Le Sénat publie à longueur d’année des rapports, souvent de grande qualité. Les sénateurs sont aidés dans leurs travaux par le corps des administrateurs du Sénat, fonctionnaires recrutés à l’issue d’un concours administratif des plus sélectifs.
Toujours prompt à  suggérer de judicieuses modifications à nos politiques publiques, il reste étrangement muet au sujet de son régime de retraite. En aurait-il honte ?
Sénateurs et fonctionnaires du Sénat jouissent de ce qui reste interdit au vulgum pecus, le salarié du secteur privé : la retraite par capitalisation. Celle-ci reste honnie, tous partis politiques confondus, y voyant, pour la gauche, un prurit du « mur de l’argent » et pour la droite, qui puise tout autant ses racines dans Maurras que dans une doctrine gaulliste pétrie d’étatisme, un avatar de la finance mondialisée.
Les fonds de pension sont frappés d’opprobre … sauf lorsqu’il s’agit de faire appel aux fonds étrangers pour, entre autres, souscrire des emprunts d’Etat pour financer nos déficits publics.
Quant à l’opinion publique, abreuvée des poncifs sur le risque de défaillance des acteurs privés, elle continue très majoritairement à rejeter la retraite par capitalisation, ne serait-ce que l’introduction d’une fraction de retraite par capitalisation, continuant à préférer la modicité des pensions d’Etat, celles du régime général d’assurance vieillesse, (en faillite virtuelle) à des pensions faisant une part à la gestion privée tirant ainsi profit de la dynamique à long terme du rendement des actifs privés.
Qu’importe si ce panachage, répartition et capitalisation, correspond au choix de la plupart de nos voisins européens,  notamment de ceux qui combinent les prélèvements les plus bas et les pensions les plus élevées, l’égalitarisme obsessionnel commande « la médiocrité, mais la médiocrité pour tous ».
En dehors de quelques cercles libéraux dont l’IREF, la retraite par capitalisation reste le péché véniel de ces fonds de pension caricaturés pour leur avidité et leur court-termisme. Banquiers, assureurs, économistes (..), en dehors de quelque esprits lucides et courageux, comme l’était le regretté Denis Kessler, ne se donnent guère de mal pour promouvoir la retraite par capitalisation par crainte de s’opposer frontalement à nos gouvernants. On ne mord pas la main qui vous nourrit.
2 commentaires
Comment voulez vous que l’opinion publique s’exprime autrement? Une des plus grandes forces d’inertie est la résistance au changement, et comme « l’opinion publique » ne comprend rien à la retraite par répartition, ne vous étonnez pas qu’elle s’y accroche par habitude .
Quelle sont les croyances, entretenues, de l’opinion publique?
1 – Ma cotisation est une provision pour ma future retraite. Faux! La cotisation sert à payer les retraites du moment, et vous n’avez plus qu’à espérer qu’il y aura quelqu’un pour payer la votre.
On n’imagine pas à quel point cette idée, fausse, est encrée dans la tête de nos concitoyens. J’ai discuté de cela avec plusieurs personnes diplômées d’études supérieures et systématiquement l’idée que les cotisations étaient une provision pour leur future retraite revenait sur le tapis !
2 – C’est la solidarité intergénérationnelle… « solidarité », ça ne peut pas être foncièrement mauvais! Sauf que dans cette « solidarité » il y a les profiteurs et les perdants:
–Perdants:
-les héritiers de ceux qui décèdent avant leur retraite (ou peu de temps après) et ne verrons jamais la contrepartie des cotisations de leurs parents. Evidement les héritiers de ceux qui ont eu un travail pénible seront les plus affectés.
-Les entreprises françaises qui ne profitent pas de l’investissement des français et qui doivent se soumettre aux exigences des fonds de pension étrangers avec à la clé la perte de souveraineté. C’est la double imposition pour nos salariés: cotisation pour les retraités du moment et production de dividendes pour les fonds de pension américains (ou autres).
–Profiteurs:
Ceux qui partent à la retraite prématurément (52 ans pour les contrôleurs aériens!) et qui vivront aux crochets des cotisations des enfants de leurs concitoyens tout le reste de leur vie… et elle peut être longue quand on a eu une vie « pénarde », d’autant plus que vous partez tôt.
Ceux qui n’ont pas élevé d’enfants, qui auront bien profité de leurs loisirs avec les économies (de temps et d’argent) réalisées et qui vivront leur longue retraite aux crochets des enfants de ceux qui en ont eu. *
Alors on s’étonne encore que les français soient attachés à la répartition ? Normal, ils n’y comprennent rien !
Vivement une campagne nationale d’explication… pourquoi pas sur la base de mon commentaire?
* Et on s’étonne que le taux de natalité baisse!
Dire aux français que s’ils n’ont pas eu d’enfants ils n’auront pas de retraite par répartition (la vrai vie quoi!) serait surement la meilleure campagne d’encouragement !
Bien d’accord avec Oncpicsou : ceux qui n’ont pas eu d’enfants vivent du travail des enfants des autres, qui, eux, se sont donné la peine de les élever. Par contre je rappelle aux partisans de la retraite par capitalisation ce vieil adage boursier : « les performances passées ne sont pas gage des performances futures »
Application au cas des retraites : les performances boursières, et celles de l’épargne en général, supposent que les entreprises aient suffisamment de main-d’Å“uvre et de clients. C’est le cas actuellement. Dans quelques décennies là démographie sera sévère tant pour la répartition que pour la capitalisation. Cette dernière a des vertus, mais ne fait pas de miracle.