Dans le cadre d’une rencontre mondiale des Mouvements populaires tenue le 16 octobre, le pape François s’est aventuré sur le terrain économique de façon très politique. Avec une force et une clarté encore sans doute inégalée dans ses propos précédents, il a demandé de dépasser les modèles socio-économiques actuels, fondés sur le marché et la liberté des échanges, qualifiés de systèmes « écocides et génocidaires ». Pêle-mêle, il a, « au nom de Dieu » (répété dix fois), fustigé la mondialisation, requis la libération des brevets sur les vaccins, l’allègement de la dette des pays pauvres… Il a proposé la mise en place d’un revenu de base ou d’un salaire universel afin que chacun ait accès « aux biens les plus élémentaires de la vie », et une réduction de la journée de travail afin de faciliter l’accès aux emplois.
Peut-on dénoncer la libération rapide et considérable des échanges mondiaux qui a contribué à la baisse de la pauvreté ?
Un pape ayant autant de qualités intellectuelles, morales et spirituelles devait-il s’aventurer dans une harangue programmatique et, par-là , réductrice autant qu’utopique et dangereuse pour les plus pauvres ? Certes, il est heureux d’avoir dans une société des « poètes sociaux » comme les appelle le pape François, pour « créer l’espérance » et la dignité. Certes, le Saint Père a raison de dénoncer les systèmes fondés « sur l’exclusion et l’inégalité, le rejet ou l’indifférence ; où la culture du privilège est un pouvoir invisible et irrépressible, et où l’exploitation et les abus sont comme une méthode habituelle de survie. » Il prêche opportunément pour la solidarité et pour « la subsidiarité, qui s’oppose à tout schéma autoritaire, tout collectivisme forcé ou tout schéma étatique ».
Mais peut-on dénoncer si généralement la libération rapide et considérable des échanges mondiaux qui a permis que depuis la fin de la guerre froide, en moins de quarante ans, le taux d’extrême pauvreté passe de 40 % à 10% d’une population mondiale ayant augmenté pourtant sur cette même période de plus de 50% ? La mondialisation a sauvé des peuples de la faim en même temps qu’elle créait d’autres exclusions, mais il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Le pape François déplore à juste titre que la Covid ait entrainé « vingt millions de personnes supplémentaires […] dans des niveaux extrêmes d’insécurité alimentaire ». Précisément, cette dégradation est due, de confinement en confinement, à la baisse des échanges mondiaux qui a privé des pays pauvres de débouchés et augmenté le prix de certains produits.
L’économie est plutôt une œuvre de construction commune. Plus on travaille, plus on crée de richesses partageables.
Quand le pape demande que chacun travaille « moins pour permettre à un plus grand nombre de personnes d’accéder au marché du travail », il en reste à cette idée que l’économie et le travail sont des gâteaux à partager de telle façon que ce que chacun reçoit, il le prend à l’autre. Sauf que l’économie est plutôt une Å“uvre de construction commune. Plus on travaille, plus on crée de richesses partageables, de besoins qui requièrent toujours plus de travail pour les satisfaire ; tandis que moins les gens travaillent, moins ils gagnent, moins ils dépensent, moins il y a d’offre de travail et plus tous s’appauvrissent. La réforme Aubry l’a démontré en France. L’économie n’est pas un jeu à somme nulle, mais au contraire un système de régression ou progression plus que proportionnelles, algébriques plutôt que géométriques. Et la croissance, fondée sur l’innovation et le travail, a sorti le monde de la pauvreté. Distribuer de l’argent sous forme de revenu universel revient à tuer la valeur travail et l’initiative, et à gonfler la masse monétaire sans créer autant de produits à offrir sur le marché en contrepartie, ce qui détruit la boussole des prix et des salaires et peut générer très vite des déséquilibres producteurs d’inflation au détriment des plus pauvres.
Par ailleurs, la force civilisatrice de l’évangile s’est fortifiée dans l’édification du principe « rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». Cette séparation de la Cité de Dieu et de la Cité des hommes a mis un obstacle aux despotismes nourris de la confusion et de l’appropriation de tous les pouvoirs. Elle a permis aux libertés de s’épanouir dans le long combat qui a conduit, des papes Gélase 1er à Grégoire VII et Léon XIII, à la balance des forces et au respect mutuel du spirituel et du temporel. Ces deux cités sont nécessairement enchevêtrées observait Saint Augustin, mais chacune a son ordre. Et celui de l’économie, tâtonnant sur l’imperfection humaine, n’est pas celui de la foi qui croit déjà la Vérité qu’elle espère. Il ne peut donc pas y voir de catalogue des mesures économiques à instaurer « au nom de Dieu » sans risquer de faire disparaître les limites sur lesquelles repose l’équilibre de toute société libre et ouverte.
Faut-il rappeler que le Bon Samaritain était un homme riche ?
Enfin faut-il rappeler que le Bon Samaritain était un homme riche, sinon il n’aurait pu laisser à l’aubergiste les pièces d’argent nécessaires à l’hébergement de celui qu’il avait secouru. Le pape François, qui aime à le donner en exemple, a bien raison de rappeler aux riches leurs devoirs moraux et la valeur très relative de l’argent. Mais cette parabole explique aussi que la société ne secourra pas les pauvres sans le concours des riches. Et quant à vouloir désormais que se lèvent des « Samaritains collectifs », sans méconnaître les vertus du collectif, ne nous abandonnons pas à ses mirages, n’oublions pas, encore, l’enseignement de saint Augustin selon lequel « le bonheur de la cité ne procède pas d’une autre source que celui de l’individu ».
18 commentaires
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Un excellent et édifiant commentaire.
On voit ici le pape s’essayer bravement à un domaine qu’il ignore, avec des conceptions surannées. Dommage car, sur le fond, cette société qui s’individualise de jour en jour, pourrait faire beaucoup mieux pour secourir son prochain.
Cet effort du pape eût été vraiment ENTENDU avec l’expertise d’hommes de l’art. Aujourd’hui, l’improvisation sincère ne saurait plus avoir cours, pour faire porter sa voix…
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Une corecte intervention, de la parte du Pape!Le seul defendeur des travailleurs , et des pauvres!
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Le Christ demande à celui qui veut le suivre de tout vendre et de le suivre.
Luc 18:25
Car il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu.
Le Pape ne se soucie pas des conséquences économiques et de la rentabilité comme le Christ ne s’en souciait pas. Seul le royaume de Dieu compte.
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Rendez à Dieu ce qui est à Dieu et à César ce qui est à César.
Manifestement François a fixé ses priorités. elles sont très claires, ce sont celles d’un vulgaire ONG caritative…
Peut être pourrait il d’abord s’occuper de l’Eglise, ce pourquoi il a été élu ?
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Le pape François se comporte de plus en plus comme un influenceur, voire un agent du gouvernement mondial.Notre premier ministre est-il allé à Rome pour prendre ses ordres?
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Etat des lieux réaliste. Hélas. Dommage que les prescriptions généreuses ignorent la leçon tragique que l’histoire du XXme siècle nous a donné sans exception aucune (sur 45 ou 46 pays qui, ont tenté l’aventure) : si l’on supprime (et nous seulement « régule ») les libres échanges, c’est à dire le « marché », celui-ci est inévitablement remplacé par une « organisation » de « commissaires politiques » totalitaire et prédatrice.
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Je suis catholique et croyant mais pas en ceux qui nous prêchent la bonne église et qui, il fût un temps volaient et pillaient le peu de richesse que détenaient le peuple.Il faudrait abolir toutes les religions, je dis bien toutes les religions créés par l’homme. Tout les conflits mondiaux sont à la base religieux. Le pape et tout ceux qui l’entoure principalement au Vatican, sont très mal placé pour donner des cours d’économie, il est, avec toute sa bande de chaperons rouges assis sur une mine d’or avec laquelle il pourrait certainement nourrir une bonne partie de la terre.
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Si on efface la dette des pays pauvres, la France devrait être concernée. C’est pourquoi Castex était au Vatican il y a quelques jours…
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
LE PAPE comme c’est bien dit il a une lourde tâche c’est de son devoir de parler ce qui ruine le monde et même que LINCOLN AVAIT EXPLIQUE QUE LE RICHE SI IL ETAIT HONNI LE PAUVRE PERECLITAIT ENCORE PLUS !!!
relire les 10 paroles n’est pas superflu puisque certaines nous restent encore non comprises
l’épée d’un vaillant vient de surgir de la mer et je dis ne profanont pas les mers et ne profanont pas le cosmor LE MONDE LUI APPARTIENS !!!!
nous sommes de passage sur cette terre IL n’a pas besoin de nous si nous ne savons pas aider le plus faible !!!!
amities
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Le Pape est suffisamment intelligent pour comprendre tout celà .
Dans ces conditions, quel est le. But de cette harangue? A qui veut-il plaire?
Le monde crève de vouloir partager avant que d’avoir produit.
Il faut laisser les hommes vivre.
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Pour l’exemple français il existe une captation de ressources pécuniaires considérable qui pourrait servir les dessins du Pape, j’ai nommé le nombre ahurissant de fonctionnaires en surnombre (inutiles et même nuisibles) ainsi que leurs non moins nombreux collatéraux . . . . (3 à 4 millions?)
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
progression plus que proportionnelles, algébriques plutôt que géométriques.
Les progressions arithmétiques ou algébriques sont proportionnelles. Ce sont les autres qui sont plus que proportionnelles, il me semble.
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Bonjour,
Faut-il se souvenir ? du rôle fondamental des papes dans la construction du monde moderne : passage de la faim à la campagne à l’abondance en « ville ».
– des papes post grande peste de 1350, avec le Vatican multinationale du monde catholique permettant le développement des comptabilités dans ces sociétés agricoles  » pauvres ».
– des papes Médicis , avec Florence tête de pont de la partition « financière » du temps.
– Saint Paul hors les murs :  » la fin du monde ».
François, constate ex cathedra de  » mauvais » fonctionnement(s), il semble oublier la très nette cassure César vs Dieu, pourtant, une analyse moderne du fonctionnement économique fondé non plus sur les  » prix » et pour causes, mais sur les valeurs ajoutées, joint à la réelle compréhension des intérêts composés permet d’autres chemins assurant une meilleure protection à 99 % des entreprises.
Mais, ne rêvons pas les chapelles de l’ancien monde donnent toujours le  » la » , bonjour les dégâts.
Cordialement
jacques
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Malgré tout le respect que j’ai pour le Pape ( je suis catholique et pratiquant ) , je ne peux , hélas , que constater qu’il s’aventure , un fois de plus , sur un terrain qui lui est étranger , qu’il ne connait pas , avec des idées simplistes , et , en un mot , stupides!
Son magistère est le Gouvernement de l’Eglise du Christ , et non le Gouvernement des hommes.
Le royaume de Dieu n’est pas de ce monde, et il dégrade l’Eglise en la ramenant à une ONG, avec , au surplus , des propos d’un autre âge, complètement dépassés.
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
J’ai l’impression que le pape François a une faible compréhension de l’économie. Il devrait s’abstenir d’intervenir dans ce domaine et s’en tenir au spirituel.
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Nom de Dieu ! De quoi se mêle-t-il ?
A-t-il seulement indiqué ce qu’il allait faire avec les milliards planqués au Vatican !!!
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Toujours aussi étonnant ce pape. Plus politique utopique que réaliste! Invitant les catholiques selon son cÅ“ur à s’engager dans les mouvements collectivistes. Décidément nous pouvons regretter ses prédécesseurs beaucoup plus raisonnables.
N’oublions qu’il reprochait à JPII de ne pas admettre la théologie de la libération qui d’après lui aurait permis en Amérique latine de maintenir les églises pleines, alors qu’elles étaient (et sont encore) vidées par les évangélistes à la sauce américaine qui prônent l’enrichissement personnel plus que le partage à la Castro!
Avons-nous besoin d’un pape économiste « Au nom de Dieu »?
Ce pape se trompe de mission
Au lieu d engager les réformes qui sauveraient l Eglise dont il a la charge, il se coule complaisamment dans les fleuves du politiquement correct ; qui sur le plan de l effet de la liberté des échanges nie une réalité que l auteur de ce remarquable article rappelle à très juste titre et avec une modération de ton qui l honore .
Son Église est en train de mourir, faisant disparaître un des piliers importants de l ordre du monde . Quelle réforme engage t il ? Face aus affaires sordides qui achèvent de ruiner la religion catholique qu attend il pour mettre des contre pouvoirs en place, mettre les femmes à égalité, secouer de grand corps malade qui sent le rance et dans lequel se perdent tant de vocations lumineuses ?