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AFITF-Ecotaxe – L’autre scandale à 900 millions !

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L’État va devoir trouver 900 millions d’euros pour garantir les engagements pris par l’AFITF – Agence de financement des infrastructures de transport de France.
Encore un scandale fiscal pour le gouvernement ?

Ces derniers jours, l’éco-redevance pour les poids lourds, ou écotaxe, cristallise à elle seule un sentiment général, celui d’une overdose fiscale. Relique du Grenelle de l’environnement, ce nouvel impôt, devait s’appliquer dès 2014 sur les poids lourds de plus de 3,5 tonnes empruntant les réseaux routiers non concédés et se répercuter sur les prix à la consommation. Les recettes de cette nouvelle taxe étaient destinées à la modernisation de nos infrastructures. On notera au passage la logique écologique de ce nouveau prélèvement : taxer les poids lourds polluants pour subventionner essentiellement l’infrastructure ferroviaire, car le train, lui, est propre.

L’affaire a tourné à la débâcle politique, mais pour autant les séquelles financières sont toujours là. Voilà une face cachée de l’écotaxe peu connue, et que nous nous proposons de rappeler.

Les dépenses non financées par l’écotaxe

Fin 2003, un comité ministériel décide de la création d’une Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). Opérationnelle en 2005, celle-ci a pour but de coordonner le financement des projets d’infrastructures sur le territoire. C’est son seul objectif car elle n’a pas vocation à intervenir dans la maîtrise d’ouvrage. Ses dépenses de fonctionnement n’ont donc rien d’ostentatoire ; l’Agence occupe quelques 112 mètres carrés au sein du ministère des Transports dans l’Arche de la Défense à Nanterre et compte 3 ETP (équivalent temps plein) pour effectif. Jusque là, rien d’anormal ! Au contraire, on pourrait croire que cette agence gère avec grande rigueur son personnel et rationalise ses coûts de fonctionnement. En réalité, le problème vient de son mode opératoire et de son financement.

Comme nous l’avons remarqué plus haut, l’AFITF est chargée d’affecter les ressources qui lui sont attribuées à la construction de routes, de voies ferrées ou encore de voies fluviales. Et les budgets sont loin d’être négligeables. Le tableau ci-dessous indique les emplois et les ressources de l’Agence.

Tableau Charges – Produits, Exercice 2012, AFITF
Charges BP DM2 CF Produits BP DM2 CF
Personnel 172 172 97 Subvention de l’Etat 1030365 939065 900000
Fonctionnement 2424 2569 2493 Ressources fiscales ou affectées 918000 1024719 1005543
Intervention 2117832 2190187 1856125 Ressources propres et autres 1532 1533
Total des charges 2120427 2192927 1858715 Total des produits 1948365 1965317 1907076
Résultat 48361 -172062 -227610
en milliers d’euros

La première colonne représente le budget primitif (BP), la seconde les décisions modificatives (DM), liées aux lois de finance rectificatives. Enfin, la troisième colonne, celle qui nous intéresse, nous renvoie au budget effectivement exécuté (CF).

Source : Rapport annuel 2012, AFITF

Les crédits de paiements (4ème colonne, 3ème ligne), c’est-à-dire les dépenses engagées au cours de l’année 2012, sont évalués à près de 1,9 Md€. Comment de telles dépenses sont-elles financées ? Intéressons-nous à la colonne des produits. Nous avons surligné en bleu la première ligne, qui correspond à une subvention directement reçue de l’État. De quoi s’agit-il ? Tout simplement, d’une subvention qui couvre un manque à gagner subi par l’AFITF, première bénéficiaire de l’écotaxe. Autrement dit, l’Agence dépense les recettes d’une taxe encore non collectée. Et ce depuis quatre ans ! Une somme conséquente : plus de 4 Md€ et près de 50 % des recettes annuelles assurées par une subvention de l’État. L’Agence est donc sous perfusion depuis 2009, laquelle est due au retard de mise mise en place de l’écotaxe.

Évolution de la subvention budgétaire de l’État (2009 – 2010)
Année 2009 2010 2011 2012 TOTAL
Subvention budgétaire 1 228 539 634 914 653 495 974 365 429 900 000 000 4 079 558 558
Part de la subvention[[en % des recettes depuis 2009]] 47.70 43.11 42.60 47.19 45.88
Source : Rapport annuel 2012, AFITF

Une « période transitoire » durable

Si l’on récapitule, nous avons une subvention directe de l’État qui sert à financer des dépenses d’infrastructures validées par une administration publique dépendant du ministère des Transports et dont l’équilibre comptable doit être assuré par un impôt encore inexistant. Avec le nouveau recul sur la mise en place de cette taxe par le gouvernement Ayrault, ce sont 900 millions d’euros que l’État va devoir trouver pour assurer la pérennité des engagements pris par l’AFITF. Pour résumer, c’est près d’un sixième des nouveaux impôts prévus par la loi de finance 2014, soit 900 millions d’euros, qui est absorbé par le déficit chronique de cette administration.

Déjà en 2009, ce mode de financement n’avait pas échappé à la Cour des Comptes, qui définissait l’AFITF comme « un outil administratif qui voit circuler des crédits qui partent du budget général avant d’y retourner ». Les Sages de la rue Cambon préconisaient déjà son démantèlement car l’Agence constituait, selon elle, « par son existence-même, un manquement au principe de l’universalité budgétaire. Ce manquement, qui n’est certes pas le premier dans le domaine des infrastructures de transport, est d’autant moins justifié que l’état des finances publiques impose de choisir avec rigueur les investissements publics. » (Un autre reproche longuement développé par la Cour).

Dans leur réponse à la Cour, les ministères concernés évoquent, en 2009, la situation transitoire de l’inadéquation entre recettes et dépenses : « Ce n’est donc qu’à titre transitoire et dans l’intervalle entre la fin de l’utilisation de la dotation initiale et la mise en œuvre de cette nouvelle ressource pérenne (éco-redevance pour les poids lourds) qu’une subvention du budget général (1 200 millions d’euros en 2009) sera nécessaire pour couvrir les dépenses de l’AFITF. Ces modalités de financement assurent l’équilibre des recettes et des dépenses de l’Agence qui ne se trouve donc pas dans une situation d’impasse budgétaire. »

Or aujourd’hui, la moitié des recettes anticipées de l’Agence sont remises en cause par le gouvernement. Si cette décision soulage les transporteurs, elle pose un risque pour le contribuable, qui, d’une manière ou d’une autre, devra financer une agence publique à l’utilité douteuse. Encore une fois, les projets d’envergure tels que ceux du Grenelle de l’environnement ont été lancés sans que le financement ait été prévu, de sorte que l’on est obligé de demander au contribuable un effort supplémentaire. L’Etat dépense en 2013 un argent qu’il espère encaisser en 2014.

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6 commentaires

gele 8 novembre 2013 - 6:29

solution simple la TIPP
La pollution routière, un problème simple : Solution simple ! Augmentation de la TIPP de 2/3 centimes d’euros ! Mais "Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué" Un scandale d’état ? non ! la logique énarchique française ! un problème une taxe…

Encore des taxes, direz-vous peut-être. Certes, mais l'idée est justement qu'il vaut mieux taxer ce qui est indésirable (la pollution, la congestion routière…) que ce qui est désirable (le travail, l'épargne). Taxer les carburants ne dit rien sur ce que l'on fait des recettes correspondantes. On peut les affecter à l'entretien des infrastructures routières, financer les collectivités locales, ou baisser d'autres impôts aux conséquences négatives, financer une allocation pour les bas revenus (dont certains pourraient être pénalisés par la hausse de taxes), affecter la recette au désendettement public, bref, n'importe quel choix, à la discrétion des priorités du gouvernement.

L'avantage ici est que le coût de perception de l'impôt est très faible. Il faut juste augmenter une taxe existante, donc pas besoin de nouveaux systèmes de collecte; la taxe est prélevée sur une assiette large (tous les utilisateurs de carburant) ce qui permet d'éviter que quelques catégories ne soient fortement pénalisées par sa hausse.
Mais comme le rappelle le célèbre proverbe shadok, ce serait dommage de faire simple quand on peut faire compliqué. La genèse de l'écotaxe poids lourds illustre ce principe de manière caricaturale. Elle trouve son origine dans la folie taxative de nos politiques.
Rendre payantes des routes qui auparavant ne l'étaient pas, mais sans que cela se voie; la résolution d’un problème qui tient de la « patate chaude », que tentent de se refiler alternativement le gouvernement, Bruxelles, etc

Il faut le répéter : ce qui est appelé "l'écotaxe" n'est pas une écotaxe; c'est un péage mis en place pour les poids lourds sur les routes auparavant non payantes. Personne ne qualifierait les péages autoroutiers "d'écotaxes" (ni le terme, ni la préoccupation, n'existaient lors de la création des autoroutes payantes en France). Le terme a été choisi uniquement pour faire passer la pilule auprès du public (dans le cadre général du "Grenelle de l'environnement").L'idée en elle-même de faire payer l'usage des routes n'est pas dépourvue de mérites; Mais des obstacles techniques font qu'il est le plus souvent préférable de choisir d'autres modes de financement des routes, sauf dans des cas bien particuliers (autoroutes, ou péages urbains comme à Londres).
A partir de là, tout a été à l'avenant. Un Partenariat Public-Privé négocié de manière précipitée, dans des conditions douteuses; des statuts dérogatoires accordés en fonction de considérations électoralistes; la copie du système allemand, qui lui-même est fort coûteux, mais qui est surtout chargé de compenser la gratuité des autoroutes dans ce pays; transposé en France, cela fait que l'assiette de la taxe devient trop faible, qu'il faut donc l'appliquer aux transports de 3.5 tonnes; au final, une collecte de la taxe ahurissant ! Qu'il faudra verser quand même à l'entreprise privée chargée de sa collecte. Il est loin, le temps où l'on guillotinait les fermiers généraux.
Bienvenue en Kludgeocratie : recette prévisionnelles 1,2 milliard ! frais de collecte ! 240 millions ?????????
Comment en arrive-t-on à fabriquer de telles usines à gaz? Dans un récent essai consacré aux USA, Steven Teles a qualifié de "kludgeocratie" cette forme de gouvernement de bricolage, qui aboutit à traiter des problèmes simples avec des dispositifs improvisés, créant un système de plus en plus compliqué et au bout du compte ingérable. Cela résulte de l'idéologie – la croyance en un secteur privé toujours plus efficace que le public, et le managérialisme – et de la multiplication des contraintes imposées à l'action des gouvernements (les PPP résultent de la volonté de dissimuler l'endettement public, limité par les traités européens). Mais aussi la volonté de dissimuler les gagnants et perdants de cette complexité. Il est probable que les conditions léonines d'administration de l'écotaxe n'auraient jamais été dans l'actualité sans le contexte et les manifestations bretonnes. C'est enfin le poids d'une politique déterminée de plus en plus par les cabinets de consultants aux yeux rivés sur les sondages; Il est difficile d'annoncer des taxes sur les carburants lorsqu'on a fait de leur diminution une promesse électorale.

Quand on naît con , on est con" dixit Brassens ; et Michel Audiard : " Les cons ça ose tout, même que c'est à ça qu'on les reconnaît"……

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Richard C. 9 novembre 2013 - 1:16

le scandale de trop!
l'ecotaxe est condamnable sur la forme, le racket des travailleurs productifs, et sur le fond car l'armée de parasites que vous décrivez fait tout contre le genre humain et rien pour la nature.
Le CO2 était présent dans l'air avant la formation des combustibles fossiles et son recyclage ne saurait induire de réchauffement climatique.
la fumée des camions, c'est celle de la soupe que mangent nos enfants, ne l'oublions pas!
Donc les cancres gaspilleurs de AFITF doivent être mis en prison pour escroquerie et sabotage, jusqu'à remboursement complet de l'argent volé!

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Néné 9 novembre 2013 - 2:05

Coût de recouvrement de l'écotaxe.
Effectivement le coût de recouvrement de cette taxe est scandaleux. Selon les informations données il serait de 20% de la taxe.
Il aurait été beaucoup plus simple d'augmenter le TIPP sur le gazole et surtout beaucoup plus économique.
Mais nos dirigeants n'ont appris qu'à créer de nouveaux impôts, taxes ou redevances et jamais à gérer de façon économique.

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Paul C 10 novembre 2013 - 7:31

L'entreprise ETAT est-elle gérable ?
Voici un très bel exemple illustrant le hiatus entre budget (son élaboration et son vote par des gens sans formation économique pour la plupart) et la réalisation sans comptabilité numérique.

Engagements ? qu'est-ce que ça veut dire ? Sur combien de temps et combien par an ou par mois ? Y a-t-il pendant la même période de dépenses des retours sur investissement ? Combien ? Payés par qui ? Contrôlés par qui ? Avec quel programme ? etc. On retrouve la même imprévision non ou mal chiffrée en ce qui concerne les retraites de fonctionnaires : Combien sont-ils aujourd'hui . Combien seront-ils demain ? etc. L'entreprise ETAT est-elle gérable ? Et comment ? Surtout pas par des Enarques, semble-t-il !

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Lexxis 24 novembre 2013 - 7:36

SANS PORTIQUES ET SANS ECOMOUV!
On relève régulièrement les kilométrages de tous les véhicules concernés. On en déduit ceux effectués en France sur des voies à péage et justifiés par une facturation d'autoroute, ainsi que ceux effectués à l'étranger attestés par des bornes de passage obligatoires aux frontières (les usagers n'ont pas intérêt à les éviter à la sortie et au retour les recoupements et contrôles sont toujours possibles par verbalisation des contrevenants sur la base de la centralisation en temps réel des immatriculations censées circuler à l'étranger). Les tarifs peuvent parfaitement être modulés selon les véhicules et selon le fret.

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jlr 28 janvier 2014 - 5:20

non a l'ecotaxes
NON!!! le transport routier n'a pas a financer d'autre mode de transport sous prétexte de pseudo écologie je ne suit pas du tout convaincu que ces transport soit plus écologique que le transport routier et s'ils n'attendent que des aides pour survivre et bien qu'il disparaissent car il sont ni compétitif ni rentable et qu'ils coûtent cher aux contribuable français dont je fait parti dans le transport routier il y a déjà la taxe a l'essieu qui ne devrais servir seulement qu'au infrastructures routières. Si l'on devais créer une nouvelle taxe je l’appellerais " l’infra taxe " et je l’appliquerais qu'au seul véhicules étrangers empruntant nos axes routiers et elle ne devrais servir uniquement qu'a l'entretiens et a la sécurisation des axes routiers quant on vois l’état de notre réseau secondaire on se croirais a l'poque ex Allemagne de l'est a la chute du mur et je sait de quoi je parle quant je vois les auto via en Espagne et chez nous pas une 2×2 voies entre ouest et l'est de la France et cela fait plus de 30 ans que je suit dans le transport tout cela parce que l'ont privilégie des modes transport opselet dépassé par la mondialisation qui ont cru que l'on volerais toujours a leurs secours sans trop se fatiguer je dis stop assez de payer pour ce système dans le privé quant ça ne marche plus on restructure, on licencie on redynamise on se remet en cause mais on ne demande pas aux autre de faire le travail a votre place pour justifier votre existence. Alors transport ferroviaire, fluvial, et maritime publique ou subventionnée retrousser vous les manches il est temps de travailler et si vous n'est pas rentable disparaissez pour faire des économies dont l’État aurais bien besoins en ces temps de crise ou nous nous serrons déjà la ceinture depuis bien des années pour vous permettre de vivre comme des parasites sur notre dos…..

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