En France, le port d’armes est interdit depuis 1939 et la législation est aussi restrictive que chez la plupart de nos voisins européens. Les citoyens ordinaires se voient nier ce que d’aucuns considèrent comme un droit fondamental alors que, parallèlement, on constate une hausse des homicides par arme à feu depuis une dizaine d’années dans des villes comme Marseille, sur fond de trafic de stupéfiants. Marseille n’est pas la seule ville concernée : fusillade le 18 mai dernier à Tremblay-en-France, en Seine-Saint-Denis, fusillade le 13 mai à Villerupt, en Meurthe-et-Moselle, fusillade le 9 mai à Valence, dans la Drôme, fusillade le 1er mai à Cavaillon, dans le Vaucluse, etc. L’attaque du 9 juin à Annecy a également relancé le débat sur le port d’armes pour se protéger de l’insécurité et des agressions. Quelles conclusions en tirer ?
Disponibilités des armes à feu et taux d’homicides : la corrélation loin d’être établie
Il est difficile d’évaluer l’impact des armes à feu : les statistiques ne distinguent pas toujours les homicides, les suicides, les accidents de chasse ou domestiques, les décès faisant suite à l’usage d’une arme à feu par les forces de l’ordre. En France, les statistiques sur la criminalité publiées par le ministère de l’Intérieur et celles de l’INSEE ne fournissent pas de données précises. Concernant les homicides, le système de classification statistique internationale des maladies (CIM-10) inclut une catégorie dite « lésions traumatiques infligées par un tiers dans l’intention de blesser ou de tuer » (X85-Y09), mais sans distinguer le moyen employé, et il ne comporte que deux catégories relatives aux armes à feu : les agressions par fusil, carabine et arme de plus grande taille (X94) et les agressions par des armes à feu autres, sans plus de précisions (X95).
Dans la littérature scientifique, la question récurrente porte sur la relation directe entre une plus grande disponibilité des armes à feu et les taux d’homicides. Or, là aussi, la réalité est plus complexe qu’il n’y paraît. A priori, on pourrait croire que c’est dans les pays dont la législation sur les armes à feu est la plus permissive qu’il y a le plus d’homicides. En réalité, la corrélation est loin d’être évidente. Aux États-Unis, où le taux de détention de ces armes pour 100 habitants est le plus élevé au monde (120,5), il y a eu 13,624 homicides par armes à feu en 2020. La situation est bien différente dans d’autres pays comme la Finlande, dans le top 10 des pays les plus armés, sans que cela ne semble avoir une incidence sur le nombre d’homicides par ce moyen (5 en 2019). De la même manière, les citoyens suisses sont parmi les plus armés, et on ne compte que 9 homicides par arme à feu en 2020.
Lecture : Pays avec le plus d’armes à feu pour 100 habitants
Source : Estimating global civilian held firearms numbers – Small Arms Survey (2018)
Les armes à feu servent surtout en cas de légitime défense, et non pour commettre des crimes
On a tendance, dans les débats sur le port d’armes, à négliger, voire ignorer, un objectif pourtant majeur : la dissuasion. Un criminel, par définition, est peu soucieux de ce qui est légal ou de ce qui ne l’est pas. S’il lui faut une arme, il trouvera toujours un moyen de se la procurer : il connaît les réseaux clandestins. Le citoyen lambda, lui, se retrouve donc très vulnérable. Cet aspect de la question a été évalué par l’économiste américain John Lott dans un article intitulé More Guns, Less Crime, publié en 1996. Il a collecté des données venant de plus de 3 000 comtés aux États-Unis pendant une période de 15 ans, et analysé l’impact du port d’armes sur 9 types différents de crimes. Résultats : dans les États où il était autorisé, le taux d’homicides avait baissé de 8,5 %, le taux de viols de 5 %, le taux de vols de 3 %, ces effets étant notables au bout de 3 ans. Dans les États dotés d’une législation sur le port d’armes dissimulées, le taux de meurtres de masse dans les lieux publics était inférieur de 69 % à celui des autres Etats. Cette loi a une influence sur les Etats voisins qui ne l’ont pas promulguée : le taux de criminalité a tendance à augmenter. Logique : les criminels sont plus à l’aise dans les États où les citoyens n’ont pas les moyens de se défendre eux-mêmes.
L’étude de John Lott s’accorde avec des données beaucoup plus récentes. À New York, le nombre de permis d’armes a été multiplié par 3 entre 2007 et 2016, et il s’est accompagné d’une chute du nombre de meurtres de 25 %. Au Brésil, le nombre de citoyens armés a été multiplié par 2,3 après la libéralisation du port d’armes par l’ancien président Jair Bolsonaro. Cela a-t-il rendu la société brésilienne plus violente ? Non : le taux d’homicide a chuté, de 34 pour 100 000 habitants en 2019 à 18,5 en 2023. Un accès bien plus facile à des armes, de surcroît moins chères, n’est certainement pas pour rien dans ces statistiques. D’autres données vont dans le même sens : une enquête menée auprès de 54 000 résidents américains en 2021 a révélé qu’une arme à feu avait été utilisée dans environ 1,67 million de cas de la légitime défense chaque année, et qu’aucun coup de feu n’avait été tiré dans 81,9 % des cas.
L’approche libérale : une question de principe
Comme nous venons de le voir, la question du port d’armes est trop complexe pour être cantonnée aux tragiques tueries de masse qui horrifient évidemment l’opinion, et un plus grand accès aux armes à feu n’implique pas nécessairement un plus grand nombre d’homicides. Un autre chiffre vient appuyer une réalité peut-être contre-intuitive, mais incontestable : si l’on en croit le rapport 2018 de Small Arms Survey, il y avait près de 857 millions d’armes à feu détenues par des civils dans le monde fin 2017 pour, c’est l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime qui le dit, quelque 238 000 homicides par arme à feu la même année. Soit 27,77 homicides pour 100 000 armes à feu.
D’un point de vue libéral, le port d’armes citoyen est surtout une question de principe : le droit de résistance à l’oppression, un droit naturel consacré par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, dépasse les batailles de chiffres sur la létalité. Bien sûr, ce droit ne signifie pas absence totale de contrôle. Dans la plupart des pays, la détention d’une arme n’est accordée que sous conditions. En Suisse, en République-Tchèque ou en Autriche par exemple, certaines armes peuvent être détenues après vérification des antécédents judiciaires, d’un examen médical, et d’un examen sur le maniement des armes à feu. Comme souvent, le problème n’est pas l’arme en elle-même, mais bien celui qui la porte et le droit qui encadre sa détention.
21 commentaires
L’interdiction du port d’armes empêche les innocents de se défendre, alors que les malfrats s’en procurent largement et s’en servent en toute impunité…
L’interdiction de la vente de drogues génère un trafic mafieux qui déborde l’État, alors que les consommateurs s’en procurent au vu et au su de chacun, avec des tarifs parfois affichés sur les murs…
L’immigration est réglementée, mais n’importe qui entre comme il veut en France, sans même avoir le droit d’asile et en bénéficiant d’aides de toute sorte, puis de naturalisation…
Etc.
Conclusion : l’État interdit de plus en plus mais maîtrise de moins en moins. Le pire c’est que cette usine à textes et à formalités tourne à vide, voire à contresens souvent, alors qu’elle nous coûte de plus en plus cher !
M. Macron qui rêve tant de laisser une trace aurait pu s’attaquer à une grande réforme de l’État, mais ce petit dirigiste, pour être brillant en société, n’est pas Napoléon : c’est l’autoritarisme vertical sans Cambacérès et le code civil…
La trace qu’il va laisser est une faillite financière de l’État et un babillage constant sans solutions concrètes.
I can’t agree more !
Très intéressant et bien argumenté.
Je vous conseil de voir la situation en Israël.
( Je suis israéliens)
Article de qualité. Bravo et merci pour votre travail.
Merci beaucoup!
Je pense quand France on est pas près pour cela ,car les politiciens ne voteront pas une telle loi sur le port d’arme mise à part la droite extrême.Mais je pense que vue ce qu’il se passe en ce moment dans le pays (Annecy) on a le droit et le devoir de ce défendre. Nous ne sommes pas près ,pour ça il y a trop de bien pensant qui disent que ce n’est pas de leurs fautes ,qu’ils sont malades ,donc qui échappe à la justice.
Une arme bien sûr MAIS POUR CE DÉFENDRE.
J’avais du mal à me faire une opinion sur la question. Maintenant c’est fait, grâce à cet étude. Merci
Article clair et net,bravo👍
Faux,il y aura toujours de la criminalité,grâce aux guerres en Extrême-Orient,Moyen-orient,Yougoslavie,et aujourd’hui en Ukraine,le trafic des armes bat son plein,et il faut aussi reconnaître avec bien souvent l’aval des états,tous les moyens sont bons,pour vendre………
Peut-être le petit DERRINGER petit calibre à un coup que certaines de ces dames portaienr dans le Far-West coincés dans les jarretelles et sortaient pour dissuader les trop agressifs ? Développer sinon la vente des mini-tasers ou des lacrymo voire des alarmes 100 Db ?
Attention à l’ambigüité du mot « plus » dans le titre de l’article !
Ici, c’est « plus » au sens de « davantage » ou bien « plus » au sens de « plus du tout » ?
Vous avez raison, cela peut prêter à confusion : ici c’est « plus » au sens de « davantage »
Merci pour cette article qui remet « l’église au centre du village » face au lobbying anti-armes appuyé par un gouvernement qui, faute de faire face à la criminalité, rassure Mde Michou par une com montrant qu’il est en action.
Je regrette que dans cet article il n’est pas fait mention du « Catalogue des Armes & Cycles de Saint-Etienne ». L’exemplaire que je possède date de 1910/1912 et par conséquent de ce qui était en vente libre en France au début du siècle dernier. C’est édifiant. Un choix extraordinaire, de tous les calibres. Nos ancêtres abusaient-ils de ces possibilités ??
Je donnerais cher pour retrouver le catalogue de mon enfance, où figuraient des articles qui faisaient voyager : casques coloniaux, pièges à tigres, cannes-épées, etc.
En Tchéquie la loi sur les armes donne un droit au port d’arme citoyen depuis la fin du communisme (ce droit a été inscrit dans la constitution tchèque il y a peu de temps), actuellement plus de 250’000 citoyens tchèques ont saisi cette opportunité pour se défendre et défendre leurs proches (environ 2.5% de la population).
En Autriche il existe au moins un droit à la détention d’armes pour la défense personnelle (autrement dit, pas besoin d’entourloupes à la francaise avec comme ‘excuse’ le tir sportif ou la chasse).
En Allemagne le port de spray OC est totalement libre, et tout résident au casier vierge à le droit à un « petit port d’arme » autorisant le port de pistolet d’alarme, CS et OC.
En Suisse le port d’arme existait de manière très libre jusqu’au 1.1.1999, il reste un droit à la propriété aux armes, y compris de vraies armes de guerre en full-auto, même pour les étrangers avec permis d’établissement (quelques nationalités sont explicitement exclues)
Le port d’arme existe aussi en Estonie (shall-issue et encore plus facile à avoir qu’en Tchéquie.
La légalisation du port d’arme en tant que telle ne va pas augmenter significativement le nombre d’armes détenues légalement, ceux qui en veulent, détiennent déjà en négligeant de dire à la FFTir qu’ils veulent une arme pour se défendre. Par contre, elle permettra aux détenteurs actuels de porter pour leur défense si ils le désirent. Le détenteur actuel est parmi les citoyens les plus respectueux du droit, il risque de perdre toutes ses armes en cas de problèmes en justice.
Connaitre l’usage que l’on peut faire d’une arme me semble la meilleure formule pour ne pas faire n’importe quoi avec. Peu d’anciens soldats ayant effectué le service militaire et connaissant leur dangerosité sont impliqués dans des affaires de criminalité . En France ce sont essentiellement les émigrés trafiquants de drogue et les musulmans extrémistes qui perturbent la situation . le ver est hélas dans le fruit !
longtemps j’ai souhaiter posséder une arme mais avec l’âge et l’autoritarisme du pouvoir jacobin de ce que l’on appel la France ou ce qu’il en reste je me suis fait une raison , je sais pertinemment que que la détention d’arme passe par un contrôle très stricte et minutieux et pas uniquement sur le plan juridique mais aussi et surtout sur les conviction idéologique et politique , personnellement je n’ai pas besoin de posséder une arme à proprement parler , j’en ai 4 sur moi et elles sont mortel , mes deux jambes , et mes poings je pourrais en rajouter des autres la tête , et les coudes par contre je sais que si demain l’Europe étais confronter à un conflit d’une grande ampleur et d’une incursion sur son territoire à grande échelle je serais m’en servir de mes armes contre ceux que aujourd’hui m’interdisent d’en posséder une mais demain voudrons m’envoyer sur le front par la force pour défendre leurs intérêts car voyez vous le fait de tout vouloir interdit , contrôlez , réglementez se retourneras contre eux et seront poussez à l’exile par la vindicte populaire et la colère des peuples comme jadis cela a été le cas et reproduiras car ces gens la sont tellement des dégénères , ceux qui tiennent le pouvoir que dans leur ADN est inscrit leur destiné à être des Nomades pour l’éternité
Dans notre famille, mon père sollicité par des amis chasseurs, a toujours refusé d’avoir une arme à la maison pour éviter les accidents avec les enfants. On était six gosses très entreprenants aimant bien aller à la découverte et faire des expériences.
Cette décision nous a protégé.
Mais je reconnais qu’avoir sa « 22 » son le lit peut être rassurant, voir dissuasif en cas de cambriolage.
PhB
Tout propriétaire qui tirerait sur un cambrioleur non armé se mettrait dans de beaux draps…
Depuis mes 10 ans, je suivais mon père à la chasse, il ma expliqué le fonctionnement des armes et les positions de sécurité.
À 13 ans j’ai reçu ma première carabine 9mm flobert, j’ai toujours suivi les conseils de sécurité maintenant j’ai 64 ans une dizaine de fusils de tout calibre. Je chasse et fait du tir à l’arme réglementaire.
Aucun problème depuis toute ses années, je suit d’accord pour le port d’armes caché.
Mais commençons à instruire les personnes par des cours de sécurité, et les jeunes directement à l’école.