont que 15% à l’avoir activé, « sans qu’il soit établi si les personnes ayant procédé à cette activation sont celles pour qui le dispositif sera le plus utile », ajoutent les magistrats de la rue Cambon.
Le rapport est également très critique à l’égard des médecins qui font preuve de réserve pour alimenter et utiliser l’interface. Or, comme l’écrit la Cour, « Mon espace santé » ne pourra pas être un succès si les médecins restent en retrait. Pour autant, le rapport ne propose pas de solution, à part une amélioration des logiciels qui, rappelons-le, a déjà coûté 2 Md€.
Des pays arrivent pourtant à déployer de tels systèmes comme nous l’avons montré dans notre étude sur les leaders de l’administration numérique. Le Danemark, par exemple, a créé sa plateforme de santé Sundhed.dk en 2004. Elle est aujourd’hui utilisée par un Danois sur trois au moins une fois par mois. En Estonie, pays pionnier dans l’e-administration, l’ordonnance médicale en ligne est utilisée par 100 % des médecins. Peut-être aurait-il fallu s’inspirer de ces expériences pour déployer notre dispositif ?
5 commentaires
L’idée pouvait paraître séduisante de regrouper toutes les informations santé des patients mais le covid notamment laisse 1 goût amer & 1 méfiance ancrée sur le traitement et la destination des informations les lois en cours de vote sur la fin de vie augmentant ces craintes a juste titre sans doute la confiance n’est + du tout de mise
« Mon espace santé » n’est pas à moi. Il est à tout le monde : médecins, hôpitaux, soignants et correspondants. Mais aussi à la sécurité sociale, à mon assureur, à ma banque et à tous ceux qui veulent me surveiller et me contrôler. La sécurité de ce truc est un leurre, il suffit de voir tous les sites, hospitaliers entre autres, qui sont régulièrement piratés. Un progrès? Mais pour qui? Certainement pas pour les patients. S’il y a des résistances ce n’est pas pour rien.
Après ce qu’on a vécu pendant le Covid, je n’ai sûrement pas envie d’être davantage fichée par des gens qui ne m’inspirent aucune confiance. Et je ne parle même pas de leur projet d’euthanasie qui ouvre la voie à tous les abus!
Les doutes sur la confidentialité en sont très probablement la cause.
La solution viendra lorsque la puissance de la blockchain aura été reconnue pour ses vertus dans le domaine de la confidentialité et sera utilisée.
Un espace dont les titulaires ne maîtrisent ni le contenu ni l’usage qui en est fait… sans compter les attaques de hackers ! Non merci. Encore un truc inutile mis au point sans consultation préalable des intéressés, qui coûte la peau des fesses