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Comprendre le bitcoin et les monnaies électroniques

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Les monnaies électroniques, dématérialisées et cryptées, font peur aux tenants du conservatisme. Leur interdiction en France, comme l’ont fait la Thaïlande en 2013 ou la Russie en 2014, nous priverait des nombreuses innovations que permettrait la technologie de la blockchain dans le domaine monétaire. Interdire le développement de cette innovation aurait également un impact négatif dans le domaine des applications Web, de la sécurisation des échanges, de la signature de contrats numériques ou encore du vote en ligne.

Dans un récent communiqué, Marine Le Pen déclare vouloir empêcher l’usage des crypto-monnaies comme le Bitcoin afin de promouvoir son modèle de patriotisme économique et de combattre la « société sans argent liquide » que souhaiteraient les élites dirigeantes. Si le Front national nous a habitués aux outrances et à un programme économique délirant, un cap a été franchi dans les propositions démagogiques et surréalistes.

Les crypto-monnaies ont été construites hors du système financier classique

Si le communiqué de presse du FN part de bonnes intuitions, à savoir (1) que le maintien de faibles taux d’intérêt ou le passage à des taux d’intérêt négatifs réduisent les rendements des placements des épargnants tout en accroissant considérablement les risques financiers systémiques pour le secteur bancaire, et (2) qu’une économie de banque centrale sans argent liquide serait un moyen d’accroître le pouvoir de contrôle de la politique monétaire sur l’économie, la conclusion qu’il faut interdire les crypto-monnaies est totalement erronée. En effet, les monnaies électroniques ne sont pas des monnaies de banque centrale, puisqu’elles ont été créées en dehors du système financier traditionnel.

Les monnaies électroniques (comme Bitcoin, Ethereum ou encore Litecoin ou Lisk, pour ne citer que les plus connues) sont des monnaies totalement dématérialisées qui s’appuient sur la technologie de la blockchain, littéralement la « chaîne de blocs ». La blockchain est un registre public qui enregistre l’ensemble des transactions de manière anonyme et ultra-sécurisée au sein de blocs de données qui s’accumulent de manière chronologique. Il s’agit donc d’une base de données publique ou privée, distribuée et partagée, qui est en principe infalsifiable puisque les blocs de transactions sont validés par une procédure cryptographique complexe de résolution d’algorithmes par les ordinateurs qui constituent le nœud du réseau d’échange (les « mineurs »). Cette base de données est donc totalement hors du circuit bancaire classique et ne peut être contrôlée par un organe de décision centrale comme la BCE.

La blockchain sera au cœur des innovations de demain

Bitcoin (BTC), publié par Satoshi Nakamoto en 2009, était la première crypto-monnaie à reposer sur la blockchain. Pour se rendre compte de l’ampleur du phénomène, la capitalisation boursière actuelle du BTC atteint aujourd’hui plus de 7 Md$ et le prix d’une unité monétaire BTC oscille entre 450 $ et 500 $. Mais si le BTC est avant tout destiné aux échanges monétaires, la technologie de la blockchain permet bien davantage. Notamment, Ethereum est une plateforme décentralisée et distribuée qui permet la formation de contrats intelligents, les smart contracts, qui peuvent avoir des applications dans de nombreux domaines autres que monétaires. Ethereum permet notamment d’accroître les processus de validation, de sécurisation et d’anonymisation d’une transaction ou d’un contrat numérique. Grâce à cette technologie, il serait possible entre autres de généraliser le vote électronique, de sécuriser les transactions qui fonctionnent sur la réputation d’un intermédiaire (et donc de remplacer des professions comme les notaires ou les banquiers) ou encore de permettre la location désintermédiée à distance de biens du quotidien comme des appartements ou des vélos.

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Bitcoin et blockchain vont renforcer la propriété privée et la confidentialité des échanges

De plus, le FN se trompe lourdement en énonçant que la dématérialisation de la monnaie aura pour conséquence un affaiblissement du droit de propriété sur l’argent, et une régression en termes de vie privée et de confidentialité. En effet, les contrats numériques permis par l’essor de la blockchain accroissent et renforcent le droit de propriété en permettant la sécurisation et la vérification des transactions tout en diminuant les risques de vol et d’escroquerie. Et la confidentialité est accrue par l’anonymisation que permet la blockchain. On reproche d’ailleurs plus souvent à Bitcoin d’être la monnaie du dark web et de l’anonymat que l’inverse.

Le FN soutient enfin que les citoyens seront pris en otage par les banques privées et que les banques centrales accentueront le contrôle sur toutes les transactions. Or, rien n’est plus faux. Comme l’explique Philippe Herlin dans La Fin des banques[[HERLIN, Philippe, Apple, Bitcoin, Paypal, Google, La Fin des banques ? Comment la technologie va changer votre argent. Eyrolles, 2015]], les banques commerciales traditionnelles seront marginalisées par l’essor des monnaies numériques qui peuvent fonctionner sans intermédiaire financier sur un modèle de pair à pair (peer-to-peer). De plus, elles vont amener une réduction importante des coûts de transaction, des frais bancaires et des coûts de gestion, et généraliser le paiement électronique à l’ensemble des achats de la vie quotidienne. Cela signifie que les détenteurs de monnaie électronique pourront librement contracter, échanger ou payer avec un autre utilisateur sans intermédiaire bancaire, en transférant simplement un certain montant d’un compte à l’autre, une fois terminée la procédure de vérification par les « mineurs » sur la blockchain.

Pour toutes les raisons évoquées, ni les banques privées ni les banques centrales ne pourront contrôler l’évolution des crypto-monnaies par les utilisateurs. C’est pourquoi la proposition du FN d’interdire les monnaies numériques pour ces raisons n’a littéralement aucun sens.

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4 commentaires

Wanadur 31 mai 2016 - 6:50

Enfin libres
Enfin on pourra vendre ce qui ne vous appartient pas, ou n'a jamais existé.
Plus personne pour inscrire les titres de propriété, enregistrer les ventes, etc

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brandenburg 31 mai 2016 - 8:37

Délires
Les monnaies traditionnelles sont déjà en grande partie virtuelle:"Du néant habillé en monnaie"-Jacques Rueff.Et vous voulez en rajouter en créant de nouveaux "faux monnayeurs"-Maurice Allais,prix Nobel d'économie.CRETINS!

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Marc Lassort 2 juin 2016 - 3:03

Vous avez raison : le Bitcoin n'est qu'une solution parmi d'autres. C'est pourquoi j'ai préféré mettre l'accent dans cet article sur la technologie de la blockchain. Le BTC a quelques vices de conception malgré son grand succès, mais Ethereum, par exemple, est extrêmement prometteur. L'idée ici était surtout de dire qu'il faut laisser les développeurs expérimenter et à terme, il est fort possible que les monnaies électroniques deviennent un moyen de paiement, d'échange et d'épargne extrêmement sécurisé et largement répandu.

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