La Cour des comptes est une juridiction indépendante française chargée de s’assurer du bon emploi de l’argent public et d’en informer les citoyens.
Elle a pour fonction de contrôler la régularité des comptes publics, de l’Etat, des établissements publics nationaux, des entreprises publiques, de la sécurité sociale, ainsi que des organismes privés bénéficiant d’une aide de l’Etat. Elle élabore de ce fait des rapports thématiques et annuels, rendus public notamment via son site internet.
Elle existe sous sa forme actuelle depuis l’ère napoléonienne. Bien qu’elle ait pour rôle d’assister le Parlement et le Gouvernement, ses travaux ne bénéficient d’aucun caractère contraignant sur les établissements concernés. Toutefois, en cas de manquements graves ou d’infractions, les constations de la Cour peuvent déboucher sur des procédures mettant en jeu la responsabilité des décideurs et des gestionnaires publics. Pourtant, la Cour s’implique rarement dans celles-ci et fait appel plutôt à l’autorité compétente, soit la Cour de discipline budgétaire et financière, soit le système judiciaire. Nonobstant le travail d’ombre réalisé par la Cour des comptes, son rapport annuel est bien connu du grand public.
Mis en lumière chaque année, il est de coutume, s’appuyant sur les observations de la Cour, de pointer du doigt- les dysfonctionnements de l’administration française. Ceux-ci monopolisent l’actualité pendant deux à trois semaines, avant de retomber dans l’oubli… De la sorte, certaines observations reviennent régulièrement sur le devant de la scène. En effet, face à la répétition des recommandations de la Cour, l’Etat français apparaît comme un conservateur peu enclin à changer ses habitudes. Lorsque certaines recommandations de la Cour se font entendre et sont suivies d’effet, son rythme d’application de nouveauté est à l’image de sa volition à réformer. Bien que la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 2001, s’appliquant à toute l’administration depuis 2006, confie à la Cour des comptes la mission d’émettre un rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques, les recommandations qui en ressortent, demeurent facultatives…
Pour autant, la Cour s’attache depuis peu à faire, ou non, un suivi des prises en comptes de ses recommandations pour certains de ses travaux. Face à ce manque, la Cour apparaitrait comme inutile aux yeux de la population…
L’intérêt du travail, ici présenté, est de mesurer si le reproche émis à l’encontre de cette juridiction est fondé. Du fait de la pléthore de rapports réalisés par la Cour, ainsi que de l’ancienneté de ses contrôles, le champ d’étude a été recentré sur la période couvrant 2007 à 2012. Par ailleurs, une focalisation, sans restriction cependant, a été exercée sur les sujets n’ayant pas fait l’objet de suivis par la dite Cour elle-même. Ce sont tout aussi bien les rapports thématiques que les rapports annuels qui ont été épluchés. Afin d’en simplifier la lecture, nous avons opté pour un regroupement par thèmes et non par années.
Par ailleurs, considérant l’ambiguïté du suivi, ou non, de certaines de ces recommandations, le travail présenté ne peut être considéré comme exhaustif, l’essentiel du corps de celles-ci pour chaque sujet ayant été volontairement privilégié. Cependant l’étude a pour objet de confirmer, ou d’infirmer, l’immobilisme français caractéristique dès qu’il s’agit de réformes. Sans exclure de nos travaux une logique comparative, la dichotomie entre la juridiction française et celle du Royaume-Uni clôturera notre présentation.
La mise en lumière de l’attention portée aux travaux de la Cour des comptes se présentera sous les points suivants :
– L’IREF s’est penché sur 73 rapports émis par la Cour des comptes sur la période 2007-2012.
– 35 rapports ont connu un suivi partiel des recommandations formulées.
– 31 rapports sont tombés dans l’oubli sans qu’aucune recommandation n’ait été suivie.
– Seulement 7 rapports ont été suivis en totalité.
– Aucune donnée n’existe concernant les économies réalisées à l’aide des travaux de la Cour des comptes.
– A titre de comparaison, les travaux de l’agence britannique – NAO (national Audit Office) – ont permis d’économiser près de 5 milliards de livres sterling aux contribuables de 2007 à 2012.
– Pour chaque euro dépensé, l’agence britannique optimise la dépense publique de 16 euros.
– L’IREF propose la mise en place d’un vrai contrôle de l’efficacité des dépenses publiques sur le modèle du NAO britannique
2 commentaires
L'efficacité française !
La cour des comptes sert uniquement à payer de nombreuses personnes par les impôts des français afin que les multiples rapports finissent à la poubelle ou aux archives…!
Je reproduis l'un des paragraphes de votre texte ci-dessus qui résume parfaitement le génie français..!
"Un groupe de travail a été formé, piloté par la DARES (direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques), en collaboration avec la CNIS, l’Insee, l’ANSP[17], l’Ircem, l’Acoss et la DGCIS".
Le dernier ferme la porte….!
Mais si, si….!??
Pauvre France.
Précisions de la Cour des comptes
Cet article appelle de la part de la Cour des comptes les précisions suivantes :
• la méthodologie employée par l’Iref est contestable, car partielle et partiale, puisque portant sur seulement 73 rapports publiés durant la période 2007-2012, alors que la Cour a publié 84 rapports pour la seule année 2012 ! La Cour procède elle à un suivi exhaustif des recommandations qu’elle formule. Ce suivi s’analyse en 2014 sur la totalité des 1924 recommandations formulées, conformément au souhait du législateur, au cours des années 2011 à 2013. Comme le démontre le tome II du rapport public annuel 2015, il en ressort que 69,8 % des recommandations ont été partiellement ou totalement mises en œuvre. Si l’on veut un exemple récent : le projet de seconde gare TGV en Lorraine vient d’être abandonné, après que la Cour a critiqué dans son rapport public annuel 2013 la construction envisagée de deux gares TGV quasi mitoyennes en Lorraine ;
• quelle que soit l’interprétation de cet indicateur, réduire l’utilité de la Cour à la mesure de la mise en œuvre de ses recommandations est réducteur et ne permet pas de prendre la pleine mesure de son rôle et de ses missions. Il faut d’abord souligner sa mission traditionnelle de juge des comptes des comptables publics, ainsi que celle de contrôle du bon emploi des fonds publics, qu’il convient de ne pas négliger car elles sont garantes de la probité et de la régularité des comptables et des comptes publics. Depuis plus récemment, la Cour certifie les comptes de l’État et de la sécurité sociale, garantissant ainsi la qualité de l’information financière sur les comptes publics. La Cour assiste en outre le Parlement et le Gouvernement dans l’évaluation des politiques publiques. Enfin, la Cour exerce une mission constitutionnelle d’information des citoyens, par le biais de laquelle elle agit comme un véritable lanceur d’alerte institutionnel. C’est bien à l’aune de l’utilité et de la nécessité de l’ensemble de ces missions qu’il faut juger de l’utilité de la Cour ;
• quant aux comparaisons budgétaires entre le NAO et la Cour des comptes, elles sont erronées : le chiffre de 206 millions d’euros qui est cité est celui de l’ensemble des juridictions financières, c’est-à-dire qu’il inclut la Cour des comptes et les chambres régionales et territoriales des comptes. Si l’on veut comparer stricto sensu le budget de la Cour avec son homologue anglaise, le chiffre pour la Cour des comptes est de 77,5 millions d’euros (hors contribution au CAS Pensions), pour un effectif de 725 personnes, contre un effectif de 822 au NAO. Le budget et les effectifs de la Cour sont donc inférieurs à ceux du NAO et rien ne saurait justifier de ce point de vue une évolution de la Cour des comptes vers le modèle anglo-saxon ;
• en outre, l’approche du NAO en terme de « value for money », visant à relier le budget du NAO avec des économies quantifiables, n’est pas exempte de critiques, parmi laquelle la principale est que les « économies » calculées par le NAO ne sont pas toutes des diminutions nettes de dépenses publiques, car le NAO comptabilise également comme des « économies » des mesures visant à une plus grande efficience des politiques publiques;
• enfin, si la Cour est sensible au souhait exprimé de voir mieux pris en compte ses recommandations, elle réfute tout pouvoir de coercition attribué à la Cour ou toute évolution tendant à instaurer un gouvernement des juges, en dehors de ses fonctions juridictionnelles. Il est légitime en démocratie que la décision revienne aux citoyens et à leurs représentants élus, informés et éclairés par les publications de la Cour.