Ce n’est pas la première fois que Sylvain Tesson relate ses exploits, non pas pour épater mais plutôt pour partager le bénéfice qu’il en tire. « Ne sachant peindre, je m’en vais. Ne sachant prier, je grimpe». C’est ainsi qu’il justifie sa traque, tout autour du monde, des piliers de la mer qu’il va escalader un à un. Le lecteur a vite fait de comprendre la valeur allégorique de ces stacks, sentinelles rocheuses détachées de la côte, qui se lèvent fièrement solitaires, résistant au temps, à l’érosion, aux tempêtes, au tourisme. Ne sont-elles pas semblables à l’auteur lui-même qui se réfugie dans la certitude que sans le dépassement de soi tout est tristesse et dégradation. La liste des stacks pris à l’assaut est longue et variée, mais jamais lassante, toujours excitante. Les roches ne sont jamais les mêmes, de même que la stratégie pour les vaincre.
Les végétaux sont rares mais les oiseaux pullulent. A la grandeur du paysage se joint la noblesse des sentiments, la joie de la liberté durement acquise, et la découverte que la main de l’homme a le même dessein que celui du Créateur. La tentation banale et mesquine  du vide et du vertige est recouverte par des strates de sentiments multiples de la naissance jusqu’au dernier jour, par des surprises inattendues où le morbide est chassé par la contemplation. Ainsi Sylvain Tesson rejoint Christophe Ono-dit-Biot dans sa perception du cÅ“ur humain qu’il perçoit comme un container bien rempli…