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Délire bureaucratique : une conception très plastique de la cantine scolaire

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Voilà des années que l’on parle de l’interdiction du plastique dans les cantines scolaires. Mais à force de modifier et de remodifier la réglementation, nos petits bureaucrates sont complétement perdus et ils ont fait n’importe quoi.

Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition écologique, a annoncé sur RMC le 18 mars que l’interdiction du plastique dans les cantines scolaires, qui a du plomb dans l’aile, sera néanmoins rapidement effective. En effet, le décret d’application de la loi a malencontreusement englobé l’interdiction de la vaisselle et des couverts en plastique, alors que la loi n’interdisait que les plats de réchauffe en plastique. Aussi la ministre a-t-elle annoncé une « proposition de loi » (étrange : nous penserions plutôt à un projet de loi) qui va « permettre d’interdire (sic) tout ce qui est plastique dans les cantines scolaires ».

L’objet de notre pendule est non pas de clarifier les choses, ce qui est au-delà de nos compétences, mais d’exemplifier le délire bureaucratique qui règne en France. Voici la chronologie :

  • l’article 28 de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 « pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous », selon l’intitulé ridicule de la loi que l’on préfère dénommer « Egalim » (et il faut préciser Egalim I, car depuis, en quelques années seulement, il y a eu une loi Egalim II, puis une loi Egalim III et nous avons échappé de peu, mais pour combien de temps ?, à une loi Egalim IV !), contient un article 28 qui modifie l’article du code de l’environnement poétiquement mentionné comme le L 541-10-5-III, lequel doit être cité, mais uniquement pour l’alinéa qui nous intéresse (car l’article est beaucoup plus long) : « Au plus tard le 1er janvier 2025 (nous y sommes donc), il est mis fin à l’utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service en matière plastique dans les services de restauration collective des établissements scolaires et universitaires ainsi que des établissements d’accueil des enfants de moins de six ans ». Précision bien venue, la loi ajoute : « Dans les collectivités territoriales de moins de 2.000 habitants, le présent alinéa est applicable au plus tard le 1er janvier 2028 ».
  • l’article 77 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 « relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire », article qui à lui seul tient sur une page et demie, interdit au plus tard le 1er janvier 2025 « l’utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffage et de service en plastique » dans différents services (maternité, pédiatrie, protection maternelle et infantile, etc.).
  • l’article D 541-338 du code de l’environnement créé par le décret n° 2025-80 du 28 janvier 2025 dispose que l’on entend par « contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service » « les objets destinés à contenir des denrées alimentaires et entrant en contact avec ces mêmes denrées, qui sont utilisés pour la cuisson, la préparation, la remise en température, la présentation, le service ou la consommation des plats, y compris la vaisselle et les couverts (nous soulignons)».

Ce sont ces douze derniers mots qui posent problème car nos petits bureaucrates, soit volontairement (et dans ce cas de manière intrépide), soit involontairement, sont allés au-delà de la loi, pourtant déjà très large. Or, un décret doit respecter la hiérarchie des normes et il ne peut donc pas interdire ce que la loi n’interdit pas formellement. Autrement dit, la loi prohibe l’utilisation de contenants alimentaires et tout le monde comprendra que la vaisselle ou les couverts ne sauraient être qualifiés de tels ! Le ministère de la Transition écologique a donc mis en ligne un « projet de décret portant modification de la définition des contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service mentionnée à l’article D 541-338 du code de l’environnement » qui supprime les douze derniers mots litigieux, l’article D 541-338 précité devant se lire in fine ainsi : « la présentation ou le service ».

Si ce n’est que ce « rétropédalage » quelques semaines seulement après la parution du décret n’a pas eu l’heur de plaire à certaines associations écologistes ou de parents d’élèves. C’est ce qui explique la volonté de la ministre de « tout interdire », vaisselle et couverts en plastique inclus, mais cette fois par le truchement d’une loi et non d’un décret.

Toute cette lamentable histoire démontre combien notre pays se perd dans les futilités, et souffre d’une bureaucratie et d’un normativisme envahissants.

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