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Le contrôle aérien, une honte française

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Ceux qui verront cet été leur avion cloué au sol ou simplement retardé, ou encore dont le vol aura accusé un important retard à l’atterrissage, gagneront à lire les rapports d’information que le sénateur Vincent Capo-Canellas, élu du Bourget, a consacrés au contrôle aérien (rapports d’informations n° 568, 13 juin 2018 et n°758, 21 juin 2023).

Si les privilèges exorbitants dont bénéficient les contrôleurs aériens sont connus de longue date (rémunérations très élevées pour des agents relevant du statut de la fonction publique, durée du travail plus faible que celle de leurs homologues européens, productivité parmi les plus faibles de l’Union européenne, régime de retraite dérogatoire épargné de la dernière réforme en raison du pouvoir de nuisance des agents et de leurs syndicats…), le sénateur, tout en faisant état  d’une coupable mansuétude vis-à-vis des personnels du contrôle aérien, prononce un réquisitoire sévère contre les errements de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), de ses corporatismes endémiques et  de mauvaise gestion. Bref, un condensé de dysfonctionnements dont les responsables n’ont jamais été – et ne seront sans doute jamais – sanctionnés.

Voici quelques faits et chiffres éloquents :

  • Les défaillances du contrôle aérien français (désorganisation, incapacité à faire face aux pics d’activité, pannes…) sont à elles seules responsables de près de 80 % des vols retardés (dont 20 % du fait des grèves des personnels) ;
  • La France est à elle seule responsable de 33 % des retards européens imputables à la navigation aérienne alors que le pays représente 20 % du trafic européen consolidé (trafic domestique, trafic français à destination de l’étranger, trafic européen et transit international confondus) suscitant la réprobation de tous nos partenaires européens et des compagnies internationales survolant le sol français ;
  • De 2004 à 2016, 67 % des jours de grève des contrôleurs aériens en Europe se sont produits en France ;
  • Bien que responsable de la plus grande partie des retards, le contrôle aérien français reste, 11 ans après la loi Diard, exempté du préavis applicable au secteur du transport alors que les compagnies aériennes qui n’assument qu’une faible part des retards y sont soumises ;
  • Les contrôleurs aériens français continuent d’utiliser des bandelettes de papier – (les « strips ») – qui leur donnent un certain nombre d’informations (indicatif du vol, type d’appareil, destination, route, altitude prévue) et sur lesquelles ils notent les instructions transmises aux pilotes des avions contrôlés.
  • La DGAC a été incapable, depuis 10 ans, de mener à bien un chantier de modernisation de ses infrastructures informatiques, gaspillant ainsi en pure perte plusieurs centaines de millions d’euros.

Les répercussions économiques de ces dysfonctionnements (en France, en Europe et dans le monde) sont astronomiques : pour les compagnies aériennes (annulations de vols, consommation superflue de kérosène, indemnités versées aux passagers), pour les millions de passagers victimes de retards de vols du fait des carences des agents de la DGAC et de ses mauvais choix d’investissements, pour les entreprises qui font voyager leurs collaborateurs, pour le secteur du tourisme et de l’évènementiel (foires et salons), et bien sûr pour les contribuables français.

Qui aura le courage de chiffrer une gabegie dont l’administration du contrôle aérien porte la plus grande part de responsabilité ?

Quant au bilan carbone d’avions contraints d’allonger leur temps de vol pour se dérouter dans l’attente de leurs autorisations, on attend que la DGAC l’évalue et, par extension, qu’elle produise « sa feuille de route de décarbonation » comme le prescrit l’article 301 de la loi Climat et Résilience du 24 août 2021.

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6 commentaires

Broussard 17 juillet 2023 - 6:33

Vive le particularisme français ! ! !

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nanard 17 juillet 2023 - 8:10

Mouais, sujet plus complexe qu’il n’y parait. Bien évidement, on retrouve l’administration administrative bien française… qui évalue toujours mal les coûts prévisionnels, qui a beaucoup de mal à synchroniser ses services et qui surajoute des normes. Ce que l’on pourrait qualifier de « caste » des contrôleurs est bien fonctionnaire et fonctionne comme telle. Toutefois, si le strip papier doit être réactualisé manuellement, car il n’est pas dynamique, ce n’est pas sa gestion qui génère à chaque fois des retards, mais « l’encombrement » , car les lignes aériennes ne sont pas des voies ferrées où l’on peut s’arrêter . Le rôle des contrôleurs est d’assurer la sécurité, en particulier le risque de collision, en assurant l’espacement des trafics. Je connais des pilotes qui racontent des « attentes » soit sur le tarmac (avant le point d’arrêt) d’une heure…. soit des attentes sur un circuit aérien avant d’intégrer la phase finale du vol en raison d’un nombre important d’arrivées simultanées…. et comme par magie, l’observateur au sol ne voit qu’un défilé régulier d’avions qui atterrissent . Ces mêmes pilotes racontent aussi parfois les difficultés de contacts radio avec les contrôleurs, en raison de la saturations des communications… Alors, oui, il semble plutôt que contrôle aérien soit mal organisé, avec des zones très (trop) denses et d’autres plus « light » . L’organisation de ce service doit certainement être revue pour mieux intégrer le contrôle en route avec les aéroports à fort trafic. Mais on peut se poser la question de la pérennité du contrôle actuel si à l’avenir, les technologies embarquées suppriment les risques de collisions, quel sera le rôle des contrôleurs alors que les vols autonomes vont se développer…. ? (Sur un aéroport proche de mon domicile, un système d’aide à l’atterrissage a été supprimé en raison des coûts de maintenance…. et une justification avancée en plus de cet argument financier était que les appareils sont et seront équipés de système GPS plus performants, et simultanément le contrôleur a été remplacé par un agent AFIS) . Les avancées technologiques pourraient bien bouleverser l’avenir du secteur aérien aussi chez les pilotes.

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Farid 17 juillet 2023 - 12:17

En tant qu’usager, je ne me plains pas du service mais plutôt de l’idéologie gauchiste qui sévit essentiellement à Orly, fief cégétiste, cancer de notre pays. Il est scandaleux que la loi Diard ne s’applique pas aux contrôleurs.

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Dudufe 17 juillet 2023 - 10:53

Qu’en pensent les escrologistes ?

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AlainD 20 juillet 2023 - 4:11

Les contrôleurs aériens, encore une exception française et quelle exception! Ces messieurs-dames forts de leur statut de fonctionnaire auquel ils s’accrochent décident quand ils le désirent de faire une grève sans préavis (tiens-donc)Voilà des gens fort bien payés qui ne travaillent par énormément mais fortement syndiqués ce qui leur confère, pensent -ils, le droit de faire ce qu’ils veulent et si d’aventure un commandant de bord se rebiffe c’est encore à lui que l’on donnera tort. Il conviendrait de mettre un terme à ces abus de pouvoir en passant au secteur privé la charge du contrôle aérien comme cela est semble t il le cas dans d’autres pays, hélas nous sommes en France !

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Dufufe 26 juillet 2023 - 11:01

Cela va être terrifiant pour les JO 2024

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