Le succès du statut de l’auto-entrepreneur se confirme d’année en année.
En créant ce régime il y a 10 ans, le secrétaire d’État chargé des entreprises et du commerce extérieur de l’époque, Hervé Novelli, entendait promouvoir l’esprit d’entreprise. Ne disait-il pas : « Cela abolit, d’une certaine manière, la lutte des classes. Il n’y a plus d’exploiteurs et d’exploités. Seulement des entrepreneurs : Marx doit s’en retourner dans sa tombe » ?
Un statut toujours menacé par les gouvernements
En vigueur depuis le 1er janvier 2009, le statut d’autoentrepreneur a connu ensuite plusieurs modifications. À commencer par son appellation même, puisqu’il est devenu officiellement micro-entrepreneur en 2016.
Des modifications qui ont porté, par exemple, sur l’augmentation des cotisations sociales, l’assujettissement à la cotisation foncière des entreprises (CFE), à la contribution à la formation professionnelle et à la taxe pour les frais de chambre de commerce et d’industrie (CCI) ou de chambre de métiers et de l’artisanat (CMA).
Malgré son succès, le régime de l’auto-entrepreneur reste cependant fragile. C’est ainsi que le projet de loi de finances pour 2020 prévoit de réduire l’aide aux créateurs et repreneurs d’entreprise (ACRE) pour les micro-entrepreneurs. L’allégement des charges sociales qui porte aujourd’hui sur trois années ne serait plus que d’un an. Les représentants des auto-entrepreneurs se mobilisent déjà contre cette mesure. À suivre !
Un nombre de micro-entreprises toujours en hausse
Selon l’Acoss, qui a fait un bilan en juillet dernier, on dénombre aujourd’hui 1,36 million de micro-entrepreneurs qui représentent 42 % des travailleurs indépendants (hors secteur agricole) contre 26 % en 2011, deux ans après la mise en place du statut.
La croissance du nombre d’auto-entrepreneurs a été relativement stable jusqu’en 2016, puis s’est accélérée à partir de 2017. La progression a été de + 12,3 % en 2017 par rapport à 2016. En 2018, elle a été de + 23,7 %, avec 461 000 nouvelles immatriculations enregistrées. Si l’on prend en compte les 280 000 radiations, le nombre de micro-entrepreneurs est tout de même supérieur de 15,4 % en 2018 par rapport à 2017.
Les micro-entrepreneurs sont présents dans tous les secteurs. Les principaux sont la construction (11,8 %), les arts, spectacles et autres activités récréatives (6,9%), les transports (5,8 %), le conseil (5,8 %), l’industrie (5,4 %), la santé (4,9 %), l’enseignement (4,3 %) ainsi que la coiffure et soins du corps (4,2 %). Ces huit secteurs regroupent près de 50 % des micro-entrepreneurs actifs.
En 2018, sans doute grâce au doublement des plafonds de chiffre d’affaires décidé par le gouvernement, les créations de micro-entreprises ont connu des progressions importantes dans les activités immobilières (+ 31 %), dans le conseil (+ 26,2 %), dans les activités financières et d’assurance (+ 20,7 %). D’autres secteurs semblent émerger avec un nombre de créations en hausse en 2018 : nettoyage (+ 18,4 %), sport (+ 13,1 %), santé (+ 12,5 %).
Un chiffre d’affaires qui augmente avec l’ancienneté
Près des trois quarts des micro-entreprises ont déclaré un chiffre d’affaires en 2018. Si 54 % des micro-entreprises déclarent un chiffre d’affaires au cours de leur première année d’existence, elles sont en revanche 90 % à le faire après 5 ans d’ancienneté. Et les plus anciennes auto-entreprises (9-10 ans) sont 93,5 % à être économiquement actives.
Le bilan de l’Acoss nous apprend aussi que parmi ces 1,097 million d’auto-entrepreneurs ayant des clients, 33,4 %, soit 337 900, sont en même temps salariés. L’auto-entreprise leur apporte donc un complément d’activité et de revenu. Ces micro-entrepreneurs salariés ont déclaré en moyenne un chiffre d’affaires de 7 632 € en 2018.
Il reste donc 759 000 personnes pour lesquelles l’auto-entreprise est la source unique des revenus professionnels. Elles ont déclaré un chiffre d’affaires moyen de 12 900 € l’année dernière. Soit une rémunération brute mensuelle – avant déduction des charges sociales – de 1 077 €.
Bien sûr, ce chiffre doit cacher de grandes disparités, mais l’Acoss ne nous fournit pas d’éléments permettant de les apprécier. Nous sommes donc contraints de réfléchir à partir de cette moyenne.
Nombre de micro-entrepreneurs administrativement actifs | 1 356 800 |
Nombre de micro-entrepreneurs économiquement actifs | 1 097 000 |
Chiffre d’affaires total (en millions d’euros) | 12 392 |
Chiffre d’affaires moyen (en euros) | 11 298 |
Nombre de micro-entrepreneurs économiquement actifs et salariés | 337 900 |
Chiffre d’affaires total (en millions d’euros) | 2 579 |
Chiffre d’affaires moyen (en euros) | 7 632 |
Nombre de micro-entrepreneurs économiquement actifs non salariés | 759 100 |
Chiffre d’affaires total (en millions d’euros) | 9 814 |
Chiffre d’affaires moyen (en euros) | 12 929 |
Chiffre d’affaires mensuel moyen (en euros) | 1 077 |
Smic mensuel (en euros) | 1 521 |
Source : Acoss-Urssaf |
220 000 demandeurs d’emploi potentiels
Avec un revenu brut moyen de 1 077 €, l’auto-entrepreneur gagne donc moins que le Smic qui est à 1 521 € brut (1 171,34 € net) depuis le 1er janvier 2019. Plus précisément, il ne perçoit que 70,8 % du Smic.
Avec un Smic horaire égal à 10,03 €, cela revient à dire que l’auto-entrepreneur ne travaille que 107 heures par mois (1 077/10,03), soit près de 44 heures de moins que la durée de travail officielle en France (151,67 heure/mois).
Donc les 759 000 micro-entrepreneurs déclarant un chiffre d’affaires et censés travailler à plein temps n’ont, en réalité, aucune activité durant 44 heures par mois. Soit, pour l’ensemble, un total de 33 622 000 heures.
Si l’on divise ces 33 millions d’heures par le nombre d’heures mensuelles d’une une personne qui travaille à temps plein (151,67 heures), on obtient un chiffre – 221 680 – qui serait hypothétiquement celui des auto-entrepreneurs sans activité.
La réalité est plus probablement que beaucoup de ces auto-entrepreneurs acceptent de gagner moins mais préfèrent travailler plutôt que de s’inscrire au chômage. Ce sont autant de chômeurs en moins et on ne comprend pas pourquoi le gouvernement s’acharne à réduire l’intérêt de ce régime qui incite à la reprise du travail et à la création d’entreprise.
2 commentaires
Toujours l'Etat!
Si, si, nous comprenons très bien. L'Etat déteste les entrepreneurs, c'est à dire ceux qui prennent des risques et des responsabilités. Il faut soumettre ces gens dangereux. Facile : taxes de plus en plus importantes, réglementations étouffantes et, un jour, ils disparaîtront.
Allez direct au but
On perd beaucoup trop de temps à chercher pourquoi le pays ne favorise pas l'initiative, la réflexion, l'action, l'autonomie. Parce que, pourquoi, on le sait.