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L’Europe a besoin de plus d’expérience et de compétences en matière de politique étrangère et de sécurité

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L’Europe ne peut se permettre une politique étrangère mal conçue. Il est urgent de mettre en place une institution pragmatique, probablement en dehors de l’architecture de gouvernance de l’UE, pour améliorer la position internationale de l’Europe, sa marge de manœuvre et ses perspectives de sécurité.

Pour jouer un rôle politique international à la mesure de son poids économique et démographique, l’Europe doit acquérir les capacités appropriées en matière de politique étrangère et de sécurité. Cette tâche nécessite la création d’un nouveau centre politique, peut-être en dehors du cadre institutionnel existant de l’Union européenne.

Un bon départ

Il y a soixante-dix ans, le 18 avril 1951, la Belgique, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-Bas ont signé l’accord de la Communauté européenne du charbon et de l’acier. L’objectif , à l’époque primordial, était d’apporter de la stabilité à une industrie. Pour les dirigeants politiques, l’objectif était également de jeter les bases d’une paix durable sur le continent. Cette approche s’est avérée extrêmement fructueuse et a donné naissance à la Communauté économique européenne et à l’Union européenne d’aujourd’hui. La collaboration économique a facilité la mise en place d’un marché intérieur florissant en Europe et, finalement, d’une Union politique.

Comme espéré, le processus a apporté à l’Europe une paix et une prospérité sans précédent. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, les puissances européennes étaient périodiquement en guerre, mais le continent a enfin surmonté cet état de fait. Le processus institutionnel d’intégration économique repose sur quatre libertés de circulation : les personnes, les biens, les services et les capitaux. Plus récemment, le traité de Maastricht et le traité de Lisbonne sont venus s’ajouter à l’architecture de l’Union pour en définir les aspects politiques.

L’organe suprême de l’UE est le Conseil européen, qui représente les gouvernements nationaux ; la Commission européenne constitue le pouvoir exécutif.

La politique étrangère était (et est toujours) laissée aux gouvernements des États membres. Toutefois, depuis le traité d’Amsterdam de 1997, l’Union dispose de hauts représentants pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Ils participent, avec les envoyés des grands gouvernements nationaux de l’UE, aux activités et réunions multilatérales, comme le G20. Le traité de Lisbonne a renforcé l’importance de ces représentants. En conséquence, l’UE tente d’être plus active en matière de politique étrangère, mais la principale responsabilité internationale de Bruxelles reste la négociation de traités commerciaux.
Malheureusement, la conduite d’une politique internationale requiert des compétences, une expertise et une expérience qui font encore défaut à Bruxelles. Un autre problème important est que, malgré les traités susmentionnés, le rôle de l’Union dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité reste flou.

Le défi à venir

La politique étrangère est un jeu d’intérêts. Pour réussir, il faut des objectifs clairement définis, une approche pragmatique et une évaluation lucide de sa propre position : forces, faiblesses, opportunités et menaces.

L’UE se considère apparemment comme une superpuissance morale, économique et réglementaire. L’aspect moral et réglementaire est censé être un outil formidable pour faire respecter les principes de l’Union dans le monde entier.

Une politique internationale efficace et durable nécessite deux éléments : de l’argent (une économie saine) et des canons (une dissuasion convaincante et crédible). L’Europe avait autrefois une économie supérieure ; malheureusement, elle est en déclin par rapport à d’autres régions du monde. Et elle ne dispose pas d’une dissuasion efficace.

Ces lacunes, combinées à un rôle mal défini en matière de politique étrangère, affaiblissent le pouvoir de l’UE. On peut également se demander si le cadre institutionnel actuel, issu des efforts commerciaux et économiques, convient à la fonction internationale de l’Union. Cette inadéquation peut expliquer les objectifs mal définis de la politique étrangère et certains échecs diplomatiques spectaculaires récents.

Outre les États-Unis, les partenaires et homologues les plus importants de l’Europe en matière de politique étrangère et de sécurité sont la Russie et la Turquie. Et c’est précisément envers ces pays que les prétentions morales et réglementaires de Bruxelles ont donné des résultats catastrophiques. Au début du mois de février de cette année, le Haut représentant Josep Borrell s’est rendu à Moscou pour soulever la question des droits de l’homme. Il a fini par écouter, impuissant, le ministre russe des affaires étrangères, Sergey Lavrov, parfaitement préparé, faire la leçon à la délégation européenne sur les échecs de l’Occident.

De même, lorsque le président du Conseil européen, Charles Michel, et la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, se sont rendus en Turquie et le protocole européen n’a pas permis de garantir que Mme von der Leyen, qui n’est pas un chef d’État, serait traitée de manière appropriée durant la rencontre. De manière embarrassante, lors d’une réunion avec le président turc, elle s’est retrouvée sans siège. Cet incident diplomatique a été dégradant pour l’UE.
Lorsque ces événements furent reprochés à M. Michel, il a seulement expliqué qu’il avait passé quelques nuits agitées à cause de cette situation. Comment le chef du Conseil de l’UE pourra-t-il dormir lorsqu’un défi majeur se présentera pour l’Union ?

En tout état de cause, l’approche moralisatrice dans les relations avec les autres pays ne fonctionne pas. Faire la leçon aux autres sur les normes européennes ne va pas contribuer à rendre le monde meilleur. Le seul effet provoqué est que certains Européens se sentent moralement supérieurs – d’une manière superficielle et hypocrite.

Pistes à suivre

L’Union européenne n’est pas l’Europe. C’est une institution essentielle qui regroupe les intérêts d’un groupe important de moyennes et petites puissances sur le continent. De cette façon, elles peuvent à la fois bénéficier d’un marché intérieur commun et être compétitives au niveau mondial. Toutefois, la tentative de confier à une seule institution la gestion des intérêts des États membres en matière de politique étrangère et de sécurité, qui sont très différents, ne peut qu’aboutir à de mauvais résultats.

Les pays européens devraient maintenant créer une institution distincte, correctement structurée, pour gérer leurs intérêts étrangers et de sécurité. Il n’est peut-être pas nécessaire que cette structure ait les mêmes membres que l’Union. Une telle institution pourrait faciliter une coopération plus étroite avec l’OTAN. Elle pourrait également permettre à l’UE d’avoir des relations plus équitables avec d’autres puissances, notamment la Russie.

L’UE compte deux membres, la Finlande et l’Autriche, auxquels les accords internationaux interdisent d’adhérer à l’OTAN. Dans une configuration alternative, ces pays européens pourraient conserver leur statut de neutralité. Le plus grand avantage serait que le Royaume-Uni, une puissance militaire considérable dotée d’une riche expérience en matière de politique mondiale, actuellement en dehors de l’Union, pourrait être intégré dans la politique de sécurité européenne.

Lire l’article sur le site du GIS Online

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4 commentaires

OLTRA A 27 avril 2021 - 1:13

L’Europe a besoin de plus d’expérience et de compétences en matière de politique étrangère et de sécurité
à développer et confirmer!

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Laurent46 27 avril 2021 - 4:31

L’Europe a besoin de plus d’expérience et de compétences en matière de politique étrangère et de sécurité
L’Europe comme la France a surtout besoin que l’on vire tous ces fonctionnaires inutiles, incompétents dont le seul objectif est de piller les contribuables en toute irresponsabilité.
C’est cela le problème de l’Europe. Mais comme en France les inutiles sont à tous les niveaux et comme les migrants c’est leur nombre qui ne permet plus de réagir sauf à attendre l’implosion naturelle de ces montres puants et irrespectueux ce qui est a leur porte. De quelle manière je ne le sais pas mais la montée de la haine envers tous ces organismes ne cesse de grossir et un jour ou l’autre ce sera là aussi le nombre qui va réagir en bien ou en mal mais une fois de plus provoqué par toute cette bande d’irresponsables et de fainéants qui se font le gras sur le dos de la population. Le pire à craindre c’est que cette réaction du nombre vienne d’autres cultures ce qui est aussi dans le possible.

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PICOT 27 avril 2021 - 1:25

L’Europe a besoin de plus d’expérience et de compétences en matière de politique étrangère et de sécurité. Quelle Europe?
Il ne faut pas confondre l’UE et l’Europe. Dans cet article, Monsieur, vous évoquez en fait l’UE, ce n’est pas tout à fait la même chose. L’UE n’a aucune existence concrète sur le plan diplomatique, militaire, commerciale, sanitaire etc… nous venons d’en avoir la démonstration in vivo avec l’épidémie virale actuelle : une inefficacité et une incompétence magistrales ont été mises en évidence. L’UE est censée représenter 27 pays dont les intérêts sont divergents la plupart du temps, c’est pourquoi elle n’aura jamais une efficacité quelconque. De plus elle enlève toute souveraineté aux nations, contre leur volonté, ce qui provoquera une explosion finale tôt ou tard. Il n’est pas possible, en effet, que la trahison par nos « dirigeants » du référendum de 2005, en France, reste sans conséquences. L’UE gouverne contre la volonté des peuples et, comme en URSS, cela ne pourra pas durer. De plus l’euro ne peut pas durer non plus. Observez que, dans l’histoire, toutes les monnaies supra nationales ont fini par exploser. L’UE est une construction autoritaire et idéologique, et de ce simple fait elle est bâtie sur du sable, donc inexistante. Il est donc tout à fait logique qu’un diplomate de haut niveau comme Lavrov se comporte ainsi avec le représentant d’une institution qui ne pèse pratiquement rien. Quant à Erdogan, il a été beaucoup plus direct, c’est à dire carrément mal élevé, selon nos critères, du moins. Il n’y a rien à espérer de cette UE qui nous démolit petit à petit et nous impose des mesures que nous ne voulons pas (Loi sur le chômage dirigée contre les chômeurs, en fait. Diminution imposée des dépenses de santé, nous voyons le résultat en ce moment, et nous continuons à fermer des lits! Future « réforme » des retraites : tout le monde a compris que toutes les pensions baisseront, etc..) Il n’y a rien à espérer en restant dans ce truc impossible à réformer (sinon cela aurait été fait depuis longtemps). Une seule solution si nous ne voulons pas nous retrouver dans l’état où se trouve la Grèce actuellement : quitter l’UE. Et le plus vite possible.

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François MARTIN 13 mai 2021 - 7:20

L’Europe a besoin de changer de modèle
Vouloir faire de l’Europe une puissance c’est adhérer au modèle traditionnel des rapports internationaux : la lutte des empires. On sait de quelles catastrophes ce modèle est la cause. Qui a envie d’un bras de fer avec la Chine ou la Russie ?

Si l’on souhaite éviter une troisième guerre mondiale, ne vaudrait-il pas mieux changer de concept ?

Le schéma initial d’un fédéralisme européen choisi, peut être, pour fabriquer une sorte de réplique du modèle étasunien, n’a pas été réalisé parce que les 27 peuples veulent rester des peuples.

Cette résistance peut se révéler tout à fait bénéfique parce qu’elle nous permet encore de développer un modèle plus satisfaisant que celui d’un empire : maintien des souverainetés nationales, création d’une confédération, club d’États civilisés liés par des accords de bonne conduite et de bon voisinage.

Curieusement et contrairement à une croyance largement répandue ce modèle permet à de petits pays de survivre dans un environnement hostile peuplé de plus grandes puissances. L’exemple tout à fait remarquable de la Suisse neutre, totalement entourée de puissances de l’Axe pendant la deuxième guerre mondiale (Allemagne, Autriche, Italie, France occupée), devrait être étudié en tant que solution alternative au modèle impérial.

Une Europe ainsi reconfigurée aurait, paradoxalement, plus de poids réel dans les rapports internationaux que le monstre bureaucratique bruxellois.

Finalement, plutôt que de presser la Suisse de se conformer au modèle de la CEE, la CEE devrait se rapprocher du modèle Suisse.

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