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Retailleau et Lisnard, le pari gagnant, conservateur et libéral

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Bruno Retailleau

Bruno Retailleau a emporté la présidence de LR avec le soutien de nombre de personnalités du parti. Mais le concours le plus marquant a sans doute été celui de David Lisnard. Ce dernier est un libéral affirmé dont l’IREF a déjà dressé le portrait. Bruno Retailleau se définit pour sa part comme conservateur et libéral : « […] le libéralisme authentique ne va pas sans un conservatisme assumé. »

Certes, Hayek considérait qu’il y avait du danger « dans cette situation confuse qui mène les défenseurs de la liberté et les vrais conservateurs à se regrouper pour s’opposer ensemble aux orientations qui menacent au même degré leurs idéaux divergents ». Le conservatisme obscurantiste et le libéralisme libertaire ne sont pas compatibles. Mais une alliance du libéralisme classique et d’un conservatisme renouvelé (cf. Roger Scruton par exemple) paraît aujourd’hui possible et souhaitable en France pour redessiner une politique crédible et fertile.

Des divergences existent entre des conservateurs attachés à une certaine grandeur de l’Etat et les libéraux qui observent avec lord Acton que le bateau est fait pour ses passagers et non pour son équipage. Ceux-là ont volontiers une vision organique de la société, selon laquelle le gouvernement serait à la nation comme le père l’est à sa famille, ce qui les entraîne à vouloir que le pouvoir politique soit bon autant que juste, quand ceux-ci réservent la bonté, avec la charité, à l’ordre privé et exigent de l’Etat qu’il soit juste, c’est-à-dire selon l’ancienne définition qu’il rende à chacun le sien, plutôt que bon.

Des convictions partagées

Libéraux et conservateurs ont néanmoins entre eux plus de convictions à partager que de querelles à entretenir. Les conservateurs, de Chateaubriand à Gustave Thibon, et les libéraux, de Locke et Smith à Turgot, Bastiat et tant d’autres, ont des proximités que d’autres auteurs comme Burke, Montalembert ou Tocqueville ont cultivées.

Ensemble, conservateurs et libéraux conviennent qu’il existe une nature humaine, imparfaite mais singulière et ayant vocation à se parfaire. Ils respectent chaque personne comme une fin et jamais comme un moyen. Ils croient que la civilisation n’est pas le fruit d’un plan de l’histoire, mais celui de la volonté et de l’intelligence des hommes. Ils ne sont pas relativistes, mais une certaine sagesse de l’incertitude les incite à la tolérance. Ensemble ils se méfient de la raison lorsqu’elle se veut exclusive, et des promesses de lendemains qui chantent dont l’enfer est pavé. Ils défendent l’égalité en droit mais savent les méfaits de tout nivellement par le bas. Ils redoutent une Europe impériale qui voudrait se substituer à la pluralité des nations. Ils veulent de l’ordre pour que s’expriment les libertés. Ils respectent et enrichissent les savoirs et traditions qui permettent à chaque génération de grandir comme des nains montés sur les épaules des géants qui les ont précédés.

Ils savent que la liberté des échanges a sorti le monde de la misère et que pour qu’un pays prospère il faut, écrit Bruno Retailleau, libérer les énergies et l’innovation, redonner aux Français les moyens de réussir, ce qui passe « par une économie libérée des blocages, un Etat qui économise plus et dépense moins, une éducation plus exigeante… ».

Enfin, ils considèrent qu’aucun étranger n’a un droit « à » entrer sur notre territoire sauf à y acquérir par lui-même les moyens d’y vivre et à y respecter l’intégralité de nos droits et obligations.

Le libéralisme conservateur est une éthique

Ils ne défendent pas la liberté pour elle-même, mais comme l’instrument nécessaire au développement de notre humanité et le moyen indispensable à la recherche inépuisable de la vérité et à la découverte de nos propres fins. Cette liberté suppose que les individus en soient responsables. Et cette responsabilité est fortifiée par la propriété qu’ils peuvent acquérir pour récompenser leurs efforts et se protéger des incertitudes de la vie.

Liberté, responsabilité et propriété concourent au respect de la dignité humaine dans le respect de toute vie et de l’intégrité de tout être, sachant qu’il ne peut pas y avoir de respect d’autrui sans, d’abord, respect de soi.

C’est pourquoi aussi, libéraux et conservateurs sont attentifs à leur environnement naturel tout en étant persuadés, avec Aristote, que « c’est nécessairement en vue de l’homme que la nature a fait tous les êtres vivants »[1] et avec Julian Simon (The Ultimate Resource) que la plus grande richesse de l’homme, c’est l’homme.

Sortir de la servitude

Nous sommes asservis de toutes parts et la servitude elle-même nous rend serviles parce qu’elle annihile les volontés, dissout les ressources intérieures et obscurcit l’avenir, et donc l’espoir.

Il est donc urgent que libéraux et conservateurs s’unissent pour réagir, pour rendre à chacun la maîtrise de sa vie dans le choix de ses assurances médicales, des études de ses enfants, de sa retraite, de son logement…, pour sortir de cette spirale destructrice de l’Etat providence malade de son obésité. En rétablissant le sens des responsabilités et en en permettant le libre exercice, les libéraux conservateurs redonneraient confiance et courage à tous ceux qui sont las d’être empêchés d’entreprendre, d’éduquer, de travailler, d’investir, de s’exprimer. A tous ils restitueraient leur dignité qui repose d’abord sur l’estime de soi de celui qui a pu se réaliser en réalisant ses projets.

Il est encore temps de revenir à une société ouverte et subsidiaire, une société de confiance, protectrice des incapables autant qu’attentive à ce que chacun puisse librement exercer toutes ses capacités. Pour proposer une politique susceptible de réenchanter le monde, il faudra qu’en puisant dans les racines auxquelles les conservateurs sont légitimement attachés, les libéraux donnent les ailes de projets novateurs : retraite par capitalisation, salaire complet, liberté des écoles (bon scolaire), flat tax….


(Voir mon ouvrage Libéral ou conservateur ? Pourquoi pas les deux, Les Belles Lettres/Manitoba, octobre 2024)

[1] Aristote, Politique, VIII, 1, Vrin, 1977, p.55.

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20 commentaires

Val Guillaume 18 mai 2025 - 10:51 pm

C est la ligne qui m est chère, pourtant si minoritaire jusqu’à présent. Je me réjouis de l élection de Retailleau .

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Mijuna 19 mai 2025 - 7:35 am

Dans le discours c’est bien, mais dans les faits ?

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louis 19 mai 2025 - 7:47 am

retailleau pour 2027 ? surement mieux qu’un edoaurd philippe progressite !

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Soibis 20 mai 2025 - 12:55 pm

Enfin une analyse qui donne de l’espoir mais comment faire comprendre aux populistes que cette voie est dans leur intérêt ?

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Alain Penicaut 19 mai 2025 - 7:55 am

Remarquable analyse. Le succès de Retailleau est une bonne chose. Il doit s’appuyer sur Lisnard pour ouvrir une vision un peu trop restreinte.

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gillet 19 mai 2025 - 8:07 am

“La main à plume vaut la main à charrue,quel siècle à main” A.Rimbaud

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Jean-Aymar de Sékonla 19 mai 2025 - 8:18 am

La machine à perdre vient de se remettre en route, si les LR, ramassis d’ambitieux arrogants et vindicatifs, reprennent de l’importance, on peut craindre le pire… n’oubliez pas Fillon!

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Giraud 24 mai 2025 - 7:03 am

Avec un tel patronyme, le quotient politique est au niveau zéro.

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Alain Figer 19 mai 2025 - 8:27 am

Autant j’étais en bon accord avec les positions politiques, économiques et sociétales, prises par l’auteur, autant je me déclare interloqué par le paragraphe, où il cite Aristote, qui ne me paraît pas de la même eau.

Cette affirmation sans preuve me surprend, et je n’y adhère pas.
S’abriter derrière Aristote, comme le pape peut s’abriter derrière son infaillibilité, me semble une expression de ” l’argument d’autorité ” qui est une absurdité en Logique.

Et qu’est ce que c’est donc que cette “nature” qui aurait eu une idée derrière la tête ??

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MIMOSAS 19 mai 2025 - 9:27 am

Je prie je prie je prie pour que tout cela advienne !
Retailleau-Lisnard, le duo gagnant, forcément gagnant… du moins si on se décide à lutter contre la main-mise des gauchistes sur les médias. CNews et Europe 1 montent, c’est un indicateur rassurant.

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Eric Merlin 19 mai 2025 - 10:56 am

Enfin un article intéressant.
Mais ne croyez vous pas que l’état de la France, dans tous les domaines et à commencer par l’éducation, est dans un tel état qu’il nous faut beaucoup plus de libéralisme, j’ai même envie de dire, “révolutionnaire” que de conservatisme ?
Je m’inquiète en outre du manque de diplomatie marquée par Monsieur Retailleau vis à vis de l’Algérie.
LA raison pour laquelle Chine, Russie, Iran, Inde sortent maintenant du lot est la qualité de l’éducation primaire et secondaire depuis plus de 20 ans, affichée comme objectif d’emblée dans tous ces pays !
Redonnez l’objectif de descendre dans les 10 premiers aux tests Pisa, 60 000 ingénieurs STIM par an et vous verrez la France repartir de l’avant…d’ici un quinzaine d’années.

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Yves Montenay 19 mai 2025 - 11:42 am

Le pouvoir algérien se flatte d’avoir aidé à l’élection de B R en provoquant la France et espère des contres- provocations qui élargiront le fossé

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Orilou 19 mai 2025 - 2:31 pm

“Liberté, responsabilité et propriété concourent au respect de la dignité humaine” “il ne peut pas y avoir de respect d’autrui sans, d’abord, respect de soi” Tout à fait d’accord avec cela. Peut-être faudrait-il également cesser d’associer le mot “libéral” à celui de “progressiste”, comme si vouloir conserver ses traditions était une tare. Le wokisme, l’euthanasie constituent-ils des progrès ?
L’interdiction des notes ou des commentaires à l’école avec le nivellement par le bas qui s’ensuit constituent-ils des progrès pour nos jeunes qui finiront tôt ou tard par avoir à affronter la réalité de la vie en société ?
Au duo Bruno Retailleau- David Lisnard on peut ajouter Laurent Wauquiez qui n’a pas démérité et dont les compétences seraient utiles à notre pays car il a fait du bon boulot en Rhône Alpe.

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Jean Guicheteau 19 mai 2025 - 5:19 pm

L’éducation nationale est une énigme : l’expérience prouve que pour assurer la qualité d’une prestation, la concurrence, l’autonomie de gestion et la liberté de choix du client sont les meilleurs moyens disponibles. Pourquoi il faudrait le faire pour fabriquer des boulons et pas pour une activité aussi noble que l’éducation ?

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Chris 20 mai 2025 - 7:56 am

«le libéralisme authentique ne va pas sans un conservatisme assumé»
Effectivement cette phrase pose question sur la conception par Retailleau d’un “libéralisme authentique”.

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Michel 23 mai 2025 - 1:54 pm

“persuadés, avec Aristote, que « c’est nécessairement en vue de l’homme que la nature a fait tous les êtres vivants »[1]”
Drôle de postulat purement idéologique.

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LYBD 25 mai 2025 - 10:20 am

David Lisnard propose une voie aux français. Et il a la voix pour la faire valoir. La droite doit se retrouver d’autant que la gauche s’éparpille, ne propose pas d’avenir. Elle doit bien sur se séparer de LFI qui n’appelle qu’au désordre .
Au demeurant pour 2027 B.Retailleausu, peut rouler pour D.Lisnard.

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Boutté 25 mai 2025 - 10:36 am

Ancien et neuf sont finalement voisins : “Comme l’antique il est nouveau”

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BERNARD HENOU 25 mai 2025 - 10:53 am

Education, liberté, responsabilité avec u seul mot d’ordre “toujours plus”

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BERNARD HENOU 25 mai 2025 - 10:53 am

Education, liberté, responsabilité avec un seul mot d’ordre “toujours plus”

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