Après l’attaque contre les écoles libres, le gouvernement s’en prend aussi aux manuels d’économie. Un arrêté sera pris fin juin afin d’ « alléger les programmes d’économie en classe de seconde ». Le but visé est celui de « soulager » les enseignants de SES (sciences économiques et sociales) qui serait une « demande ancienne » de l’APSES (Association des professeurs de sciences économiques et sociales). En réalité, c’est l’étude du fonctionnement du marché et de l’entreprise qui est surtout visée par cette mesure idéologique.
En janvier 2010, Luc Chatel, ministre de l’ancien gouvernement de droite, avait lancé « l’enseignement en économie pour tous » et les nouveaux programmes pour les classes de seconde.
Suite aux travaux de deux Commissions indépendantes, le ministre voulait généraliser l’enseignement des notions d’économie et séparer l’enseignement de cette matière et de la sociologie, une caractéristique de l’éducation nationale. Ce lien conférait aux cours une approche souvent biaisée de l’économie en privilégiant les notions marxistes de lutte des classes et d’exploitation dans une société capitaliste sans un Etat fort. La réforme de Luc Chatel n’a abouti qu’en partie tant l’opposition du corps enseignant est forte : l’association des professeurs de sciences économiques et sociales proteste et menace de «désobéissance citoyenne», au motif que l’enseignement d’économie serait désormais cantonné à «l’apprentissage d’outils abstraits» éloignés des «questions de société» et «marginaliserait les autres sciences sociales».
Avec ce qu’envisage le gouvernement actuel, il ne restera plus rien de la réforme Chatel. C’est l’étude du fonctionnement du marché qui est surtout visée aujourd’hui et cela dans le contexte de la mondialisation et du libre-échange.
Il faut d’abord remarquer que les membres des commissions pédagogiques qui sont à l’origine de ces propositions proviennent du monde enseignant et aucun chef d’entreprise ou acteur important du privé – donc connaisseur du « fonctionnement du marché » – n’est convié à s’exprimer sur ces changements. Il y a quelques années, l’IREF avait réalisé une Etude sur l’enseignement de l’économie dans 7 manuels de SES en trouvant, entre autres, que l’entreprise est souvent maltraitée au détriment de l’Etat et des acteurs publics et que les véritables sources de la création des richesses ne sont pas bien montrées aux élèves. D’où cette inculture économique et cette méfiance à l’égard de l’entreprise en France. L’allègement des programmes d’économie que veut mettre en pratique le gouvernement ne fera qu’aggraver cet état de fait. D’ailleurs, plusieurs patrons du CAC 40 s’insurgent, sous anonymat, contre cette décision (voir Les Echos du 7 juin 2016).
D’où les propositions de l’IREF, reprises par une partie des députés LR, de modifier les programmes d’économie au Lycée en rendant obligatoire l’étude de l’entreprise et son rôle dans la création de richesses, en insistant sur les portraits d’entrepreneurs qui ont réussi, et en abordant la mondialisation et l’économie de marché de manière neutre. De même, l’IREF propose d’intégrer dans les Commissions pédagogiques et parmi les auteurs des manuels scolaires des personnalités issues du monde de l’entreprise. L’objectif est de compléter les notions théoriques d’économie avec les faits et le vécu. Qui pourrait donner de meilleurs exemples de fonctionnement du marché que le chef d’entreprise ? Qui expliquerait plus clairement la concurrence, sinon le chef d’entreprise ? Enfin, c’est l’entrepreneur, la personne qui trouverait les mots les plus justes pour donner envie aux jeunes d’entreprendre.
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Passer d'étudiant en économie à professeur d'économie
Il y a quelques années, travaillant dans une TPE (7 salariés), j'ai discuté avec le copain d'une secrétaire. Il poursuivait des études d'économie.A ma question "Qu'est-ce que tu veux faire, dans la vie?" "Prof d'économie!" "Tu ne veux pas d'abord travailler dans une entreprise privée, pour voir comment ça marche?" "Pas besoin, on nous apprend tout, on sait comment ça marche"…