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L’hôpital étouffé par la bureaucratie

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Prétendre que l’on ne peut diminuer le nombre de fonctionnaires en arguant du besoin d’avoir des infirmières est malhonnête. Selon les chiffres de l’OCDE, 35,22% des emplois hospitaliers en France ne sont pas médicaux ou paramédicaux, contre 24,3% en Allemagne et 30,81% en Suisse. Se rapprocher du taux allemand équivaudrait à économiser 127 000 postes dans la fonction publique hospitalière.

Moins de fonctionnaires ! 120 000, 500 000 ? Pour certains il y en aurait trop, pour d’autres ils sont essentiels et l’on en manque. Qu’en penser alors que les candidats à la présidentielle avancent leurs propositions ? On peut déjà noter que nous comptons 17% de fonctionnaires de plus que l’Allemagne mais sommes 9% moins nombreux. Il y a 93 fonctionnaires ou employés du secteur public en France pour 1000 habitants, la médiane européenne étant de 61. Les 6 171 000 fonctionnaires français représentent un peu moins de 22% de la population active française (En 2014 selon le ministère de la fonction publique).

En général, il faut distinguer une approche dite « d’emploi » à une autre dite de « carrière ». La première est tournée vers la mission, la fonction à réaliser, tandis que la seconde, statutaire, est conditionnée par l’obtention d’un concours qui ouvre à un corps de métier avec grille de salaire et grades de progression très normés. C’est en fait sur cet aspect que la France se montre différente puisque la plupart des pays voisins ont cantonné la seconde approche, souvent synonyme d’emploi « à vie », aux fonctions régaliennes.

Ainsi de la Suède depuis les réformes des années 90, de l’Angleterre, de l’Allemagne, des Pays-Bas, de la Nouvelle-Zélande ou de la Suisse, qui utilisent des contrats privés ; la différenciation entre contrats de statut public et contrats privés y est faible, voire inexistante. La généralisation du statut de la fonction publique est un handicap, en France, pour qui voudrait faire évoluer le nombre de fonctionnaires. Qui plus est, le réformiste se voit souvent reprocher de vouloir diminuer la qualité du service public, le nombre d’infirmière ou de policier, dans un contexte difficile. Qu’en est-il en réalité ?

Nous nous sommes penchés sur le domaine hospitalier et de la santé.. Nous avons limité les comparaisons à l’Allemagne et à la Suisse dont les systèmes de santé sont d’un niveau comparable et sur lesquels l’IREF a réalisé une étude en 2013, toujours d’actualité.

La fonction publique hospitalière compte 1 161 087 personnes en France. Ne représentant que 21% du total des fonctionnaires, cela laisse des possibilités à ceux qui voudraient réduire la masse salariale dans la fonction publique sans toucher au système de santé. De surcroit, selon nous, le nombre d’employés publics peut aussi décroitre sans attenter à la qualité du service. En Allemagne, une large privatisation des hôpitaux s’est opérée depuis les années 90, si bien que le pays compte certains des plus grands groupes hospitaliers privés (Asklepios, 45 000 employés, 3 mds € de CA ou Helios, 71 000 employés, 5,6 Mds € de CA). Le nombre d’emplois publics consacrés au secteur de la santé ne dépasse pas 5% de la totalité du secteur public allemand. A l’inverse, la France héberge le plus important groupe hospitalier public d’Europe (APHP, 100 000 employés pour 7 mds€ de CA).

En Suisse, une réforme a abrogé le statut de fonctionnaire après un référendum en 2002. Depuis, salariés publics et privés ont sensiblement les mêmes conditions d’embauche et de travail. Toutes les différences tendent à disparaitre au fur et à mesure des nouvelles réformes. Cependant, il existe de nombreux hôpitaux publics, dont les cinq grands centres universitaires (l’HU de Genève le plus grand d’entre eux, emploie 10 800 personnes pour 1,8 Mds € de CA).

L’Allemagne compte 13,1 infirmières pour 1000 habitants contre 10 en France selon l’OCDE, et 17,6 en Suisse. Concernant les médecins, avantage aux Allemands et aux Suisses encore, 4,1 contre 3, 3 en France. Mais le système leur coûte moins cher parce qu’ils ont moins de personnel administratif.

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En effet, selon les chiffres de l’OCDE, 35,22% des emplois hospitaliers en France ne sont pas médicaux ou paramédicaux, contre 24,3% en Allemagne et 30,81% en Suisse. Se rapprocher du taux allemand équivaudrait à supprimer 127 000 postes dans la fonction publique hospitalière.

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En conclusion

1- Prétendre que l’on ne peut diminuer le nombre de fonctionnaires en arguant du besoin d’avoir des infirmières est malhonnête ;
2- Même dans la fonction publique hospitalière, il est possible de diminuer le nombre de fonctionnaires.

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8 commentaires

VIGNELLO Daniel 14 mars 2017 - 2:22

Compétence et Responsabilité
J'ai malheureusement connu CHU et clinique privée, clinique où j'ai été adressé par le professeur du CHU. Oui l'hôpital publique étouffe de et par sa gestion administratif. En résumé au CHU, vous passez devant 8 déléguées d'ordinateur pour arriver à votre chambre et encore être assailli par une "vendeuse" de téléphone et puis de télés (dans quel budget) et vous ne pouvez sortir le W.E par absence d'administratif et pourtant c'est le trésor qui vous adresse la facture. En Clinique une personne vous enregistre et appelle l'infirmière pour vous conduire à votre chambre (je suis mal voyant) Le même service vous fait payer à la sortie y compris le W.E.Et les infirmières ont le sourire car elles n'ont pas besoin de référer à une ou un supérieur . En plus en clinique (200 lits tout de même) j'avais de vrais repas servis avec de vrais couverts et non un plateau jetable !!. Je pourrai en écrire un roman, c'est désastreux, merci madame BACHELOT d'avoir reporté la convergence public/privé

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orldiabolo 14 mars 2017 - 7:04

Pléthore !
Dans l'hôpital de ma ville, il y a plus d'employés administratifs que de lits (800)…

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lainé 18 mars 2017 - 3:54

Santé, Education : même combat !
Le mal qui ronge notre système de santé est exactement le même que celui minant l'Education Nationale depuis des années :
La pléthore, en leur sein, de gens qui émargent à leur budget sans jamais avoir ni soigné quiconque ni enseigné quoi que ce soit !
Une véritable honte pour tous ceux qui assurent vraiment leur travail dans des conditions devenues inacceptables.
Le comble est évidemment que ce soit les syndicats dits "représentifs" (de qui ?) qui portent les revendications de ceux qui assurent vraiment la charge du travail pour lequel ils sont …si mal payés !
Cherchez l'erreur !

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Jean-Baptiste Boone 20 mars 2017 - 1:22

Ces fameux représentants syndicaux détachés, payés par l'employeur à défaut d'un employé travaillant réellement.

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Leclerc 20 mars 2017 - 3:10

8% de charges générales
Je ne sais pas où vous avez trouvé ce chiffre de 35% de personnel administratif. Dans mon hôpital, les charges dites "de structure" c'est à dire l'administration générale (hors informatique) et l'amortissement des bâtiments et parkings (tous neufs) représentent moins de 8% du budget. Soit pour un euro de recette, moins de 8 centimes de frais généraux. Franchement, je ne sais pas s'il est possible de faire moins.
Dans les hôpitaux, il n'y a pas que des médecins et des infirmières mais aussi des personnels techniques en imagerie, labo, pharmacie, anapath…
Par ailleurs de nombreux agents cadres (informaticien, contrôleur de gestion, ingénieur…) ne sont pas fonctionnaires mais contractuels car ils ont eu une carrière dans le privé avant et ne veulent pas redémarrer au 1er échelon de titulaire, mais avoir un contrat avec une prime variable en fonction des résultats et il y en a de plus en plus dans ce cas. Mon responsable facturation vient de chez Carrefour, mon directeur informatique de chez Conforama… J'ai l'impression que vous avez une vision un peu passéiste (et parisienne) des hôpitaux.

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Jean-Baptiste Boone 21 mars 2017 - 9:55

Bonjour Monsieur,

Je vous remercie d'apporter l'exemple de votre hôpital pour approfondir la question. Les chiffres exposés sont ceux de l'OCDE.
Je connais les hôpitaux de par Paris en effet mais cela n'enlève rien aux chiffres présentés ici, qui sont, eux, indépendants de la vision biaisée que je peux avoir. Néanmoins, l'APHP seulement représente presque 10% de la fonction publique hospitalière, les structures parisiennes influencent donc largement des études nationales.
Je serais intéressé de vous rencontrer afin de discuter de ces questions et de mieux connaitre votre exemple, serait-ce possible?
Voici mon adresse: jb.boone@irefeurope.org

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Michell 24 août 2017 - 7:18

Sentiment partagé
Bonjour,
Vous critiquez sans doute a juste titre l'hôpital public, mais pour être allé aux urgences en clinique privée j'ai pu constater les mêmes dérèglements. Vous passez de service en service et on vous demande les memes papiers/renseignements qui sont saisis ou photocopiés en double/triple exemplaires par des armées de secrétaires, quel temps perdu.
Pour travailler dans la fonction publique d'état depuis longtemps, j'ai vu mon service d'environ 100 personnes être divisé en 2 sous unités, avec recrutement de nouveaux chefs, de secrétaires/ gestionnaires, leur nombre à ete multiplié par 3 en 10 ans. Alors que nous réalisons nous-meme des tâches normalement dévolues à ces personnes: frappe, courrier, …. et l'administration a le don de créer des usines à gaz qui compliquent tout et alourdissent tout.

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Sofie 26 mai 2020 - 12:46

Équipe pluridisciplinaire
Autre problème : EHPAD, on embauche des Ergo et des psychomot, mais on diminue le nombre d'aide-soignante. Parfois 1 aide-soignante par étage. Dans aide-soignante il y a le mot aide ce qui veut dire travail en binôme, or, les jeunes infirmiers ne s'occupent plus que des prescriptions médicales et ne daignent plus retourner ou tenir un malade. On m'a dit : j'ai pas le temps, ce que tu ne peux pas faire, laisse le, ou appelle ta collègue d'en dessous! La pauvre, elle était pas mieux logée que moi.

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