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Le procès de l’étatisme français

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Quelques beaux scandales ont mis en scène les princes qui nous gouvernent.

Avant de prendre la direction du développement de l’IREF, Nicolas Lecaussin a été un auteur à succès, notamment avec son ouvrage « Cet Etat qui tue la France » (Plon, 2004). Le procès pénal de Jacques Chirac lui donne l’occasion de rappeler quelques hauts faits de la classe politique française .

Le procès de l’ancien président Jacques Chirac pour « détournement de fonds publics » et « abus de confiance » visant vingt et un emplois présumés fictifs à son cabinet de maire de Paris entre 1992 et 1995 se tiendra du 7 mars au 8 avril 2011. Renvoyé en correctionnelle en octobre 2009, après douze ans d’immunité pénale due à sa fonction de chef d’Etat, Jacques Chirac, 77 ans, encourt en théorie dans ce dossier jusqu’à dix ans de prison et 150 000 euros d’amende. Neuf autres personnes, dont ses ex-directeurs de cabinet, ainsi que le petit-fils du fondateur de la Ve République, Jean de Gaulle, seront jugées avec lui.

Le tribunal correctionnel a accepté de repousser le procès, initialement prévu en novembre, à l’année prochaine, afin de permettre le lien avec une autre affaire instruite à Nanterre (Hauts-de-Seine), visant sept autres emplois présumés fictifs. Jacques Chirac y est mis en examen pour « prise illégale d’intérêts ».

La fixation des dates du procès intervient quatre jours après le vote par le Conseil de Paris d’un accord indemnisant la Ville à hauteur de 2,2 millions d’euros, dont 1,65 million versé par le parti de droite UMP (Union pour un mouvement populaire) – donc par les contribuables français – et 550 000 euros par Jacques Chirac lui-même. Lorsqu’il était maire de Paris (1977-1995), avant son élection à la présidence française, Jacques Chirac est accusé d’avoir mis en place un système d’emplois fictifs. Certains de ses proches étaient rémunérés par la mairie sans y avoir de fonction réelle. Certains aussi travaillaient en réalité pour le RPR, le parti gaulliste qui est devenu par la suite l’UMP.

Corruption d’Etat : une longue tradition

Certes la tradition est ancienne, le scandale des décorations avec Wilson ou du canal de Panama ont illustré la IIIème République fleurissante, l’affaire des piastres ou le scandale des vins ont égayé la IVème. Mais la Vème fait mieux, parce que l’étatisme a progressé.

Ce procès qui aura donc lieu au printemps prochain est plus que le jugement d’un ancien politique. C’est aussi le procès de l’étatisme français qui a donné lieu sous la Ve République à de nombreuses affaires de corruption impliquant les plus hautes sphères de l’Etat dans le mépris le plus total du peuple et des contribuables.

La France est un pays où l’on a vu mis en examen, voire condamnés, un président du Conseil constitutionnel, un président de l’Assemblée nationale, plusieurs gardes des Sceaux, un gouverneur de la Banque de France, les deux derniers présidents de la République ainsi qu’un ancien Premier ministre . Cela ressemble plus à une République bananière qu’à un pays riche et démocratique. Malheureusement, ces histoires de corruption étatique n’ont cessé de s’empiler sur les bureaux des juges depuis environ un demi siècle, marqué par l’étatisation massive de la France.

Abus de biens sociaux, détournements de fonds, enrichissements personnels, emplois fictifs, ou délits d’initiés sont les formes de corruption les plus répandues aujourd’hui et la liste d’élus et d’hommes d’Etat condamnés ou mis en examen est très longue. Si les chefs d’entreprise condamnés à la prison ferme sont nombreux, on ne peut pas en dire autant des politiques ou des hauts fonctionnaires coupables de méfaits peut-être encore plus graves. Car ces derniers bénéficient de relations, sont protégés par l’immunité parlementaire et peuvent se cacher derrière l’opacité des fonds publics. Lorsqu’une administration attribue une subvention à une association d’une utilité imaginaire, il s’agit bel et bien d’une forfaiture. Surtout si à la tête de l’association se trouvent des amis personnels ou politiques du décideur de l’administration.

Une liste « sélective » d’affaires

Au sein des partis politiques ou d’autres organismes publics et para-publics, la dilapidation d’argent public est au moins aussi grave. Voici quelques rappels sélectifs de plusieurs « affaires » célèbres : L’affaire Urba et le financement du Parti socialiste ; L’affaire Pechiney-Triangle (un scandale politico-financier de la fin des années 1980. La société nationalisée française Pechiney annonce une OPA sur ce titre sur la société américaine Triangle, cotée à New York. Des hommes de l’appareil d’État ayant été mis au courant de l’opération, certains d’entre eux en profitent pour commettre alors un délit d’initié. Mais très vite les autorités boursières américaines en avertissent la Commission des opérations de bourse française. Une procédure judiciaire est alors mise en route et neuf acteurs sont inculpés, parmi lesquels : un ancien directeur de cabinet du ministre des Finances, un proche du président Mitterrand, un financier du Parti socialiste) ; L’affaire ELF (une vaste et longue affaire politico-financière qui a éclaté en 1994. L’instruction du juge Eva Joly va rapidement mettre au jour un impressionnant réseau de corruption, mettant en cause politiques et grands patrons. Cette affaire est l’exemple parfait de la corruption d’Etat dans laquelle sont impliqués des ministres, des hauts fonctionnaires, l’Elysée et sa « cellule » Afrique, des dirigeants d’entreprises d’Etat) ; L’affaire de la vente de six frégates à Taïwan en 1991 (liée à l’affaire ELF, celle-ci révèle l’implication de l’Elysée dans le versement des commissions occultes) ; L’affaire Méry ou celle des HLM (logements sociaux) du milieu des années 1980 impliquant un futur président de la République et mettant en cause tout un système de financement des partis politiques grâce à l’attribution des marchés publics. A noter que, même si c’est la personne Jacques Chirac qui a été le plus citée dans cette affaire, tous les partis politiques à l’exception du FN se sont servis ; L’Affaire des ventes d’armes en Angola en 1992-1993 ou affaire Falcone (une affaire judiciaire dans laquelle sont impliquées plusieurs personnalités politiques françaises de premier plan parmi lesquelles un ancien ministre de l’Intérieur, un fils de président de la république, deux milliardaires, un ancien préfet, un général, un magistrat et ancien député) ; L’affaire des marchés truqués des lycées de l’Île-de-France jugée au printemps 2005 (Un système de racket commencé en réalité dans les années 1960-1970 par le Parti communiste puis développé par le Parti socialiste (révélé par l’affaire Urba-Gracco). En gros, il s’agit d’innombrables marchés payés avec l’argent des contribuables et attribués par le conseil régional d’Île-de-France (alors présidé par le futur ministre RPR Michel Giraud, puis le gaulliste Pierre-Charles Krieg, et de nouveau par Giraud) en violation du Code des marchés publics. C’est, d’après le juge, un « dispositif d’entente anticoncurrentielle, de favoritisme, de pratique corruptrices » et d’un « marché » de bakchichs au profit des politiques. Ainsi, 2% du montant des marchés devaient être versés par les entreprises aux différents partis politiques).

Les affaires des dernières années ont encore davantage terni l’image de la France et l’ont fait baisser dans le classement de l’indice de la corruption réalisé tous les ans par Transparency International. Ce n’est donc pas par hasard si la France descend de la 19ème à la 23ème position dans le classement et se situe désormais au même niveau que le Chili et l’Uruguay. Elle est devancée par tous les pays importants de l’Union Européenne à l’exception de l’Italie. La corrélation est évidente entre la part du secteur public dans l’économie d’un pays et l’importance de la corruption.

A voir toutes ces tricheries (et ce n’est qu’une petite sélection) impliquant directement ou indirectement l’Etat, les collectivités d’Etat, les fonctionnaires et hauts-fonctionnaires, les politiques et autres responsables d’entreprise ou institutions publiques, on peut honnêtement se demander si notre secteur d’Etat qui veut réglementer et contrôler le marché et le capitalisme et lutter contre la spéculation n’est pas une « association de brigands » comme disait Lysander Spooner. C’est l’Etat qui devrait être contrôlé et réglementé ! En attendant le procès de l’étatisme…

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3 commentaires

Anonyme 14 octobre 2010 - 9:23

emplois présumés fictifs
Votre article lumineux et mesuré…mais votre honneur de rédacteur serait d’écrire: « des emplois soupçonnés d’être fictifs » et non pas « des emplois présumés fictifs », car si les emplois sont présumés fictifs, alors les créateurs de ces emplois sont présumés coupables…avant le procès!

Je ne suis pas plus optimiste que vous sur l’issue du procès, mais notre exigence de démocrates veut que nous fassions crédit du doute positif jusqu’à la minute du jugement, après lequel seulement nous aurons peut-être (probablement? très probablement?) l’obligation d’écrire: des emplois jugés fictifs!

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Anonyme 16 octobre 2010 - 2:34

Certes…
Certes votre article est d’une grande justesse; les exemples abondent et le constat est clair: la France n’est pas un état de droit au niveau des standards des grandes démocraties. Aucun progrès ne semble être possible dans ce domaine en France, et l’inféodation du pouvoir judiciaire au pouvoir politique n’a fait que croître ces dernières années. Mais, au fond, ce qui m’inquiète le plus, ce n’est pas tant ce constat que l’indifférence absolue qu’il génère parmi nos concitoyens. Il est navrant de devoir constater que les Français ont finalement le système politique qu’ils méritent. Le clientélisme est l’axiome fondateur de toute démarche politique dans ce pays et la Justice n’est envisagée que comme un instrument au service du premier. Hélas, la conclusion ne peut être que civilisationnelle: les Français (et les Italiens, ainsi que bien d’autres peuples à travers le monde) ne peuvent établir collectivement un état de droit, car individuellement ils ne savent pas ce que cela signifie.

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Anonyme 16 octobre 2010 - 2:34

Certes…
Certes votre article est d’une grande justesse; les exemples abondent et le constat est clair: la France n’est pas un état de droit au niveau des standards des grandes démocraties. Aucun progrès ne semble être possible dans ce domaine en France, et l’inféodation du pouvoir judiciaire au pouvoir politique n’a fait que croître ces dernières années. Mais, au fond, ce qui m’inquiète le plus, ce n’est pas tant ce constat que l’indifférence absolue qu’il génère parmi nos concitoyens. Il est navrant de devoir constater que les Français ont finalement le système politique qu’ils méritent. Le clientélisme est l’axiome fondateur de toute démarche politique dans ce pays et la Justice n’est envisagée que comme un instrument au service du premier. Hélas, la conclusion ne peut être que civilisationnelle: les Français (et les Italiens, ainsi que bien d’autres peuples à travers le monde) ne peuvent établir collectivement un état de droit, car individuellement ils ne savent pas ce que cela signifie.

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