Face à la panique qu’il a créée, Trump vient de « suspendre » pour 90 jours les augmentations annoncées de droits de douane. Néanmoins, il est intéressant de comprendre combien ces droits étaient (sont) arbitraires et stupides, comme en témoigne leur application telle qu’elle était (est) prévue aux objets d’art et de collection.
Modeste amateur d’art, nous avons reçu le 9 avril un mail adressé par une vénérable maison de ventes anglaise, Spink and Son, à tous ceux qui sont abonnés à ses informations. Cette correspondance nous a décillé les yeux sur un point qui nous avait échappé et elle nous a aussi plongé dans la perplexité.
Nous précisons que nous avons rédigé la première mouture de cette pendule avant l’annonce le 9 avril par Donald Trump de la « suspension » pour 90 jours de l’entrée en vigueur des nouveaux droits de douane, à l’exception du Japon dont les droits ont encore été haussées, et de leur uniformisation à hauteur de 10 %. Ces mesures temporaires ne changent rien au fond de notre pendule dont l’objet est de montrer combien des droits protecteurs sont toujours absurdes et arbitraires.
Qu’en est-sera-t-il des objets de collection qui entrent aux Etats-Unis Nous nous plaçons donc dans l’hypothèse où les droits annoncés s’appliqueront bien aux divers pays après la fin de leur « suspension ».A vrai dire, la situation n’est pas claire. La Finestre sull’Arte (5 avril 2025) parle d’une « incertitude ». Le Journal des arts (7 avril 2025) indique : « Le marché de l’art semble épargné par les nouveaux droits, mais des incertitudes subsistent quant à la définition d’une œuvre ». Quant à The Art Newspaper (8 avril 2025), il constate une « grande confusion sur l’application des droits de douane ou non », tout en précisant que « selon la Harmonised Tariff Schedule du gouvernement américain, certains biens, dont les œuvres d’art, seraient exemptés ».
A lire l’email de Spink and Son, les objets de collection ne bénéficieraient d’aucune dérogation. Dans ce cas, prenons l’exemple suivant : vous habitez en France ; vous collectionnez les billets de banque, les pièces d’or ou les timbres-poste ; vous souhaitez vendre tout ou partie de votre collection aux Etats-Unis, qui, rappelons-le, constituent le premier marché d’art et de collections, soit nettement plus de 40 % des ventes mondiales en valeur pour l’année 2023. Quels seront les droits de taxe applicables ? Facile ! Puisqu’il n’existe aucune dérogation, le tarif douanier sur les importations communautaires doit être de 20 %. Eh bien non !
En effet, le tarif douanier s’applique suivant le pays de fabrication. Donc, il s’applique suivant le pays de fabrication de l’objet de collection. Dans notre exemple, bien que le collectionneur soit français, ses objets de collection fabriqués dans des pays étrangers ne seront pas sujets aux mêmes droits. Certes, ses monnaies antiques, grecques et romaines, seront soumises au droit de 20 % puisque la Grèce et l’Italie sont aujourd’hui membres de l’Union européenne. En revanche, ses billets de banque Ming imprimés au XIVe siècle seront soumis au droit de 104 % puisqu’ils ont bien évidemment été fabriqués en Chine. Quant à ses timbres-poste anglais du XIXe, ils seront soumis au droit britannique à hauteur de 10 %. Simple, non ?
Le marché américain, qui, comme tout marché, déteste ce type d’incertitude doit apprécier et les collectionneurs de même, qu’il s’agisse des vendeurs étrangers qui ne savent pas à quelle sauce ils seront mangés, d’autant plus que la situation peut évoluer à tout moment compte tenu de l’imprévisibilité de l’administration outre-Atlantique, ou des acheteurs américains qui subiront, quoi qu’en dise le président des Etats-Unis, d’importantes hausses de prix.
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Il vient, avec la taxation des objets d’art, d’inventer la taxe sur les biens improductifs…
Tien? j’ai déjà entendu ça quelque part!