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Futur énergétique : la France va-t-elle dans le mur ?

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La crise énergétique que nous vivons à l’échelle de la France, est aussi globale. Les raisons sont multiples : forte demande en Asie, fragilité des infrastructures russes, augmentation du prix de la tonne de carbone et indexation du prix du gaz sur celui du pétrole. Les nombreux débats autour des énergies renouvelables, du nucléaire et des énergies fossiles n’ont guère rendu très claire, jusqu’ici, la vision de nos dirigeants à court, moyen et long terme en matière de politique énergétique.

L’énergie nucléaire, une énergie d’avenir mais pas seulement

Le rapport, à paraître prochainement, de Réseau de transport d’électricité (RTE), va dessiner plusieurs scénarios sur le futur de la consommation électrique en France. La première certitude est que nous ne pouvons pas nous passer de l’énergie nucléaire. Son coût très modéré, moins de 50 euros le mégawattheure, a participé à l’électrification massive de notre économie. Ce coût actuel bénéficie de l’effet d’amortissement des centrales françaises dont les plus jeunes ont plus de 20 ans.
Emmanuel Macron, lors de la présentation du plan France 2030, a annoncé la construction de petits réacteurs (SMR). Cependant, cette technologie ne devrait pas être opérationnelle avant 2030. Autre aspect, les retards du chantier de l’EPR de Flamanville rappellent que la construction d’une centrale nucléaire prend du temps, entre 10 et 15 ans, et qu’elle coûte cher. Une interrogation majeure demeure sur le coût de production du nouveau nucléaire qui risque de ne pas être aussi bas que celui de l’ancien. Les besoins en énergie vont nécessairement augmenter d’ici à 2050 avec la fin du chauffage au gaz, la fin de la voiture thermique et un nombre toujours plus élevé d’objets connectés. Une partie de cette augmentation pourra être compensée par les dispositifs de sobriété énergétique et l’isolation des bâtiments anciens, mais cela ne suffira probablement pas. La production nucléaire dans la production totale devrait rester stable, voire légèrement augmenter, en valeur absolue mais elle va baisser en part relative d’ici à 2035. Les premières estimations du gestionnaire de réseau RTE table sur un besoin électrique de 630 TWh en 2050 contre 450 en 2020.

Comment dès lors diversifier notre mix énergétique ? La volonté affichée du gouvernement et de l’Europe, de tendre vers un tout électrique, a une vertu : nous dégager de notre dépendance en gaz et en pétrole. Mais avec pour conséquence une tension sur la production électrique. RTE a d’ores et déjà signalé qu’il y aurait des difficultés d’approvisionnement lors des périodes hivernales 2021-2024, dues à la sortie du charbon en 2022 et aux retards dans la mise en route de la centrale de Flamanville.

Le manque de vision à terme du gouvernement en matière de production électrique

RTE, EDF et les autres producteurs d’électricité planchent déjà sur des scénarios pour résoudre ce problème. Aujourd’hui, EDF fonctionne sur le principe du « merit order ». La demande régulière est satisfaite par une base de production fixe et relativement facile à piloter, provenant du nucléaire et de barrages hydro-électrique. Les besoins plus variables sont assurés par une part de nucléaire (moins pilotable) et par des énergies renouvelables. Pour le reste, qui dépend notamment du climat et de la saison, on a en partie recours à des centrales à gaz, dont la production électrique a le mérite de démarrer en quelques minutes. Ce principe du « merit order » permet en outre de maintenir un prix de l’électricité plutôt bas.

Cependant, la programmation pluriannuelle de l’énergie, la « Stratégie nationale bas carbone » et la taxonomie européenne prévoient la fin de la production d’électricité à base d’énergie fossile. On touche ici les limites de la vision énergétique de la France et de l’Europe à long terme. Il n’est pas raisonnable de se priver d’une source d’électricité, certes polluante mais moins que le charbon ou le pétrole, capable de sécuriser la production électrique du pays dans des moments de pics de froid. En cas de grand froid, où les éoliennes et les panneaux solaires seraient inopérants, il suffirait que des centrales nucléaires soient à l’arrêt pour maintenance, et la France basculerait dans une situation de fragilité énergétique. La production d’électricité à base de gaz se situait, en 2020, autour de 10% et jouait un effet d’amortisseur lors des vagues de froid puisque la production est très flexible. Il serait suicidaire de se passer de cette sécurité et pourtant la ministre Barbara Pompili a annoncé la fermeture à terme des dernières centrales à gaz.

La France doit se positionner sur l’hydrogène… et vite

La France et l’Europe ont raté les dernières grandes innovations technologiques et numériques, elles ne peuvent pas se permettre de rater le train de l’innovation en matière énergétique. L’hydrogène est une opportunité formidable. En effet, 1 litre d’hydrogène produit trois fois plus d’énergie qu’1 litre de pétrole. C’est encore, aujourd’hui, un secteur de niche, mais il ne devrait pas le rester longtemps. Les Chinois et les Américains se sont déjà positionnés sur le marché de la production d’hydrogène qui pourrait à terme remplacer le pétrole pour les moteurs de voiture. Les Américains produisent déjà plus de 200 millions de tonnes d’hydrogène par an. Nous en sommes encore loin.

En septembre 2020, les ministres Barbara Pompili et Bruno Le Maire ont annoncé le déblocage de 7 milliards € dans le cadre du déploiement de la Stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène. Emmanuel Macron a renchéri avec un investissement supplémentaire de 5 milliards €. Des sommes importantes, mais nous manquons de précisons sur la manière dont elles doivent être utilisées. Le gouvernement anticipe la production, d’une part d’hydrogène vert grâce aux énergies renouvelables, d’autre part d’hydrogène jaune grâce au nucléaire. Pour autant, la production d’hydrogène en France ne peut aller de pair avec celle de piles à combustibles et d’électrolyseurs .Cette production est, à l’heure actuelle, principalement localisée en Chine et aux Etats-Unis.

C’est ici que le bât blesse. Malgré la multiplication des dispositifs d’aide, la fiscalité sur la production risque de devenir rapidement problématique pour atteindre les objectifs. Il est à craindre que grâce à ces financements la recherche et développement se fasse en France, mais que la phase industrielle ait lieu en Allemagne. En effet, l’Allemagne dispose d’infrastructures industrielles plus avancées que la France en matière de production d’hydrogène. Sans compter que le coût du travail et la fiscalité sur la production y sont moins importants. Le gouvernement et nos hommes politiques nous nous promettent monts et merveilles. Or nous avons déjà été échaudés, dans bien des domaines. Et le flou entretenu sur la réalité concrète de notre avenir énergétique, malgré l’annonce de financements mirifiques, n’est pas fait pour nous rassurer.

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6 commentaires

Claude Courty 29 octobre 2021 - 1:52

Futur énergétique : la France va-t-elle dans le mur ?
La France va dans le mur, comme tous les pays du monde, qui ne peuvent que subir les effets de besoins croissant sans cesse avec la surpopulation mondiale, à commencer par la multitude voulant légitimement s’extraire de la misère dans laquelle etlle survit en continuant de proliférer.
Rien de réaliste ni de durable ne sera fait tant que la dimension démographique des problèmes posés à l’humanité et à son habitat ne sera pas abordée et traitée avec la conscience, la détermination et les moyens – éthiques – qu’elle requiert.

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Bernard GUILHON 29 octobre 2021 - 7:45

Futur énergétique : la France va-t-elle dans le mur ?
« Les Américains produisent déjà plus de 200 millions de tonnes d’hydrogène par an. »
A quel prix?

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astérix 29 octobre 2021 - 10:46

Futur énergétique : la France va-t-elle dans le mur ?
La France va dans le mur car nos gouvernants écoutent ces crétins de verts qui pensent que les éoliennes permettront de faire face !! ???
Ce qui est une parfaite imbécilité.
Il faut arrêter d’implanter des éoliennes comme le préconisait déjà V.G.E.

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Pierre-Ernest 31 octobre 2021 - 8:41

Futur énergétique : la France va-t-elle dans le mur ?
« 1 litre d’hydrogène produit trois fois plus d’énergie qu’1 litre de pétrole »
Non. La comparaison vaut pour 1 kg d’hydrogène et 1 kg de pétrole. (La valeur exacte du rapport est de 2,90 avec les chiffres de Wikipédia). Mais l’hydrogène doit être à -253 degrés pour que cette affirmation soit vraie. En fait, la comparaison en volume doit être : « 1 litre d’hydrogène produit 4 fois moins d’énergie qu’1 litre de pétrole (rapport exact : 4,09 avec les chiffres de Wikipédia) ».
De plus, sous 700 bars de pression, ce qui semble devenir le standard pour une utilisation élargie de l’hydrogène, le rapport devient : « 1 litre d’hydrogène produit 7 fois moins d’énergie qu’1 litre de pétrole (rapport exact : 6,90 avec les chiffres de Wikipédia) ». Même liquide, l’hydrogène est très, très léger…

L’enthousiasme peut faire dire des bêtises. Attention à ne pas prendre des décisions sur des valeurs inexactes.

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Lombled 1 novembre 2021 - 3:43

Futur énergétique : la France va-t-elle dans le mur ?
Monsieur Pierre-Ernest a raison et de plus l’hydrogène est explosif, donc très dangereux.

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elyseeG 8 novembre 2021 - 11:18

Futur énergétique : la France va-t-elle dans le mur ?
Bonjour, je répond à : Le 29 octobre à 01:52, Claude Courty :
Dans l’absolu vous avez raison. Vu le développement anarchique des pays ( richesses – religions – cultures ), la terre étant un monde finit , immanquablement on arrive aux limites avec la surpopulation. Même avec une planification idéologique de l’équité et du partage des ressources, on arrivera au même constat.
Ceci étant dit quel organisme supra-national saura convaincre/imposer une planification et limitation de la population ?
Cet accord utopique ne sera jamais dans la main des hommes, sauf cataclysme mondial inéluctable. Par contre je vois très bien la nature reprendre ses droits.
La surpopulation engendre la dégradation du milieu naturel. Elle a les ressources pour solutionner le problème.
Ses critères ne seront surement pas la nationalité, la religion, la culture.

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