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Corruption : Lula avance masqué, mais ses empreintes sont omniprésentes

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Nous découvrions avec surprise le 29 mars dernier que trois partis de la gauche brésilienne, le PSOL (Parti Socialisme et Liberté, l’oxymore étant sans doute involontaire), le PCdB (Parti Communiste du Brésil) et Solidariedade (Solidarité) demandaient au Tribunal Suprême Fédéral (STF) de suspendre le paiement par les entreprises accusées de corruption active lors du procès « Lavajato » des indemnités et amendes auxquelles elles avaient été condamnées.

Les fonds détournés étaient principalement destinés au financement des partis de gauche et du centre appuyant Lula

Pour mémoire, rappelons que l’opération « Lavajato » , dirigée par le juge Moro (devenu ministre de la Justice au début du gouvernement Bolsonaro, aujourd’hui sénateur affilié à un parti de centre-droit) et le procureur Dallagnol (aujourd’hui député d’un microscopique parti de centre-droit également), a mis en lumière un système de détournement de fonds systématique au détriment des entreprises publiques (notamment Petrobras) et de rétro-commissions payées par les géants brésiliens du BTP (dont Odebrecht) pour les projets financés sur fonds publics brésiliens, y compris à l’étranger. Ces fonds détournés étaient principalement destinés au financement des partis de gauche et du centre appuyant Lula, puis Dilma ; à l’achat de votes de députés et sénateurs afin de les inciter à voter certains textes ou à fermer les yeux sur certaines irrégularités lorsqu’ils participaient à des commissions d’enquête ; et enfin à l’enrichissement personnel d’une multitude de complices, et surtout de Lula, sa famille et ses proches. Le juge Moro et la presse brésilienne ont démontré que Lula, alors ex-président, était en fait le coordinateur de ce système et l’ont comparé à un parrain mafieux. En 2018, Lula a été condamné à 12 ans de prison pour corruption passive et recel. Les conséquences de « Lavajato » ont été d’immenses manifestations de rue en 2015-16, indirectement la mise à l’écart de Dilma en 2016, et l’élection de Bolsonaro en 2018 sur une plateforme de lutte contre la corruption pétiste.

Le cadre étant posé, revenons à la procédure engagée par ces trois partis. Leur demande comporte quatre points. La presse brésilienne a essentiellement porté attention au premier, parce qu’il présente d’extraordinaires paradoxes :  des partis de gauche, voire d’extrême-gauche (le PSOL étant une scission gauchiste du PT, le Parti des travailleurs, et le PCdB ayant comme modèles historiques la Chine maoïste et l’Albanie d’Enver Hodja) demandent la suspension des punitions infligées à des entreprises capitalistes privées pour avoir détourné des fonds collectifs ! Et cela, bien que lesdites entreprises aient reconnu leurs fautes et accepté leurs punitions dans le cadre d’une procédure de plaider-coupable qui a abouti à ces accords d’indemnisation et de pénalités, afin de rembourser la collectivité.

Les trois autres points font comprendre le but ultime des demandeurs : ils s’attachent à dénoncer l’opération «  ».

On retrouve donc ici l’argumentaire de Lula selon lequel il n’est pas coupable, mais victime, dénonçant ainsi un coup d’Etat judiciaire qui n’avait pour but que de l’écarter, lui Lula, de la vie politique, au risque de détruire l’économie et l’industrie brésiliennes. Il s’agit là d’une tentative éhontée de réécriture de l’histoire récente de ce malheureux Brésil, courante chez une certaine gauche à laquelle Lula a en fait toujours appartenu.

Lula a été plusieurs fois condamné mais nie toute implication

Lula s’est toujours proclamé innocent des crimes et délits pour lesquels il a été condamné à plusieurs reprises, s’appuyant sur une décision du Tribunal Suprême. Lequel ne l’a en aucun cas innocenté, mais a seulement décelé un vice de forme (la partialité du juge Moro devenu ensuite ministre) permettant d’annuler les procédures. Notons à cet égard que le STJ est constitué sur un modèle similaire à celui de la Cour Suprême américaine, les juges étant nommés à vie ; ceux qui siègent actuellement ont été nommés avant 2016, principalement pendant les quatorze années où le PT a été au pouvoir.

On devine donc clairement quelle sera la nouvelle tactique de Lula, de ses fans au Brésil et ailleurs, et de la presse bien-pensante dont les principales caractéristiques sont la paresse et la tendance à recopier des récits tout prêts, préparés par d’autres (ne voyez ici aucun complotisme « antisystème », mais simplement le constat du copié-collé systématique des articles publiés par la presse écrite étrangère sur le Brésil depuis une vingtaine d’années). Après avoir reconnu la prétendue innocence de Lula en 2021, le STF doit maintenant déclarer l’opération « Lavajato » anticonstitutionnelle et affirmer qu’il s’agissait  en fait un coup d’Etat masqué et une tentative de détruire les grandes entreprises brésiliennes pour le compte d’intérêts.

On peut aussi d’ores et déjà imaginer la prochaine étape : une action en justice de l’Etat contre Moro, Dallagnol, les autres procureurs et juges, ainsi que les policiers ayant conduit l’opération « Lavajato », pour tentative de renversement des institutions. Après tout, Lula n’a-t-il pas déclaré lors d’une interview (qu’il a tenté ensuite de faire censurer) que son seul objectif s’il était réélu était la vengeance? (Oui vous avez bien lu).

Pendant des mois, les idolâtres (surtout de gauche) de l’homme à barbe nous ont expliqué qu’il allait sauver le Brésil de la dictature d’extrême droite (Bolsonaro a été battu et est parti, certes peu dignement, mais il est parti), constituer un gouvernement d’union nationale allant du centre-gauche au centre-droit (certains ajoutant sans honte : « comme Macron » – j’imagine Macron soutenu par des partis allant de la très libérale LCR jusqu’au PRG), sauver la planète  (en organisant un COP au milieu de l’Amazonie), etc. Mais comme toujours avec cette gauche-là, ils sont bien silencieux lorsque la réalité devient dérangeante et les rattrape : silencieux lorsque Lula menace personnellement ses opposants ; silencieux lorsqu’on déjoue une tentative d’enlèvement du juge Moro et de sa famille par le PCC (l’un des plus grands groupes criminels au monde, dont le PT a récemment demandé à ce que les leaders emprisonnés puissent avoir plus de facilités en prison – tiens, tiens…) ; silencieux lorsque les événements de Brasilia en janvier se transforment en farce qui ressemble furieusement à celle montée par Erdogan en juillet 2016 ; silencieux lorsqu’un projet de loi pour censurer les réseaux sociaux est avancé par le gouvernement ; silencieux lorsqu’un projet comme celui du PSOL, du PCdB et de Solidariedade arrive au STJ ; silencieux lorsque Lula annonce qu’il ne livrera pas d’armes à l’Ukraine et qu’il méprise Zelenski…

Pour l’anecdote et avant le point final, le président de Solidariedade (l’un des trois partis initiateur de l’action auprès du STF), Paulinho da Força (un ancien syndicaliste, comme Lula), a été condamné en première instance en juin 2020 à 10 ans et 2 mois de prison pour crime financier, blanchiment d’argent et association en vue de commettre un crime. Il a interjeté appel et poursuit ses activités politiques.

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1 commenter

Martron 6 avril 2023 - 6:50

La gauche et les fonctionnements de type mafieux ? En France aussi ? La CGT ? Et la droite ? Une enquête serait la bienvenue.

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