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Les Bouches du Rhône, symbole du malaise français

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Dans le département qui accueille la belle ville de Marseille et sa Bonne Mère, Marine Le Pen a fait un score de plus de 27 % et Jean-Luc Mélenchon, de plus de 22 % ce 23 avril. En ajoutant les candidats de gauche « ultra », on arrive à plus de la moitié des votants qui ont donné leur vote à un parti de type socialiste d’extrême gauche ou d’extrême droite. Pourquoi ?

Comme celui de Monsieur Mélenchon en effet, le programme de Marine Le Pen est d’essence socialiste et nationaliste (même s’il ne s’agit, heureusement, pas de national-socialistes « à l’allemande »). Leur conception collectiviste du politique fait que du nationalisme au socialisme il n’y a qu’un pas ; et vice versa.

Ce type de résultat traduit un malaise profond de la société française. Et plutôt que de stigmatiser et montrer du doigt, il parait plus constructif, pour ceux qui chérissent la liberté et abhorrent le collectivisme, de droite comme de gauche, de tenter de « comprendre l’incompréhension », et remonter ainsi aux racines des maux sociaux, réels, qui génèrent ce malaise. Pourquoi la haine du « patron », pourquoi la haine de « l’arabe » ? Réaction naturelle au libéralisme économique, pardi ! Au libéralisme en matière d’immigration ! Toujours ce « sale libéralisme » répondront les électeurs de « Marine » et « Méluche ».

J’ai grandi à Marseille et travaillé dans ses quartiers « chauds » en ZEP au milieu de cités ultra-violentes. La pauvreté est bien là, avec sa détresse sociale, morale, économique, le chômage, la violence, l’exclusion, les fins de mois difficiles – mais aussi les débuts et les milieux de mois, le communautarisme. Le taux de pauvreté atteint les 25% à Marseille, le chômage, officiellement, près de 19 %. Et encore, une partie du chômage est cachée dans tous ces boulots aidés en associations et multiples programmes, très souvent inutiles et coûteux.

« L’intégration » est difficile : repli identitaire « musulman », sentiment anti-français, (combien de fois n’ai-je pas entendu « La confiance n*que la France » ? ). Les travailleurs africains, en particulier maghrébins, qui dans les années 50 travaillaient dans la construction, et notamment à faire ou refaire les routes « françaises », vivaient à l’époque dans les bidonvilles qui poussaient dans les quartiers nord. La décence voulait qu’on les loge de manière humaine. Avec le regroupement familial, ce sont des familles entières qui sont arrivées. Elles auraient dû pouvoir s’intégrer, comme l’avaient fait avant elles les Espagnols, les Portugais ou, comme ma famille, les Italiens, dans la première partie du vingtième siècle. Mais le nouveau contexte institutionnel (plus que « la religion ») a changé la donne comme on le verra.

À côté de certaines zones relativement dynamiques, comme autour d’Aix-en-Provence, une spirale de décroissance (concept merveilleux pour certains, paraît-il…) submerge de nombreux « quartiers ». Et le chômage y touche toujours plus les « français de souche » comme dirait l’extrême droite. Pas assez d’entreprises, pas assez d’emplois. « Les patrons égoïstes n’embauchent pas, les arabes nous piquent notre boulot ou vivent des allocs ». Tout cela la faute au libéralisme ?

Évidemment dans un pays à 57% du PIB de dépense publique, 47 % de prélèvements obligatoires où un salarié moyen coûte à l’entreprise deux fois son salaire net, et qui régule à tout va, une telle affirmation devrait faire spontanément sourire. Mais les gens ne savent pas. Ils ne savent pas combien leur coûte économiquement (et donc socialement) leur cher système social, leurs chères régulations, leur chère administration, leurs chères subventions. L’ignorance est minutieusement cultivée par les politiques qui en tirent leur pouvoir. Les réflexes simplistes sont donc d’autant plus aisés chez « les gens ». En cela d’ailleurs, les étatistes « démocrates » du front républicain sont tout autant à blâmer que les extrémistes. Car c’est bien l’interventionnisme – allez, lâchons le mot : le socialisme – qui est au contraire à l’origine de tout ce malaise.

Socialisme local, qui consiste à socialiser un maximum l’action collective en arrosant de subventions la moindre association ou la moindre initiative du « peuple » ou des « gens », le but étant évidemment de se constituer une clientèle électorale et/ou d’asseoir son pouvoir bureaucratique. Si Marseille est championne de l’arrosage en subventions, elle est aussi un symbole de la magouille politique. Après la guerre, un contrat tacite est passé entre socialistes et communistes : le port pour ces derniers (ce qui a permis à ce port jadis dynamique d’être gangréné par une mafia cégétiste et de reculer sans cesse dans les classements) et la mairie pour les premiers. Le passage à droite n’a pas véritablement fait bouger les lignes. Les traditions ont la vie dure.

D’un côté on empêche, on entrave, comme la récente mésaventure du génial inventeur du flyboard Franky Zapata, à Martigues, l’a montré, voire on rackette, et d’un autre côté on redistribue. Cela duplique le socialisme pratiqué au plan national : on crée d’un côté des tas de régulations, fiscalités et autres joyeusetés pour entrepreneur, qui empêchent curieusement le dynamisme et l’intégration économiques, et on « compense » d’un autre côté avec une redistribution instaurant la dépendance. Les gens sont pris en tenaille dans des trappes à pauvreté. La redistribution tous azimuts a pour vertu d’éviter que la cocotte n’explose. Mais comme les scores électoraux l’ont montré, l’eau boue. Elle bout parce que ce système socialiste, en générant l’irresponsabilité à la fois du politique et des « administrés » construit durablement la défiance : c’est donc « la faute de l’autre, du patron, de l’arabe, du français, de l’Europe ».

La solution n’est pas dans plus de politique mais moins ; pas dans plus de socialisme, mais moins ; pas dans moins de liberté, mais plus : davantage de société civile, d’habitude de vivre ensemble, d’autonomie et de responsabilité personnelle, de solidarité volontaire, d’action collective et d’initiative économique « d’en bas ». À Marseille comme ailleurs. C’est la seule voie possible vers une France réellement « apaisée ».

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