La fameuse taxe Tobin revient à la mode. Dans le cadre du G 20 ou de l’Eurogroupe on prévoit d’imposer les transactions financières. C’est une absurdité, plaide Maître Thierry Afschrift, avocat fiscaliste de Bruxelles et administrateur de l’IREF.
La taxe dite Tobin, destinée à frapper les opérations financières, était, il y a quelques années encore, une revendication propre à quelques associations altermondialistes, telles ATTAC.
Aujourd’hui, on trouve en Europe des partis se prévalant étrangement du libéralisme, et des chefs d’Etat pour soutenir l’introduction de ce nouveau prélèvement obligatoire.
Certes, les politiciens rivalisent actuellement dans l’art de proposer de nouveaux impôts et d’augmenter ceux qui existent déjà . Comme si le mal qui frappe l’Union Européenne n’était pas précisément l’excès de charges qui nourrissent des Etats obèses et insatiables.
Les arguments des partisans d’une telle taxe témoignent d’une méconnaissance des marchés. Inciter par une taxe, à ne pas intervenir sur un marché, c’est empêcher les transactions d’avoir lieu, et fausser le marché. « Lutter contre la spéculation », ce n’est pas autre chose qu’empêcher l’expression de la vérité des prix. Le terme « spéculer » – qui veut dire « miroir » désigne, non pas le joueur, mais celui qui agit d’une manière réfléchie. Lorsque cette réflexion l’amène à la conclusion qu’une valeur, fût-elle la dette d’un Etat, est surévaluée et qu’il la vend, c’est le résultat d’un raisonnement, d’ailleurs souvent exact. Les spéculateurs ont bien compris cette réalité économique : la dette de la Grèce implique un risque, pas celle de la Suisse.
Le plus étonnant est toutefois que ceux qui combattent cette taxe ne le font que mollement, et sur la base d’arguments qui ne remettent pas en cause sa légitimité.
On se borne à affirmer soit qu’elle est impossible à mettre en œuvre, parce qu’elle devrait l’être partout dans le monde au même taux, soit qu’elle ne serait pas efficace. Jamais on n’entend un politique affirmer que cet impôt serait injuste. Comme si d’office toute ponction réalisée par les Etats trouvait sa justification dans le fait que ceux-ci peuvent chasser tout ce qui passe sur leur territoire …
Triste constatation alors qu’une taxe sur les transactions financières serait aussi injuste que le sont les droits de douane, eux aussi perçus du seul fait qu’une transaction – cette fois commerciale – passe au-delà d’une frontière.
A une époque où les vertus du libre échange ont procuré la prospérité à de très larges couches de la population dans le monde entier, l’engouement pour une éventuelle taxe Tobin ne peut trouver d’explication que dans la vieille rengaine selon laquelle il faudrait « taxer les riches ». Et encore, on omettrait ainsi de constater qu’une taxe sur des transactions – même si le fait d’être financières les désigne à l’opprobre – est sans rapport aucun avec la capacité contributive, et ne répond à aucun impératif de justice.
7 commentaires
« taxer les riches »
Force est d’admettre que ce sont les riches, les banques, qui nous ont plongés dans cette crise financière.
Le marché se régule de lui-même tel est le credo que nous avons entendu.
Mais le marché, ce sont des hommes qui l’établissent et qui ne sont pas toujours vertueux. Ils spéculent comme vous dîtes de manière réfléchie, peut-être aussi comme le joueur de tiercé qui spécule aussi de manière réfléchie.
Le plus grand danger d’une taxe Tobin ne serait-il pas de donner aux banques l’impression de devenir vertueuses ? Une fois payée la taxe de continuer voire d’amplifier les errements qui nous ont conduits à la situation actuelle, d’autant plus que pour sauver le système la dette privée des banques a été transformée en dette publique.les banques ont-elles modifié leurs pratiques depuis la crise?
Je ne suis qu’un simple citoyen qui ne connaît en économie que la gestion de sa retraite.
taxer les riches
Bonsoir ,
Pensez vous que les hommes qui nous gouvernent sont plus vertueux que ceux qui utilisent les marchés, comme vous et moi tout simplement en regardant le prix des produits dans les commerces et en achetant là où se trouve notre intérêt bien compris?
Le marché de l’argent , c’est comme le marché des biens et services ou celui des matières premières,tout simplement.
Une nouvelle taxe rendra l’argent plus cher. Et qui emprunte? Le « pauvre » ou le « riche »?
Donc le pauvre paiera son crédit plus cher, l’intermédiaire fiscal s’enrichira (l’Etat) et le riche (prêteur ou épargnant comme vous voulez) percevra une rémunération inchangée.
Si d’aventure on veut réduire sa part, le riche partira vers des contrées ou des solutions plus favorables à ses intérêts…et il n’aura pas tort.
Vous feriez comme moi le même choix à sa place.
Un peu de politique
On peut flairer que les hommes politiques, de gauche comme de droite, sont timorés dans leur critique de la taxe sur les transactions financières, tout simplement parce que cette idée est « populaire », c’est à dire qu’elle rassemble un consensus trivial.
Il est tellement « évident » que les transactions financières concernent les « riches ». Comme toute les idées trop simples, elle ne résiste pas à l’analyse. Hélas, il ne s’élève pas beaucoup de voix pour expliquer. Expliquer que, in fine, une taxe est toujours payée par le consommateur final, qui est un individu. En l’occurrence, une taxe appliquée sur les transactions d’un fond de pension sera tout simplement payée par des pensionnés. Si elle est appliquée sur les transactions d’un fond de placement, elle viendra en réduction de la performance des épargnants. Si elle est appliquée aux transactions d’une banque pour son propre compte, elle vient en déduction de ses bénéfices et donc de ses impôts sur les sociétés. Tout cela fait que l’Etat n’aura « in fine » rien gagné, mais qu’on aura probablement payé des gens supplémentaires, juste pour traiter un nouvel impôt absurde.
Il est plus facile pour un homme politique de se débattre avec des arguments techniques que de faire le métier noble entre tous, la politique, qui consiste à faire des choix dans la conduite des activités humaines et à les expliquer. Au contraire, la plupart choisir de se laisser porter dans le sens du courant, de flotter avec le consensus général qui affirme naïvement que la taxe sur les échanges financiers est une bonne idée.
Droits de douane
les droits de douane ne sont pas réellement une taxe injuste. Ils protègent les pays à hauts salaires de l’invasion des produits provenant des pays à faible coût de revient . le libre échange peut ruiner l’industrie des pays développés jusqu’à entraîner le chômage et la disparition totale de certaines industries dans ces pays.
Il faut instituer des droits de douane inversement proportionnels au niveau de vie des pays dont proviennent les produits importés, ce n’est que justice et rééquilibrage !
nouvelle taxe « tobin »
Mais quand va t-on enfin écrire sur les murs que ce sont les contribuables qui font les sacrifices d’une partie de leur liberté en acquittant l’impôt et non pas l’Etat?
Faut-il conseiller la Suisse, l’Australie ou les îles caïmans à toutes celles et ceux qui en ont assez de jouer aux serfs?
Bonjour,
Beaucoup de
Bonjour,
Beaucoup de personnes oublient que la taxe sur les transactions financières vise à ne plus rendre profitable les mouvements hautement spéculatifs. Par le savoir de chercheurs financiers et informaticiens, des transactions sont automatiques à la vitesse de la nanoseconde, le but consistant à aller plus vite que l’établissement de l’équilibre entre l’offre et la demande par les institutions financières, et par conséquent à les anticiper. Les montants faramineux mis en ligne permettent des profits importants même si le différentiel est faible entre l’anticipé et la réalité. Ceci n’a rien à voir avec la concordance entre les réalités financière et économique, à charge, pour les respecter, d’établir une juste taxe qui ne soit pas aussi, à court ou moyen terme, qu’un prétexte à ponctionner de l’argent.
Taxe Tobin
Vous confondez 2 élèments importants : l’investissement en bourse à moyen terme voire long terme (qui est une très bonne chose)et la spéculation qui ruine nos entreprises car elles n’investissent plus : Les spéculateurs ne souhaitant pas la bonne forme de l’entreprise mais le gain à très court terme.