5 mai 2025, Donald Trump – comme à son habitude – secoue l’opinion publique avec deux annonces choc qui paraissent le même jour : l’imposition de droits de douane de 100 % sur les films produits à l’étranger et la réouverture de la prison d’Alcatraz pour y enfermer « les criminels les plus dangereux ». Ces décisions dévoilées via Truth Social (sa plateforme de prédilection) laissent une partie de l’Amérique et des pays à l’international perplexe. Trump se transformerait-il en auteur de (mauvais) scénario hollywoodien ?
Le président justifie sa proposition d’instaurer des droits de douane sur les films étrangers par un constat aussi alarmant que (partiellement) réaliste. Pour lui, l’industrie cinématographique américaine est en passe de s’éteindre, les nombreuses incitations financières offertes par d’autres pays (Canada, Royaume-Uni, Australien Nouvelle-Zélande…) amenant les studios américains à tourner leurs films à l’étranger, là où la main-d’œuvre est moins chère et la fiscalité plus avantageuse. Il n’a pas tout à fait tort : une partie des studios fuient les Etats-Unis. A Los Angeles et alentours, la production de films et de séries a chuté de près de 40 % au cours de la dernière décennie ! Résultat : des blockbusters comme Mission : Impossible ou Thunderbolts sont tournés, en partie ou en totalité, sous d’autres cieux, privant la Californie de retombées économiques estimées à plusieurs milliards de dollars par an.
Tous contre le cinéma américain !
Trump présente donc l’introduction de ces droits de douane comme la réponse à une volonté délibérée cinématographie américaine. On se rappelle sa sortie à propos du film sud-coréen Parasite qui avait emporté l’Oscar du meilleur film en 2020 : « Et le gagnant est… un film de Corée du Sud ! C’était quoi ça ? On a assez de problèmes avec la Corée du Sud avec le commerce, et en plus, ils leur donnent le meilleur film de l’année ? ».
Toutefois comment définir ce qui relève du « film étranger » dans une industrie fortement mondialisée ? Qu’est-ce qui constitue l’essence même d’un film américain ? L’origine de son financement, son scénario, son réalisateur, ses acteurs, son lieu de tournage ? Autant de questions sans réponses claires.
Selon Tom Nunan, il serait bien plus efficace de miser sur des incitations fiscales nationales que sur des taxes punitives pour attirer les producteurs. Surtout que des pays comme la Chine, qui ont déjà réduit leurs quotas de films américains diffusés dans les salles, pourraient riposter. Une partie des cinéastes craignent une véritable apocalypse cinématographique en cas de représailles internationales et expriment leur sidération face à une mesure jugée aussi irréalisable que destructrice pour une industrie qui exporte trois fois plus qu’elle n’importe !
Un nouvel Alcatraz
Dans un même élan, le président Trump déclare vouloir « reconstruire et rouvrir Alcatraz » pour y incarcérer « les criminels les plus violents et les plus dangereux ». Fermé en 1963 en raison de coûts d’exploitation prohibitifs (trois fois supérieurs à ceux d’une prison classique), le pénitencier, situé sur une île de la baie de San Francisco, est aujourd’hui devenu un parc touristique attirant jusqu’à 1,4 million de touristes par an. Cette promesse de réouverture est officiellement donnée comme un gage de retour à l’ordre mais elle ressemble bien à un clin d’œil adressé au président du Salvador, Nayib Bukele, qui construit son image de marque à grands renforts médiatiques.
Ronald Reagan avait déjà envisagé d’utiliser Alcatraz afin d’ « accueillir » des réfugiés cubains dans les années 1980, sans succès. D’un point de vue pratique, sa réouverture d’Alcatraz poserait des défis colossaux et nécessiterait des investissements massifs. C’est une île, tout doit être acheminé par bateau, il faudrait réaménager, reconstruire, agrandir, moderniser… alors que la trésorerie du Bureau fédéral des prisons n’est pas florissante et qu’il manque de personnel.
Par ailleurs, on ignore encore ce que recouvre l’appellation plutôt vague de « pires criminels ». Donald Trump l’affirme haut et fort, les Américains « ne serons plus pris en otage par des criminels, des voyous et des juges, qui ont peur de faire leur travail et d’expulser ceux qui sont entrés illégalement dans notre pays. » Dans cette masse se retrouvent pêle-mêle les « délinquants violents et récidivistes », les immigrants illégaux, les profils « radicalisés », les juges étant épinglés au passage. Mettez le tout dans un chaudron et attendez !
La réouverture d’Alcatraz a des allures de mirage politique. Les propositions autour du problème migratoire s’accumulent (la dernière en date étant d’offrir 1 000 dollars à chaque migrant illégal acceptant de quitter le sol américain) et Trump cherche à galvaniser sa base en soignant son image de président fort en toutes circonstances. La suite au prochain épisode. Blockbuster ou nanar ?