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Ce que nous enseigne la victoire de Thatcher sur les syndicats

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À bien des égards, la France ressemble à la Grande-Bretagne des années 1970 : malgré la montée rapide du chômage et une dette croissante, il est impossible de réformer ce pays tenu par les syndicats. Nos élus, le plus souvent, cèdent face à la pression syndicale. Il y a maintenant 30 ans, le Royaume-Uni a réussi à rompre avec ce pouvoir de la rue, qui va à l’encontre de l’état de droit.

Sous l’égide de Margaret Thatcher, le pouvoir britannique a ainsi pu mettre en œuvre les réformes nécessaires et remettre l’économie sur le chemin de la croissance et du plein emploi. À l’heure où le dialogue social semble avoir vécu en France, quelles leçons peut-on tirer de l’exemple britannique pour l’avenir des réformes structurelles en France ?

Trois ans de préparations et un an de grève

En 1979, l’une des promesses de campagne de Margaret Thatcher repose sur la réduction des pouvoirs des syndicats. Un thème qui fera mouche dans l’opinion publique : les grandes grèves des mineurs en 1972 avaient paralysé le pays pendant 7 semaines.

Entre 1980 et 1982, les conservateurs feront voter deux lois limitant le pouvoir de nuisance des syndicats lors des mouvements sociaux. D’abord en 1980, l’Employment Act restreint le droit de grève en interdisant que le piquet de grève ait lieu à un autre endroit que là où la grève a éclaté. Parallèlement, les grèves dites de solidarité, où des professions autres que celles premièrement concernées appellent à s’allier aux grévistes, sont interdites. En 1982, la loi du secrétaire d’État à l’Emploi, Norman Tebbit, supprime l’immunité syndicale en cas de grève illégale et introduit le vote à bulletins secrets avant le début d’un conflit social.

Ces lois permettront à Margaret Thatcher de limiter par petites touches le droit syndical, tout en renforçant le pouvoir du gouvernement et en garantissant un certain maintient de l’ordre. Cependant, la dame de fer avait déjà butté contre le NUM en 1981 (le puissant syndicat minier). Elle savait donc qu’il lui fallait préparer sa riposte si elle voulait réformer le syndicalisme et refonder un secteur minier peu rentable. Thatcher anticipe de longues grèves et elle sait qu’elle ne devra pas céder face à la pression syndicale. Il en va de sa crédibilité et de l’avenir des réformes qu’elle envisage de mettre en place. Pour y faire face, elle met donc en place un comité ad hoc dès 1981, organisé dans le secret le plus absolu.

« Cette structure, totalement opaque, allait fournir un travail considérable. Des stocks de charbon furent constitués près de toutes les grandes centrales électriques. Des fonds secrets leur furent généreusement alloués pour qu’elles augmentent elles-mêmes discrètement leur stock de charbon. On multipliait en même temps le nombre de celles qui pouvaient fonctionner au fioul. Des contacts étaient pris avec les entreprises privées de transport routier pour pallier une éventuelle grève de solidarité des cheminots. L’armée et la protection civile étaient également invitées à proposer des plans pour faire fonctionner les principaux services publics »[[THIÉRIOT Jean-Louis, Margaret Thatcher, Éditions Perrin, 2007, P. 389.]].

En 1983, forte de son écrasante victoire aux élections générales et de son récent succès militaire aux Malouines, Thatcher a la popularité nécessaire pour mener à bien ses réformes syndicales. D’autant qu’une partie du milieu ouvrier – très syndiqué – a voté pour elle lors des élections. En mars 1984, elle annonce la suppression de 20 000 postes de mineurs sur 221 000 et la fermeture de 20 mines. La grève démarre le 6 mars 1984 pour se terminer près d’un an plus tard, le 3 mars 1985.

L’opposant principal du gouvernement est Arthur Scargill, Président du NUM, communiste convaincu, il préfére la lutte et la révolution à la négociation. La Grande Bretagne compte plus de 10 millions de syndiqués en 1984, dont la majorité est rassemblée au sein du TUC (Trade Union Congress). Ce nombre aurait fait reculer n’importe qui, sauf Margaret Thatcher. Tout au long de la grève, elle tient tête, l’opinion publique la soutient, révoltée par la violence des syndicalistes qui prennent pour cible forces de l’ordre et les ouvriers qui souhaitent continuer le travail.

À l’approche de Noël 1984, déjà 75 000 mineurs ont repris le travail. Le NUM est à terre politiquement et financièrement, le travail reprend le 3 mars de l’année suivante sans que le syndicat n’obtienne quoi que ce soit. Ainsi, Thatcher pourra mener les réformes nécessaires sans que le pays soit constamment bloqué par les grèves. La force de Margaret Thatcher a été de faire appliquer la loi et d’abolir les privilèges syndicaux au nom de l’état de droit.

Ne plus céder face à la pression syndicale

Pour autant, le syndicalisme anglais n’a pas disparu. La représentativité y est même près de 4 fois plus forte qu’en France. Par ailleurs, il n’existe pas de service minimum obligatoire dans la fonction publique lorsque des grèves sont lancées. Les syndicats détiennent même des fonds pour dédommager les grévistes en cas d’interruption de travail. Toutes ces dispositions n’existent pas en France, et pourtant, tous nos hommes politiques ont reculé face à la menace de la grève.

Le problème majeur, c’est que l’on a accordé aux syndicats un pouvoir politique supérieur à leur capacité de négociation. Par exemple, chaque accord est automatiquement étendu à tous les secteurs, mêmes s’il n’y a pas eu de concertation préalable ou qu’ils ne sont tout simplement pas concernés. Cette extension automatique n’existe pas ailleurs (sauf en Italie)[[Ces données proviennent de la base de données ICTWSS de l’Université d’Amsterdam, disponibles ici : http://www.uva-aias.net/208]] ; en Suède, au Danemark ou en Allemagne, les accords sont discutés branche par branche et la concertation nationale organisée par l’État est plutôt rare. Les syndicats jouent dans ces pays leur vrai rôle, défendre le salarié, et n’ont pas cette incitation malsaine à défendre leurs privilèges grâce à un dialogue régulier avec les autorités publiques.

En réalité, il n’y a jamais eu de dialogue social en France, il a toujours été politique et loin des réalités du terrain. Car la manière dont il a été conçu lui donne une dimension politique trop importante. Ce n’est pas à l’État d’engager le dialogue social, mais aux partenaires sociaux de s’entendre entre eux, à condition que le cadre des négociations soit bien déterminé et réduit aux problèmes pratiques rencontrés par l’entreprise et ses salariés. Pour cela, il faut que les syndicats représentent réellement les employés, et donc, qu’ils ne soient pas financés exclusivement par des subventions publiques.

Changer le syndicalisme français, c’est la garantie de pouvoir mener à bien les réformes structurelles nécessaires pour le pays. Le législateur ne doit plus céder face à la pression de syndicats non représentatifs de l’emploi salarié, c’est ce que nous enseigne, encore 30 ans après, la victoire de Margaret Thatcher.

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1 commenter

Astérix 13 juillet 2014 - 6:52

L'intelligence !
Madame THATCHER, parce qu'elle n'était pas énarque, a sauvé l'Angleterre. Une femme simple, pleine de bon sens.

Qu'avons-nous en France ? Toutes les femmes au pouvoir ont été formées par notre système éducatif imbécile et sont passées par l'ENA comme les hommes. Regardez la loi ALUR; une entreprise de démolition.. qui va achever l'immobilier. Avec les diagnostics en tout genre, Un acte d'un dossier moyen nécessitera bientôt une tonne de papiers avant de pouvoir être signé…

Les Français sont persuadés qu'une personne qui a fait de longues études est automatiquement intelligente, quelle erreur. C'est bien Le grand drame de notre Pays.

De ce fait, je ne vois aucun redressement possible.

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