Une « Déclaration européenne des droits de l’animal » a été proclamée le 17 février. Elle peut apparaître sympathique, elle n’en représente pas moins une dangereuse manifestation d’animalisme.
L’animalisme vient de faire de nouveaux progrès. En effet, un texte intitulé « Déclaration européenne des droits de l’animal » a été solennellement proclamé. Que nos lecteurs ne croient pas qu’il s’agisse d’un document farfelu. Il a été très sérieusement rédigé par neuf enseignants-chercheurs des facultés de droit, dont cinq professeurs agrégés. Le coordinateur du projet était Jean-Pierre Marguénaud, un juriste au parcours atypique et promoteur du « droit animalier » dans notre pays.
La Déclaration de 14 articles se trouve divisée en quatre titres, dont l’ordre peut surprendre : les interdictions, la préservation, la condition juridique, l’éducation. Les interdictions visent les actes de cruauté, les mauvais traitements et l’insensibilisation. La préservation traite des animaux sauvages. Les dernier titre oblige à l’éducation de tous au respect des animaux, qui doit « être inculqué (sic) aux enfants dès le plus jeune âge », selon une volonté propagandiste, centralisatrice et étatiste qui laisse songeur.
Mais le titre le plus problématique est évidemment le troisième, de loin le plus important mais manifestement placé en retrait de manière habile. Pour bien le comprendre, il faut faire retour au préambule.
Le premier paragraphe du préambule évoque « la continuité fondamentale entre toutes les formes de vie, de la plus simple à la plus complexe, leur différenciation étant le fruit d’une évolution graduelle et progressive », selon des termes qui mettent déjà mal à l’aise. Le second paragraphe estime que « la sensibilité et les capacités cognitives donnent naissance à des intérêts (?) qui sont au fondement même de droits inaliénables, lesquels sont d’ores et déjà reconnus et protégés au profit des êtres humains », ce qui signifie que les droits prétendus des animaux ont vocation à suivre le même chemin. Le troisième paragraphe appelle à la nécessité d’« une protection exigeante des intérêts de tous les êtres vivants, humains ou animaux non humains (on ne parle donc pas des droits des « vivants » en général, mais le paragraphe suivant se réfère aux « bouleversements climatiques » et aux relations avec la flore) encore qu’ils ne possèdent pas les mêmes aptitudes ni ne les possèdent au même degré (pas encore ?) ».
Le cinquième paragraphe du préambule rappelle les « caractéristiques morales de l’espèce humaine, la place qu’elle occupe dans ce monde et la responsabilité qu’elle assume à l’égard du vivant (tiens, ici on parle du vivant…) ». Ces éléments doivent expliquer sans doute que la Déclaration soit rédigée par des humains plutôt que par des animaux non humains… Ils doivent également expliquer que, selon le titre III, l’animal doive « être représenté en justice pour lui-même ». Mais pourquoi diable, puisqu’il possède des droits, aurait-il besoin d’être systématiquement représenté, en l’occurrence par une « autorité administrative indépendante dénommée Défenseur des animaux (bonne idée pour nos finances publiques…) » ? Cela fait penser à un droit qu’on croyait dépassé, celui du procès des animaux au Moyen-Age…
L’article capital est l’article 11, qui parle de « la reconnaissance d’une personnalité juridique dotée de droits différenciés propres aux animaux qui en seront progressivement revêtus » et qui se prolonge ainsi : « Cette personnalité juridique sui generis ne saurait avoir pour effet d’imposer aux animaux des obligations ou des devoirs en contrepartie des droits qui leur seraient reconnus ». Autrement dit, nos animalistes ne « déclarent » rien, ils inventent de nouveaux droits : les droits qui ne sont pas assortis d’obligations juridiques !
En 2015, le code civil était modifié pour faire passer les animaux de la catégorie d’objet à celle d’êtres vivants dotés de sensibilité. Avec cette Déclaration, un nouveau pas est franchi dont témoigne bien sur son site (17 février 2025) l’Association pour la protection des animaux sauvages : « Il est grand temps que les animaux puissent jouir eux aussi de droits similaires aux nôtres ». Il est permis d’aimer la nature et les animaux, mais de ne pas  partager ce point de vue.