Qui s’en étonnera ? Un rapport des inspections générales des Affaires sociales (Igas), des Finances (IGF) et de l’Administration (IGA) met le doigt sur la situation « très dégradée » de la CNRACL, la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales.
En 2023, la CNRACL a versé 23,3 milliards d’euros (Md€) de prestations vieillesse et 2,7 Md€ de pensions invalidité, soit un total de 26 Md€ alors que, dans le même temps, elle ne percevait que 24,4 Md€ de cotisations. La caisse devant aussi s’acquitter d’une contribution à la compensation inter-régimes, elle affiche un résultat négatif de 2,5 Md€. Pour mémoire, en 2017, le résultat était positif de 15 millions d’euros (M€).
La situation s’est donc dégradée très rapidement et pourrait encore s’aggraver puisque les inspections générales estiment que le déficit pourrait atteindre les 10 Md€ dans un avenir très proche si aucune mesure correctrice n’était prise.
Pourquoi une telle situation ? Plusieurs causes sont avancées : la dégradation du ratio démographique du régime (nombre de cotisants/nombre de retraités) qui est désormais de 1,46, c’est-à -dire inférieur au ratio national tous régimes confondus, qui est de 1,71 ; la contribution versée aux autres régimes en difficulté ; l’augmentation des contractuels (qui cotisent au régime général) ; un financement provenant des seules cotisations alors que de nombreux régimes complètent le leur par des taxes et impôts affectés, ainsi que par des transferts externes d’autres organismes de sécurité sociale.
Comment y remédier ? Pour les inspecteurs généraux, « les seules manières d’améliorer l’équilibre de la CNRACL sans dégrader plus encore la situation financière consolidée des administrations publiques sont de :
- mettre à contribution les employeurs publics, dans l’hypothèse où cette contribution serait financée par eux-mêmes, par une économie et non pas par de la dette ;
- mettre à contribution les fonctionnaires, soit en augmentant les cotisations des agents (ce qui signifie concrètement une diminution de leur traitement net), soit en diminuant les prestations (ce qui est constitutif d’une réforme des retraites publiques) ».
Le problème de la hausse de la contribution employeur est qu’elle « renchérira le coût relatif de l’emploi d’un agent titulaire par rapport à un agent contractuel, risquant de favoriser encore davantage la substitution de l’emploi fonctionnaire par l’emploi contractuel. La mission recommande donc la création d’une taxe sur la masse salariale des agents contractuels, dont le produit serait affecté à la CNRACL ». En gros, il s’agit de faire payer les retraites des fonctionnaires par les contractuels. Comme disait mon grand-père, « il faut au moins être sorti de l’Éna pour avoir une telle idée » ! Autre piste, qui n’est pas exclusive de l’autre : « faire reprendre la dette » de la CNRACL par l’État.
Les inspections générales proposent aussi quelques mesures paramétriques dont l’effet ne peut être que limité et provisoire. En revanche, elles ne font pas grand-chose d’une information qu’elles délivrent pourtant au lecteur, à savoir que « la population affiliée à la CNRACL a une espérance de vie à la retraite supérieure à la moyenne et bénéficie de départs anticipés dans une proportion importante ». Bref, les fonctionnaires cotisants à la caisse partent à la retraite plus tôt que le Français lambda et vivent plus longtemps que lui. Le bon sens voudrait donc que l’on mette un terme aux départs anticipés qui ne sont pas justifiés puisque les bénéficiaires ne décèdent pas prématurément. Ce ne serait que justice, mais cela ne réglera pas le problème de fond éludé par le rapport : la non durabilité (pour reprendre un mot à la mode) du système par répartition.
Igas, IGF et IGA auraient pu faire preuve d’audace en évoquant la solution de la capitalisation qui a fait ses preuves, notamment dans le cadre du RAFP (régime de retraite additionnelle de la fonction publique) dont bénéficient tous les fonctionnaires, y compris les territoriaux et hospitaliers. Mais peut-être pour cela ne faut-il pas « sortir de l’Éna » !
5 commentaires
L s agents de l’Etat cotisent 18% de leur salaire brut, les salariés du privé 25%. CQFD
On oublie, évidement volontairement, la seule réponse logique: réduire la retraite de ceux qui n’ont pas elevé d’enfant !
En effet ces retraités ont économisé toute leur vie ce que les autres ont dépensé pour elever leurs enfants et on donc du épargner l’équivalent pour leur retraite.
Il n’y a aucune raison pour qu’en plus ils soient rémunérés par les enfants que d’autres ont eu la charge d’élever.
…mais pour comprendre cela, il faut d’abord avoir bien compris le fonctionnement de la répartition, une belle escroquerie!
Je rappel à Oncpicsou que ceux qui n’ont pas eu d’enfants ont payé beaucoup plus d’impôts, beaucoup moins de droits au bénéfice des autres toujours assistés, alloc, prêt immobilier, transports gratuits et + …
Cher Gulap, vous avez oublié deux choses importantes: Lorsque vous élevez des enfants vous êtes obligé de « passer à la caisse » bien plus souvent que les autres et chacun sait que la TVA est la plus grosse contribution fiscale. J’ajoute, ce qui n’est pas anodin, qu’en plus des retraites ce sont les enfants qui paieront les impôts futurs, y compris les « droits » dont vous parlez, qui permettront à l’état de fonctionner… au profit de tous, y compris de ceux qui n’en n’ont pas élevé (et qui n’y contribuent donc pas, indirectement).
2017 correspond aussi à la suppression de nombre d emplois aidés à l’usage des collectivités, dès l’été de cette année là .
Missions supprimées ou remplacées par des contractuels ou de rares titulaires, car l’impact sur les collectivites n’est pas neutre. Il n’y a pas de miracle et le gain d’un côté se traduit par une perte d’un autre.