Dimanche dernier 18 mai a eu lieu le premier tour de l’élection présidentielle en Pologne. Comme prévu par les sondages, le deuxième tour verra s’affronter Rafał Trzaskowski, candidat centriste de la Plateforme civique, parti actuellement au gouvernement, et Karol Nawrocki du PiS, parti de droite conservatrice de l’actuel président Andrzej Duda. Ils ont dominé le premier tour avec respectivement 31,36 % et 29,54 % des voix. Un détail important, qui contraste avec le scrutin roumain : aucun candidat pro-russe ou ambigu avec le régime de Vladimir Poutine n’est au second tour.
En effet Sławomir Mentzen, candidat de la Confédération (une union de partis de droite et d’extrême-droite), très critique vis-à-vis de l’Ukraine, des Ukrainiens et de Volodymyr Zelensky, arrive troisième avec 14,80 %. Toutefois, son parti progresse dans les urnes puisqu’il fait plus que doubler son score par rapport à l’élection de 2020 (6,78 %) et aux élections parlementaires de 2023 (7,16 %). Grzegorz Braun, député européen, ex-membre jusqu’au début de cette année de la Confédération, a créé la surprise en obtenant 6,34 %. Cette homme politique est notamment connu pour critiquer vivement l’Ukraine mais surtout pour ses propos et ses actes ouvertement antisémites. L’extrême-droite polonaise, qui n’a rien à voir avec le Rassemblement National ou Reconquête d’Éric Zemmour, est en pleine progression (notamment chez les jeunes) et pourrait faire basculer l’issue du second tour.
Selon les sondages, Rafał Trzaskowski devait emporter ce premier tour largement devant son rival du PiS (32,2 % contre 26 % quelques jours avant le scrutin). Le second tour, annoncé facile pour le candidat centriste, sera finalement serré. Si les électeurs d’extrême-droite se tournent massivement vers Nawrocki, il l’emporterait. Pour autant, beaucoup rejettent dos à dos le PiS et la Plateforme civique, tous les deux ayant gouverné ces dernières années, ils sont tous les deux jugés responsables de la situation actuelle. De plus, comme en Roumanie, la participation peut augmenter et favoriser l’un ou l’autre. Ce premier tour a d’ailleurs battu un record de participation avec 67,31 % contre 64,51 % en 2020 et 55,31 % en 2010.
Si Rafał Trzaskowski l’emporte, son parti déjà au gouvernement aurait encore plus de liberté pour appliquer son programme, le président pouvant notamment mettre son veto sur telle ou telle loi votée par l’Assemblée. L’influence de la Pologne au sein de l’UE pourrait encore s’intensifier, à l’image de l’action internationale de l’actuel Premier ministre Donald Tusk, très présent sur le dossier ukraino-russe et souhaitant rapprocher son pays de la France et de l’Allemagne. Il est probable que Karol Nawrocki lui, s’il était élu, maintiendrait plutôt la situation politique actuelle en Pologne. Étatiste sur le plan économique contrairement à son adversaire plutôt libéral, il se déclare proche de Donald Trump tout en étant pro-OTAN.
Un autre enseignement de ce premier tour est le faible score de la gauche polonaise : les deux candidats principaux que sont Adrian Zandberg et Magdalena Biejat ont recueilli 4,86 et 4,23 % des suffrages. Rien à voir avec une France qui a placé deux fois de suite Jean-Luc Mélenchon en troisième place de l’élection présidentielle ou le Nouveau Front populaire en tête des dernières législatives…
4 commentaires
Il est bien possible que la France poursuit ce rejet de la gauche aux urnes aussi!
Ce serait à souhaiter car les Français n’y survivraient pas !
Les Polonais détestent les Russes en raison d’une Histoire pleine de souvenirs douloureux, donc il n’est pas très surprenant qu’aucun candidat dit “pro-russe” ne se manifeste en ce pays.
Ce qui est intéressant, en revanche, c’est de constater que la même détestation ne se retrouve pas dans la plupart des anciens États-satellites de l’ex Union Soviétique qui ne sont pas limitrophes de la Russie à l’instar de la Pologne, les États baltes et l’Ukraine.
C’est une nuance qu’il serait selon moi important de prendre en compte dans la lecture de la géopolitique européenne actuelle et qui, trop souvent, ne l’est pas (comme lors du scrutin présidentiel en Roumanie, par exemple, où l’hystérie russophobe qui a prédominé dans le camp européiste n’est en rien aussi prévalente sur le terrain, puisque près de la moitié de l’électorat ne semble en rien inquiétée par l’idée d’une plus grande proximité avec la Russie).
La même détestation (et peur) des Russes existe aussi dans d’autres pays come la Roumanie où 89.7 % des Roumains veulent rester dans l’UE et l’OTAN (selon un sondage du mois d’avril). D’autres facteurs sont intervenus dans le vote aux élections comme je l’ai expliqué dans mes papiers. D’ailleurs, Simion a hypocritement changé de discours les derniers jours de la campagne en se disant anti-Poutine.