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L’Etat, gestionnaire de fait de Renault

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Après Ascoval, General Electric, Alstom/Siemens, Ford-Blanquefort… les échecs répétés de l’Etat dans la gestion des dossiers industriels sensibles ne l’ont pas empêché de se mêler à contretemps du projet de fusion Renault/Fiat.

Je ne sais pas si ce projet était bon ou non. Mais assurément, il aurait permis la création d’un géant produisant près de 9 millions de véhicules par an avec 380 000 salariés et le rang de 3ème constructeur mondial. Le marché pensait que ce projet était valorisant pour Renault à en croire la baisse (-7%) du cours de bourse de l’entreprise après l’annonce de l’arrêt des négociations par Fiat du fait de la demande de l’Etat français d’un report de décision.

L’Etat français ne détient pourtant que 15% du capital de Renault, mais il s’est octroyé, par la loi, 22% des droits de vote. Avec la fusion, sa participation au capital serait descendue à 7,5%. Afin d’éviter cet accord qui aurait réduit sa participation, il a multiplié les demandes impossibles pour faire reculer les Italiens de Fiat, comme il l’avait déjà fait avec les Chantiers de l’Atlantique face à son partenaire Fincantieri. L’Etat voulait créer un géant européen, un airbus du rail, avec Alstom/Siemens, et il le refuse dans l’automobile et pour la route ! C’est peut-être plutôt que l’Etat ne tolère plus désormais que l’industrie française échappe à son contrôle. Il préfère saborder une négociation plutôt qu’elle se fasse sans lui ou qu’elle diminue son pouvoir.

Le ministre de l’Economie et des Finances ne manque pas en effet d’afficher sa volonté d’être, chez Renault, le patron à la place du patron. Dans une interview au Figaro du 7 juin, Bruno Le Maire déclare : « Cette opération représentait une belle opportunité industrielle… Mais l’État, actionnaire de référence de Renault, avait fixé des conditions qui devaient toutes être remplies ». C’est donc lui qui avec 15 % des actions fixe les conditions. Il fait fi des autres actionnaires, ce qui s’appelle un abus de minorité. Il imposait des conditions sur « des engagements sur la préservation de l’emploi et des sites industriels », sur la participation du nouvel ensemble au programme arrêté par lui pour le développement de batteries électriques et voulait un accord de Nissan. Bruno Le Maire ajoutait « mon déplacement au Japon en fin de semaine, pour le G20 Finances, me permettait de poursuivre les discussions avec nos partenaires japonais ! », comme si c’était lui, ministre, qui négociait à la place des dirigeants de Renault.

Monsieur Le Maire a donc exercé les pouvoirs d’un dirigeant de droit sans en avoir la fonction. En dictant ses choix à la société Renault dans les décisions le plus fondamentales pour l’avenir du groupe, monsieur Le Maire peut sans doute être considéré juridiquement comme gérant de fait. A ce titre il peut être responsable civilement des fautes qu’il peut commettre et pourrait faire l’objet de sanctions professionnelles telles que la faillite personnelle et l’interdiction de gérer une ou plusieurs entreprises au cas où les décisions qu’il impose seraient gravement préjudiciables à la société Renault.

Certes, le groupe Fiat avait un intérêt évident à s’associer avec Renault pour rattraper son retard en matière de recherche technologique. Mais le dirigeant de Renault, Jean-Dominique Senard, qui a prouvé à la tête de Michelin qu’il savait prendre les bonnes décisions pour permettre à un groupe industriel français d’être dans les premiers mondiaux, a probablement une meilleure vision de l’avenir de Renault qu’un énarque politicien de métier. En le désavouant, monsieur Le Maire l’affaiblit et rend plus difficile la mise en œuvre de prochains projets de croissance pour le constructeur français.

Une fois de plus, cette mésaventure à la française discrédite notre pays et ses entreprises. Son origine trouve sans doute ses racines dans le coup de force de M. Macron en 2015, alors ministre de l’Economie, pour attribuer à l’Etat français dans le capital de Renault les droits de vote double prévus par la loi Florange. Cette décision avait profondément heurté la société Nissan avec laquelle Renault avait alors dû s’engager sur une « non-interférence » dans la gouvernance de son partenaire japonais, notamment en matière de nominations à son conseil d’administration ou sur les résolutions qui ne seraient pas approuvées par son conseil. Cela a considérablement affaibli Renault dans ses relations vis-à-vis de Nissan et maintenu une tension entre les partenaires dont Renault pâtit aujourd’hui. Il serait temps que l’Etat comprenne qu’en intervenant dans le monde industriel, il agit comme un éléphant dans un magasin de porcelaine. Arrêtons la casse.

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1 commenter

BOUTEMY 15 juin 2019 - 6:43

ok
Je suis entièrement d'accord avec cette analyse,on n'est plus à l'époque de Colbert qui créais des industries mais dont le roi chassait les protestants.Rien ne change sous le soleil de France.

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