Ce nouveau livre sur l’éducation fait l’effet d’une petite bombe. Lisa Kamen-Hirsig est professeure des écoles. Dans son ouvrage, elle souhaite dénoncer le fait que l’Ecole devienne une « vaste garderie », que l’Education nationale soit maintenant la « Garderie nationale ».
La force de ce livre vient de sa critique interne au système éducatif : ce n’est pas un philosophe, un essayiste ou un parent en colère qui dénonce les agissements, les programmes et le « bourrage de crâne » de l’Education nationale, mais une institutrice. Elle déplore tour à tour une éducation sexuelle imposée à des enfants qui n’ont pas encore de questions sur le sujet et qui peuvent s’en retrouver désorientés ; la théorie du genre, via l’éducation sexuelle notamment, qui prétend « que l’on peut se passer du réel biologique » ; l’écriture inclusive ou encore un entrisme écologiste militant dans les programmes et une obsession pour le changement climatique.
Dans son livre, Lisa Kamen-Hirsig estime que l’école « tente de fabriquer un homme nouveau, prêt à endosser toutes les pensées parées des apparences de la nécessité sociale : l’Homo republicanus.» (p.87). Elle dénonce une « bigoterie républicaine » ou le clergé, enfin l’Education nationale, impose aux élèves des « parcours citoyen », dote chaque académie d’équipes « valeurs de la République » ; une école où les élèves doivent absolument participer. Cette participation est d’ailleurs notée désormais, ce qui, de l’avis de l’auteur de cette chronique, désavantage ainsi le bon élève timide qui écoute sagement et travaille silencieusement au profit du bavard dont les connaissances et le travail sont limités.
En plus de cela, et c’est une critique intéressante parfois laissée de côté, Mme Kamen-Hirsig s’insurge contre ce qu’elle appelle « l’hystérie numérique ». Via son expérience personnelle, elle déplore à la fois la nouvelle politique de numérisation à tout va de l’Education nationale qui impose l’emploi d’outils numériques coûteux sans justification, mais aussi de l’emprise d’internet sur ces élèves qui, comme beaucoup, lors d’exposé, se contentent de recopier un article Wikipédia (ou autre) qu’ils ont trouvé sur le net, et sans pouvoir expliquer les termes qu’ils emploient. Certains pourraient alors voir ce propos comme réactionnaire : « il faut vivre avec son temps, il faut habituer les jeunes au numérique, etc. » Sauf que, premièrement, les jeunes n’ont pas attendu l’école pour appréhender les nouvelles technologies. Deuxièmement, des pays très « technophiles » comme la Corée du Sud, le Japon ou l’Estonie, sont les pays les moins outillés numériquement en classe tout en étant dans les mieux classés au classement PISA.
Alors, quelle serait l’une des solutions à ce délitement générale de l’école ? Pour Lisa Kamen-Hirsig, qui cite l’économiste libéral du XIXe Frédéric Bastiat, la liberté éducative résoudrait une partie des problèmes. Elle prône l’abolition de la carte scolaire, le libre-choix des parents et des élèves dans le choix de l’école et la concurrence entre les établissements afin que les écoles « puissent proposer des projets variés et adaptés à la diversité des enfants tout en se mesurant les unes aux autres, comme le font les entreprises dont seules les plus performantes survivent » (p.151) Elle estime que d’avoir le choix et de l’exercer librement, c’est se responsabiliser. Responsabiliser les élèves, les parents, les professeurs, mais aussi les directeurs d’établissement qui seraient libre de composer et de manager leur équipe éducative. Elle émet l’idée d’un chèque éducation, à l’image de ce que propose l’IREF. Se félicitant des nombreuses initiatives privées qui fleurissent en France « malgré tous les bâtons que l’Etat tente de mettre dans les roues des créateurs d’école », elle rappelle que « les pays dont les performances éducatives sont les meilleures […] sont ceux qui laissent une totale autonomie aux écoles et dans lesquels il n’existe ni ministère de l’Education ni corps d’inspection. » (p.152) Elle cite comme exemples la Finlande, l’Estonie et la Suisse.
Enfin, elle appelle les parents à s’investir dans l’instruction de leurs enfants, à suivre les réunions parents-professeurs et le sens des cours donnés, à critiquer (positivement comme négativement) avec son enfant le contenu des programmes, à se procurer d’anciens manuels plus qualitatifs que les récents, etc. A ce titre, elle dénonce l’attaque de l’instruction familiale par l’Etat.
Dans son ouvrage, Lisa Kamen-Hirsig évoque de nombreux autres sujets tout aussi intéressants. A ce titre, son livre est indispensable et vient compléter et actualiser ceux de Philippe Némo (Le Chaos pédagogique, Pourquoi ont-ils tué Jules Ferry ?, par exemple) ou bien encore La fabrique du crétin de Jean-Paul Brighelli.
4 commentaires
Dommage qu’à quelques lignes de la fin de l’article , l’adjectif « qualitatif » , incongru, vienne abimer ce qui précédait.
Je me suis fait exactement la même réflexion. On pardonnera à notre auteur qui, j’en suis sûr, tiendra compte à l’avenir de votre remarque.
quel plaisir de lire tout ça, on peut rêver un peu que l’emprise etatique se desserre progressivement, ce qui est la cause d’absolument tous les maux qui affligent la france depuis 1974…
Quel courage qu’a Lisa de critiquer les procédés de l’Education Nationale dont l’enseignement, comme le reste, part à la dérive ! Avec l’invasion l’enseignement cultive des ânes, au lieu de remonter par le haut il rabaisse par le bas. Il ne faut surtout pas offusquer les cancres ou les enfants en grande difficulté !