Les romans historiques ont toujours un danger, celui de broder qui éloigne de la vérité. Qu’en est-il de ce roman de Christine Orban qui veut « soulever le voile des non-dits » où l’amour fraternel frise l’inceste, où une petite fille, âgée de huit ans à peine, séduit par ses talents poétiques la reine de France, Richelieu et même le grand Corneille ? La bibliographie de l’auteure atteste le génie de ces deux enfants de la famille Pascal, leur différence de tempérament qui déchire leur cœur. Blaise est aussi brillant que Jacqueline effacée, celui-là est tout en raisonnement, celle-ci tout en sentiment. Marie Nimier a déjà écrit dans « Petite sœur » l’attrait qu’un frère peut avoir pour une cadette. S’il est de bon ton de défigurer des sentiments familiaux en tentations, il est encore plus courant de révéler le fanatisme où peuvent mener des convictions religieuses. Le jansénisme est l’exemple parfait. Après que celui-ci ait dépouillé Jacqueline, c’est au tour  de Blaise de renoncer au monde. Sa découverte de l’existence du vide qui rend le vieux Descartes méchamment jaloux et celle de la machine à calculer qui séduit jusqu’à la cour de Suède ne suffisent plus à son bonheur personnel.
Jacqueline va par tous les moyens lui inculquer ce désir de « mourir au monde » et elle y parviendra. Christine Orban convainc le lecteur de la réalité de ces mortifications en faisant part de sa découverte, aux archives de la Bibliothèque Richelieu de Paris, non seulement du Mémorial du savant converti mais de la cilice avec laquelle il se mortifiait. Le roi Louis XIV et le pape Alexandre VII mettent fin aux erreurs théologales et au fanatisme dangereux  tandis que Christine Orban reste hantée par cette quête du bonheur qu’elle soulevait déjà dans son roman « N’oublie pas d’être heureuse ». Ce dernier livre « Soumise », parfaitement écrit et documenté, ressuscite à merveille ces écrivains qui tentaient comme Chateaubriand d’apporter quelque boussole ou bouée de secours aux athées et aux libertins de l’époque.  A d’autres temps …d’autres mÅ“urs…