En réponse à la crise, les banques centrales en Europe et aux Etats-Unis ont décidé récemment d’augmenter assez fortement leurs taux directeurs. Face à une forte inflation, cette méthode est souvent utile pour ralentir l’économie, favoriser une diminution de la demande pour augmenter l’offre et ralentir la croissance des prix.
Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie, estime cependant que cela n’est pas pertinent dans le cas actuel et a comparé les hausses de taux successives à des « saignées ». « Lorsque l’on faisait une saignée à un patient, généralement, il ne guérissait pas, sauf miracle. Alors, on le saignait encore plus, et sa santé s’aggravait d’autant plus. Je crains que les banquiers centraux soient en train de faire la même chose en ce moment ». Selon lui, l’inflation n’est pas tellement due à un excès de la demande qu’à la hausse des prix énergétiques et alimentaires et aux blocages persistants des chaînes d’approvisionnement. Etant donné le champ d’action limité des banques centrales dans ces domaines, il estime que la réponse apportée est « un remède issu d’un mauvais diagnostic ». Pour lui, il faut des mesures en faveur de l’offre pour aider l’économie et non baisser la demande. Il s’inquiète des conséquences qui pourraient être contreproductives en permettant à l’inflation de persister : « cela ne va pas créer plus de nourriture. Cela va rendre les choses plus difficiles parce que vous ne pourrez pas faire les investissements ».
Allant dans le même sens, David Malpass, président du Groupe de la Banque mondiale estime que « pour parvenir à de faibles taux d’inflation, à la stabilité monétaire et à une croissance plus rapide, les responsables publics devraient réorienter leurs priorités, afin de s’attacher non pas à réduire la consommation, mais à augmenter la production. Ils devraient aussi chercher à générer des investissements supplémentaires et à améliorer la productivité et la répartition du capital, des conditions essentielles pour la croissance et la réduction de la pauvreté ». Eric Dor, directeur des études économiques à l’école de commerce IESEG, rappelle que « l’inflation a [déjà ] créé elle-même la baisse de l’activité, les ménages perdent du pouvoir d’achat, l’augmentation des salaires est inférieure à l’inflation, et représente un frein à la consommation », particulièrement pour l’Europe où les hausses de taux risquent de fragiliser encore davantage l’économie.
Certains, comme le directeur général de Montségur Finance, François Chaulet, appellent à relativiser et estiment que ces propos sont excessifs étant donné que les taux directeurs sont toujours largement en dessous de l’inflation. Toujours est-il que dans cette période difficile, si les réponses apportées partent d’un mauvais diagnostic, les conséquences pourraient être à l’opposé du résultat souhaité et rajouter des effets indésirables à une situation déjà tendue. Que l’Europe libéralise le marché de l’énergie, qu’elle désindexe le prix de l’électricité sur celui du gaz, qu’elle cesse de créer de la fausse monnaie et tout ira déjà beaucoup mieux.
3 commentaires
Tout prix Nobel qu’il est, monsieur Stiglitz ne peut pas augmenter l’offre énergétique. Celle qui est responsable de l’inflation. Ce sont les gouvernements qui ont bloqué pour longtemps l’énergie disponible et provoqué une pénurie en raison de leur volonté d’imposer des énergies intermittentes face à une demande inchangée. Générer de nouveaux investissements ne donnera pas de résultats avant 10 ans, sauf à créer immédiatement des centrales à charbon. Pour imposer des énergies peu efficientes, le gouvernement est obligé de les subventionner et donc de taxer et d’appauvrir les utilisateurs. Les banques centrales n’ont pas d’autres choix que de prendre note de la volonté des gouvernements de réduire l’offre. Leur seul levier d’action est d’augmenter les taux pour réduire l’inflation dont elles sont le garant, et préserver la monnaie. Leur fonction n’est pas d’intervenir sur les choix énergétiques décidés par les gouvernements et par le vote des citoyens.
Très bonne analyse. On voit ici apparaître la médiocrité idéologique fasse à la puissance de la réalité. Mais avec Le Maire, les français vont continuer à rêver tout en attendant leur « 100 balles ».
Et si nos crétins de gouvernants acceptaient de baisser les dépenses publiques à 30 % du PIB au lieu de 70 % ! Et l’on s’étonne ???